Universités d’été de l’économie

L’IA au cœur de l’économie amiénoise

Pour sa quatrième édition, les Universités d’été de l’économie ont réuni 300 acteurs économiques, élus et universitaires, avec comme sujet central, l’intelligence artificielle dans les entreprises.

Yann Ferguson encourage les entreprises à utiliser l’IA tout en protégeant les données stratégiques. (c)Aletheia Press/DLP
Yann Ferguson encourage les entreprises à utiliser l’IA tout en protégeant les données stratégiques. (c)Aletheia Press/DLP

« Les Universités d’été de l’économie amiénoise sont une occasion privilégiée de réunir les forces vives du territoire autour d’une thématique d’actualité. L’intelligence artificielle en est une, puisqu’elle va transformer notre économie mais aussi notre société », souligne, ce 25 juin, Brigitte Fouré, maire d’Amiens.

Discipline de recherche depuis 1956, l’intelligence artificielle (IA) a déjà fait son entrée dans le quotidien de nombreuses entreprises, mais aussi chez les particuliers, notamment les étudiants. Et le territoire entend s’approprier cette technologie. « L’attractivité de la métropole s’améliore. Amiens a toujours été une cité innovante et doit le rester », ajoute ainsi la maire devant un parterre de 300 acteurs économiques, élus et universitaires.

« Les étudiants ne reviendront pas en arrière »

« Il y a quelques années, l’intelligence artificielle était perçue comme une technologie pouvant transformer le travail manuel. Or, on se rend compte que c’est plutôt un outil d’aide à la décision », explique Yann Ferguson, sociologue, directeur scientifique de Labor’IA - Inria à Toulouse. Il souligne qu’avec l’IA générative, qui crée du texte, des images ou d'autres médias comme ChatGPT, cette technologie sort du cercle des initiés pour atteindre le grand public. « 20% des salariés se sont emparés seuls de cet outil. La grande majorité d’entre eux ne le disent pas à leur employeur car beaucoup ont encore peur de l’IA. Il faut dépasser cela et encourager les initiatives », assure-t-il.

Le directeur scientifique y voit une solution pour améliorer la qualité du travail. « Nous allons assister à un déplacement de la valeur. Toutes les entreprises, quelle que soit leur taille ou leur secteur d’activité, doivent établir une feuille de route et réfléchir à l’intégration de l’IA dans leurs processus »conseille-t-il. Selon lui, il est primordial de ne pas manquer ce virage pour atteindre une maturité technique et sociale ouvrant des opportunités à l’avenir. « Les étudiants ont déjà intégré l’IA dans leurs pratiques, ils ne reviendront pas en arrière une fois en entreprise. C’est aussi un vrai levier de recrutement », observe-t-il.

« Oui, il y aura des destructions d’emplois, mais… »

Très implantés à Amiens, les centres d’appels observent depuis de longues années les ruptures technologiques comme l’arrivée du smartphone en 2007 et la disparition progressive des téléphones fixes. « L’intelligence artificielle est une chance : les salariés vont pouvoir monter en compétences et gagner du temps. Toute la question est de savoir quelle est la place de l’humain dans cet univers », interroge Éric Dadian, président de l’Association française de la relation client (AFRC), qui rappelle que le secteur compte actuellement 400 000 emplois en France.

Emmanuel Bilbault, cofondateur de Posos, Éric Dadian, président de l’AFRC, Caroline Chopinaud, directrice du HubFranceIA, Gilles Dequin, directeur de l’Unité de Recherche MIS, Ingrid Dhalluin d’Euratechnologie et Pierre-Jean Eraud, directeur du site Goodyear d’Amiens. (@Aletheia Press/DLP)

« Oui, il y aura des destructions d’emplois, mais l’IA permet aux centres de relations client de réaliser plusieurs centaines de milliers d’euros de gain de production. Une partie de cette ressource doit absolument être réinjectée dans la formation pour accompagner l’évolution du secteur », insiste-t-il. Outre des outils comme ChatGPT ou Copilot utilisés pour la production de contenus, l’IA commence à trouver sa place dans l’industrie.

C’est le cas sur le site Goodyear d’Amiens, la plus grande usine française du géant américain, qui utilise cette technologie pour la planification de sa production. « Notre volume de production de pneus à l’année n’a pas changé, mais le nombre de références est passé de 250 à 500. Nous avons donc besoin d’être plus flexibles », détaille Pierre-Jean Eraud, directeur de l’usine Goodyear d’Amiens.

Grâce à la collecte de données opérée par l’IA, les besoins de production sont mis à jour en temps réel, assurant la diversité des références. « Nous utilisons aussi des jumeaux numériques sur nos machines pour capter des informations précises quant à leur état. Ainsi, nous prédisons les performances des machines, afin d’éviter les aléas et d’anticiper la maintenance. Sans l’IA, nous ne pourrions pas répondre à la demande des clients », analyse le dirigeant.