La filière du bois en Picardie : un secteur en mutation
La filière du bois en Picardie est un acteur majeur du développement territorial. Elle est néanmoins confrontée aujourd’hui à de multiples défis : encourager les entreprises de seconde transformation du bois, répondre aux nouveaux besoins et normes, etc. La filière en Picardie s’est ainsi structurée et de nombreuses stratégies régionales et nationales ont vu le jour afin de l’accompagner vers l’avenir.
La France est le troisième pays forestier de l’Union européenne. La filière du bois réalise 50 milliards de chiffre d’affaires et emploie plus de 450 000 personnes. Actuellement, le pays exporte du bois brut dit “grumes” et importe massivement des produits transformés à base de bois. Cette configuration a conduit à la fuite d’une part importante de la valeur ajoutée liée à la transformation du bois. Résultat ? Un déficit de la balance commerciale de la filière de l’ordre de 6 milliards d’euros, qui s’ajoute aux difficultés déjà rencontrées par le secteur suite aux crises économiques successives. La filière du bois en Picardie n’échappe pas à ce cas de figure. Avec 350 000 hectares de forêts, la région a un taux de boisement relativement faible par rapport à la moyenne nationale (17,9% contre 28,6%). Elle se distingue néanmoins grâce à ses forêts de qualité qui produisent des bois issus des feuillus (chêne, hêtre et peuplier) même si ces ressources sont encore sousexploitées. La filière du bois regroupe un grand nombre d’acteurs : les propriétaires forestiers, la sylviculture, les entreprises de première transformation ainsi que les entreprises de deuxième transformation. Au total, cela représente plus de 3 300 établissements. La récolte de bois picard représente 3,16% de la récolte nationale. Si ce volume évolue peu, la part du bois d’industrie et celle du bois d’énergie progresse, surtout pour le bois bûche, à l’inverse du bois d’oeuvre qui baisse. La filière représente donc pour la région un fort potentiel de développement territorial qu’il s’agisse de création d’emplois, de compétitivité économique ou de développement durable. De nombreuses stratégies se sont donc développées ces dernières années afin d’accompagner le secteur.
Des stratégies de développement
La Picardie a tout d’abord misé sur le développement de sa filière bois énergie dés le vote en janvier 2007, du Plan régional énergie-climat (PREC) où la région s’est engagée à diviser par quatre ses émissions de gaz à effet de serre. Pour ce faire, le conseil régional, en partenariat avec l’Ademe, a notamment axé ses actions sur le développement des énergies biomasses, telle la filière bois-énergie. Cela consiste à exploiter le potentiel énergétique de la ressource en bois pour chauffer des bâtiments. De nombreuses chaufferies bois collectives, qui reposent pour le combustible sur le granulé et les plaquettes ou bois déchiqueté sont actuellement en service ou en construction sur toute la Picardie. La commune de Holnon dans l’Aisne dispose ainsi d’une chaufferie bois permettant de chauffer et produire l’eau chaude de plusieurs bâtiments publics.
Ces solutions qui permettent d’éviter le rejet de 310 tonnes de CO2 par an, sont beaucoup plus économiques que les autres combustibles, et créent 4 fois plus d’emploi que les filières d’énergies fossiles. Toujours dans l’optique de développer le secteur, en février 2010, un contrat de filière interrégionale a été signé entre les régions Picardie et Nord-Pas-de-Calais. L’objectif était d’apporter un soutien accru au développement de la filière bois, tant au niveau économique, environnemental que social, notamment en fédérant ses différents acteurs. L’animation du contrat filière et du pôle d’excellence régionale bois, développé en région Nord-Pas-de- Calais, fut confiée à l’Interprofession Nord Picardie Bois, qui coordonne la mobilisation et la structuration de tous les acteurs de la filière.
En octobre 2013, le gouvernement a quant à lui présenté le Plan national d’action pour l’avenir des industries de transformation du bois. Élaboré par les ministères de l’Agriculture, de l’agroalimentaire et de la forêt, du Redressement productif, et de l’Egalité des territoires et du logement, l’objectif de ce plan est de conforter l’activité des entreprises de transformation de la filière. Il s’articule ainsi autour de quatre axes stratégiques : l’affirmation d’une nouvelle dynamique de filière, la prise en compte des enjeux de financement pour développer une offre compétitive, la mobilisation de leviers immédiats et structurants, l’engagement rapide de changements structurels dans la filière au service de la compétitivité. Des mesures ont ainsi été prises en faveur des industries du bois comme la création d’un comité stratégique de filière bois au sein du conseil national de l’industrie, la majoration du taux d’amortissement pour les investissements productifs dans les scieries, etc. Dans le cadre de la mise en place de ce plan , Jean-François Cordet, préfet de la région Picardie a rencontré la filière bois locale le 19 novembre 2013, à l’occasion de sa visite de la scierie de Nobécourt et à la société Bois Durable de Picardie. Il déclarait à cette occasion : « (…) L’ensemble des activités de la filière bois représente 15 000 emplois dans 3 300 établissements répartis sur l’ensemble de la région. Mais il s’agit d’ un secteur qui subit la forte concurrence des pays asiatiques et scandinaves, dans un contexte économique de plus en plus globalisé. La Picardie souffre, en effet, comme toutes les régions de forêts feuillues de la raréfaction des débouchés traditionnels des bois locaux au profit, parfois, de bois importés ou de résineux provenant d’autres régions françaises (…). Je n’ignore pas qu’en l’espace de 10 ans, près de la moitié des entreprises de la filière bois de Picardie ont fermé. Ce douloureux constat ne doit cependant pas nous faire oublier que la filière dispose de nombreux atouts pour se développer. Pour y parvenir, la question de l’innovation est fondamentale. (…) ».