Artisanat

La CMA de la Moselle en résistance

Dans un contexte budgétaire hexagonal contraint et incertain, la Chambre de Métiers et de l’Artisanat de la Moselle doit s’adapter au contexte du moment. Combatif, son président, Philippe Fischer, revient sur les adaptations de sa structure, mais aussi sur les dangers à voir se dessiner un modèle de vendeur de prestations, avec une qualité de formation altérée.

Malgré le contexte d’incertitudes budgétaires, le président de la CMA 57, Philippe Fischer, et sa secrétaire générale, Vanessa Py, demeurent combatifs. @ Laurent Siatka
Malgré le contexte d’incertitudes budgétaires, le président de la CMA 57, Philippe Fischer, et sa secrétaire générale, Vanessa Py, demeurent combatifs. @ Laurent Siatka

Ce n’est pas un scoop. La Chambre de Métiers et de l’Artisanat de Moselle est une structure efficiente, un modèle même, à certains égards, alliant la pérennisation de métiers essentiels ancrés sur nos territoires, en assurant la relève générationnelle, et une indispensable innovation. Elle conseille, accompagne, forme les futurs artisans, les porteurs de projets, les chefs d’entreprise et les salariés de l’artisanat. Sa palette de missions est dirigée au service de près de 26 000 entreprises et de 1 100 apprentis (via son Campus des Métiers sur trois sites à Metz, Forbach et Thionville). Cette réussite, incontestable, est, ces derniers mois, alourdie de nuages d’incertitudes. Aux côtés de sa secrétaire générale, Vanessa Py, le président de la CMA 57, Philippe Fischer, élu à la tête de la chambre consulaire en 2021, explicite clairement la problématique : «Au niveau des CMA, nous ne cessons d’alerter sur nos baisses de moyens. Celle relative aux NPEC - niveau de prise en charge des contrats d’apprentissage - a amputé notre Campus des Métiers de 380 000 € en 2023 et de 800 000 € cette année. Où cela s’arrêtera-t-il? C’est toute la chaîne de l’artisanat qui est impactée. Plus de 50 % des formations sont déficitaires.» Ce n’est pas la feuille de route du gouvernement qui le rassurera. À l’heure où les députés ferraillent sur le projet de loi de finances 2025, les annonces préalables du ministère du Travail «de diminuer de 1,2 milliard d’euros les aides à l’apprentissage mises en place pour soutenir l’emploi des jeunes, de ramener la prime de 6 000 à 4 500 €» inquiètent les acteurs de l’artisanat «1er employeur de France.»

La Chambre de métiers et de l’artisanat de la Moselle demeure une structure incontournable sur notre territoire, contribuant à la formation, à l’emploi, à l’attractivité. @ Laurent Siatka

L’artisanat se réinvente

Du côté de la Moselle, on reste combatif. Plus que jamais. Philippe Fischer en est l’exemple même. Il tempête, tape du poing sur la table, avec cette interrogation : «Veut-on encore former des artisans demain? Devrons-nous fermer des formations quand beaucoup de métiers sont en tension? Nos CMA ne doivent pas devenir des centres où l’on vendrait des prestations: ce serait tout notre contraire.» Alors, lui, comme d’autres, prend son bâton de pèlerin, pour sensibiliser les législateurs dont dépendent tant de paramètres et de retombées, souvent insoupçonnées au cœur des territoires. Le président l’assure : «Dans nos CFA, toutes nos dépenses sont faites dans le seul souci de préserver la qualité de nos enseignements, de construire l’avenir de nos jeunes, de gérer au mieux nos budgets. Nous avons entamé d’ailleurs notre plan de transformation pour toujours plus d’efficacité. Je dois le dire, je suis accompagné d’une formidable équipe. Elle se bat à mes côtés au quotidien.» Il est un autre facteur souvent peu évoqué : celui de l’accompagnement des auto-entreprises par la CMA 57.
Quand 70 % des créations se font sous ce statut désormais, Philippe Fischer note : «80% de celles qui sont accompagnées par nos services passent le cap des trois ans.» Quid, dès lors, de l’avenir immédiat, à l’aube de 2025 ? L’artisanat a montré durant les crises successives, économiques et énergétiques, une résilience certaine. Il se réinvente. Malgré la pénurie de main-d’œuvre, il séduit, car correspond à certaines valeurs, à des repères, à cette quête de sens par le travail. Continuer d’innover, optimiser ses services, offrir de nouvelles formations : un triptyque en forme de challenge pour la CMA 57. Elle a les outils pour le relever, par son ancrage et son expertise, s’appuyant sur de probants résultats aux examens et en taux d’insertion.

«Ne pas baisser la qualité de nos formations. Les premières victimes en seraient les artisans», assure Philippe Fischer, président de la CMA 57.