L’entreprise sambrienne se chargera de la propulsion électrique

Depuis 1898, l’usine fabrique moteurs et alternateurs. L’aventure industrielle se poursuit, entre autres, avec le marché remporté en avril par la DCNS, dont Jeumont Electric est un des partenaires réguliers.

Dans la partie « musée » de l’usine : un moteur remontant aux débuts du métro parisien.
Dans la partie « musée » de l’usine : un moteur remontant aux débuts du métro parisien.

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Nathalie Renard, directrice du marketing, en compagnie de Patrick Brutsaert, responsable calculs machines, service études. Derrière eux : un rotor, une des deux pièces d’un alternateur avec le stator…

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L’entrée de l’entreprise, rue de l’Industrie à Jeumont, dans la même rue qu’Areva. La Sambre n’est pas loin.

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Un des halls du site industriel. Il a évolué, s’est modernisé, mais l’adresse est la même qu’en 1898.

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Un alternateur complet en maintenance.

 

 

 

Fin avril, au terme d’un appel d’offres international, l’Australie avait choisi le groupe industriel français DCNS1 comme partenaire, en vue de concevoir et de construire douze sous-marins conventionnels de haute mer. Au printemps, la commande, remportée devant le Japon et l’Allemagne, était estimée à 34 milliards d’euros. Le groupe DCNS est détenu par l’Etat à 62,49% et par Thalès à 35% (entreprise où l’Etat a également une participation). Si le constructeur naval historique de la France est apparu dans la lumière, il ne sera cependant pas le seul à profiter de ce marché qui devrait s’étirer jusqu’en 2030. La DCNS distribue le travail, assemble, assume la responsabilité mais plusieurs entreprises, équipementiers ou fournisseurs, bien identifiés, ont été associées à l’appel d’offres.

 

C’est le cas de Jeumont Electric, dans le Val de Sambre, qui doit s’occuper de la propulsion électrique et fabriquer les moteurs ainsi que l’électronique associée qui se situeront à l’arrière des sous-marins australiens. «On fait partie du pack, assure Nathalie Renard, et on occupe le quatrième rang, derrière la DCNS, Thalès et Safran.» La construction ne va pas commencer tout de suite. L’effet d’annonce et le cocorico de victoire ont ouvert des négociations entre l’Australie et la DCNS en vue de finaliser un contrat dont la signature pourrait intervenir vers la fin 2016 ou le début 2017. Nathalie Renard, directrice du marketing chez Jeumont Electric, fait bien comprendre qu’un tel contrat suit une procédure. «Une fois le contrat final signé, estime-t-elle, suivront les études entre 2017 et 2020. La construction devrait, elle, commencer en 2020 et se poursuivre jusqu’en 2030 selon un cadencement qui est à déterminer.» A priori, donc, Jeumont Electric travaillerait pendant dix ans sur cette commande.

 

Un moteur déjà «rodé». L’entreprise sambrienne, confirme Mme Renard, va se charger du système de propulsion. La directrice du marketing précise que le moteur à fabriquer répond à une technologie éprouvée depuis 1980, connue sous le nom «Magtronic», mais ayant évolué avec les années. Le moteur de nouvelle génération devra composer avec l’architecture du sous-marin, répondre à des critères de discrétion électroacoustique et à des impératifs liés au système de combat. Si le moteur est rodé, l’entreprise l’est aussi puisqu’elle a déjà participé à plusieurs chantiers de bâtiments militaires de surface (frégates multimissions, navires ravitailleurs…) ou de sous-marins, classiques ou nucléaires. Mme Renard précise au passage que Jeumont Electric participe également à l’équipement de paquebots de croisière : propulsion principale, distribution d’énergie, motorisation auxiliaire lors des manœuvres dans les ports…

 

Moteurs et alternateurs. Le métier de Jeumont Electric est très technique. Pour simplifier, disons que l’équipementier conçoit et réalise, dans ses 66 000 m2 d’ateliers et de bureaux, des gammes de moteurs, qui transforment un courant électrique en mouvement, et d’alternateurs, qui transforment un mouvement en courant électrique (dans le cas d’une éolienne par exemple).

 1. Le nom actuel date de 2007, mais l’histoire de la Direction des constructions navales remonte au XVIIe siècle, à l’époque où le pouvoir royal décide de créer plusieurs arsenaux afin de faire de la France une puissance maritime. En 1961, les arsenaux ne seront plus rattachés à la Marine mais à la Défense.

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Un alternateur complet en maintenance.

 

 

ENCADRE 1

Pas que la Marine !

 

La Marine représente 22% environ du chiffre d’affaires. Les autres secteurs dans lesquels Jeumont Electric est présente sont : le nucléaire (20%), avec les groupes motopompes primaires des centrales ; les services (30%), domaine qui englobe les réparations, la reconstruction, l’optimisation, par exemple pour des moteurs équipant des barrages, bateaux, industries et qui peuvent même être ceux d’autres constructeurs. C’est d’ailleurs un des points forts de l’entreprise, souligne Mme Renard. Le reste de l’activité va à l’hydraulique neuf, à l’industrie de transformation, à la distribution de l’énergie (centrales, stations de compression…) dans le gaz et le pétrole. Mme Renard résume : «Jeumont Electric peut être présente partout où il y a des machines tournantes électriques. Pour l’instant, on ne fait plus de petits moteurs.» Deux domaines intéressent l’entreprise qui cherche à s’y positionner : l’éolien offshore et l’hydraulique des marées et courants.

 

ENCADRE 2

Une histoire commencée en 1898

 Nathalie Renard aime à dire que l’entreprise doit son existence, voire sa survie, à l’innovation, ou, si l’on préfère, à des inventions techniques dans le domaine de la production ou de la conversion d’électricité. «La R&D représente entre 3 et 5%», dit-elle, en précisant qu’il y a également un bureau d’études, l’ensemble représentant une trentaine de personnes. Autre atout de l’entreprise, sa taille de PME qui lui permet souplesse et rapidité avec une capacité à faire du sur-mesure. En 1898, l’entreprise de Jeumont a été créée par un ingénieur belge, Julien Dulait, parti à la conquête du marché français et plus précisément du métro parisien dont il avait remporté le chantier. Pour lui, l’usine du début a fabriqué des moteurs de traction.
D’autres chantiers célèbres jalonnent l’histoire industrielle : le premier moteur du TGV Atlantique ou encore cette usine marémotrice qui barre l’estuaire de la Rance, entre Dinard et Saint-Malo. Cette dernière est entrée en service en 1966, et fut longtemps la seule au monde étant donné l’amplitude rare des marées à cet endroit. Le site jeumontois a également travaillé sur un projet de métro aérien à Châteauneuf-sur-Loire, projet resté à l’état de prototype faute de budget. Mme Renard ajoute que son entreprise s’intéresse au domaine de la supraconduction.
Au fil des ans, le nom du site industriel a évolué au rythme des propriétaires successifs. Le nom Jeumont Schneider est resté dans les mémoires mais il y a eu aussi FACEJ, Groupe Empain, Framatome, Areva… Depuis 2007, année de la reprise de l’activité électromécanique par le groupe français Altawest, il faut dire “Jeumont Electric”. Le groupe représente 650 personnes, dont 420 à Jeumont. L’entreprise et ses filiales sont présentes dans une vingtaine de pays (Europe, Asie, Moyen-Orient, Amérique latine).

Plus de précisions sur le site www.jeumontelectric.com