L’après‑reprise : passer du rôle de repreneur à celui de dir
Après quelques mois consacrés à la définition d’un projet de reprise, à la découverte du marché de la transmission, à l’analyse de dossiers de cession, à des visites d’entreprises, à des négociations avec des cédants et à la recherche de financements, le repreneur a su faire face à l’ensemble des obstacles qui jonchent tout projet de reprise et un accord final vient d’être conclu. Pourtant, un nouveau défi s’offre à lui : passer du statut de repreneur à celui de dirigeant de “son” entreprise.
Le projet de cession de l’entreprise et les dernières semaines de négociation sont sans doute venus fragiliser l’entreprise. Le repreneur prend donc la direction d’une entreprise après une certaine période de flottement. Il doit faire face à un certain nombre de problèmes qui vont inévitablement apparaître et qu’il doit régler sous peine de se retrouver face à des conflits sociaux et/ou des difficultés économiques.
Le nouveau dirigeant doit donc mettre en place, dans un premier temps, ce que l’on peut appeler les “actions prioritaires” et prendre les premières mesures qui s’imposent. Il pourra ensuite s’attaquer à l’application de son véritable plan de développement pour l’entreprise.
La première des actions prioritaires est pour le repreneur de trouver sa place au sein de l’entreprise et d’y tenir son rôle de dirigeant. A cet effet, la prise de contact avec les salariés est certainement la première mission du nouveau dirigeant. Ces derniers ont sans doute un sentiment d’incertitude, voire d’inquiétude suite à la reprise. La peur du changement, la crainte de nouvelles conditions de travail, d’une réorganisation, de licenciements, voire d’une restructuration sont à l’origine de ce sentiment.
Une bonne connaissance des habitudes, des comportements et des motivations de chaque salarié doit dès la reprise être approfondie par le repreneur afin de répondre au mieux aux “attentes” de chacun. L’important est donc d’instaurer au plus vite une relation de confiance avec les salariés qui passe par une écoute et une certaine humilité de la part du nouveau dirigeant (d’autant plus importante s’il ne vient pas du secteur d’activité en question). Il doit ainsi réussir à s’imposer en douceur en expliquant sa démarche et les changements qui s’imposent.
De plus, dans la phase d’accompagnement du cédant après la reprise, les salariés sont impatients de savoir quels vont être les rôles respectifs du repreneur et du cédant. Le repreneur doit en effet réussir à remplacer aux yeux des salariés le personnage charismatique qu’était l’ancien dirigeant. Il doit ainsi apparaître comme le véritable patron et l’ancien dirigeant comme la personne qui l’accompagne pendant la période de passation. Désormais, c’est le repreneur qui dirige et c’est lui l’interlocuteur privilégié en cas de problèmes.
Une fois cette marche gravie vers les salariés, le repreneur doit réussir à en faire de même avec le cédant, c’està- dire devenir à ses yeux le véritable patron. Cette période d’accompagnement est primordiale pour la réussite de la reprise mais elle doit être limitée dans le temps (laps de temps qui dépendra du feeling entre le repreneur et le cédant et des besoins du repreneur) et dans la forme (qui fait quoi ?). Faire accepter à l’ancien dirigeant qu’il n’est plus le patron n’est pas toujours la chose la plus facile suite à une reprise d’entreprise.
En résumé, il est donc nécessaire d’opérer un passage de relais en douceur, aussi bien vis-à-vis des salariés que de l’ancien dirigeant.
En plus de ces aspects relationnels et humains, le repreneur doit aussi approfondir ses connaissances du fonctionnement concret et du quotidien de l’entreprise. Autrement dit, en plus de ce qu’il a découvert lors de la phase de négociation, il doit désormais acquérir et comprendre les éléments techniques et économiques de l’entreprise, ainsi que son savoir-faire spécifique. Qui détenait ces éléments avant la reprise ? Le cédant et/ou un autre homme clef dans l’entreprise ? Le repreneur a-t-il ces connaissances techniques ? Pourra-t’il s’appuyer sur cet homme clef ? Devra-t-il étoffer la structure de son entreprise ? Les réponses à ces questions dépendent du profil du repreneur et de la structure de l’entreprise reprise mais dans tous les cas, il doit apprendre et comprendre le métier de chacun de ses salariés.
En parallèle à ses éléments internes, le repreneur doit s’attacher également à rencontrer et rassurer trois partenaires externes à l’entreprise : les clients, les fournisseurs et le(s) banquier(s). Comme en interne, la phase de cession et de reprise d’une entreprise a pu venir fragiliser les relations avec ces interlocuteurs du fait de ce phénomène d’incertitude, d’inquiétude, voire de méfiance vis-à-vis du nouveau dirigeant.
Le repreneur doit donc tout d’abord sécuriser les relations qui existent avec les clients actuels de l’entreprise. Une visite personnalisée des principaux clients avec l’ancien dirigeant est sans doute le meilleur moyen d’y parvenir. Pourquoi certains clients s’adressent à l’entreprise et pourquoi d’autres ne le font pas ? Le changement de dirigeant sera l’occasion pour les clients de se poser un certain nombre de questions qui peuvent remettre en cause une relation qui existait parfois depuis plusieurs années avec l’ancien dirigeant : pourquoi suis-je son client ? Est-ce que j’achète au bon prix ? Ne puis-je pas obtenir de meilleurs délais de règlement ?
La phase de reprise est donc non seulement le moment d’une renégociation des conditions commerciales avec les clients existants (dans un sens comme dans un autre), mais elle doit aussi être celui d’une prospection vers une clientèle nouvelle.
Les mêmes questions se posent avec les fournisseurs de l’entreprise. Cette inquiétude est susceptible de les gagner, notamment pour ceux qui présentent une certaine dépendance vis-à-vis de l’entreprise reprise. Dans certains cas, c’est l’occasion pour le repreneur, s’il est en position de force, de renégocier les conditions relatives aux prix, aux quantités et aux délais négociés entre l’ancien dirigeant et ces fournisseurs.
Le dernier interlocuteur extérieur à la société est le banquier. Est-ce la banque historique du cédant qui a financé la reprise ou une nouvelle banque ? Le repreneur doit maintenir un contact étroit avec son banquier après la finalisation de la reprise afin que ce dernier comprenne non seulement l’entreprise mais surtout son nouveau mode de fonctionnement et celui de son nouveau dirigeant. Ces éléments seront indispensables afin que le banquier puisse épauler au mieux le nouveau dirigeant en cas de nouveaux besoins.
A la fin de cette période d’observation, de découverte, d’écoute et de compréhension des attentes de chacun des partenaires internes et externes à l’entreprise, le repreneur doit être capable de prendre les premières mesures qui s’imposent. Dans la plupart des cas, elles concernent trois grands domaines :
• les mesures financières et de gestion : une meilleure connaissance du prix de revient des différents produits ou activités de l’entreprise, une analyse du besoin en fonds de roulement, une meilleure gestion des stocks et une analyse des comptes clients et fournisseurs donnent au repreneur de nombreuses indications sur la politique à suivre en la matière.
• les mesures commerciales : le repreneur doit relancer l’activité commerciale de l’entreprise suite à cette période d’attentisme renforcée parfois par un manque de dynamisme commercial de la part de l’ancien dirigeant sur les derniers mois avant la cession. Dans le cas où l’entreprise possède une véritable structure commerciale, la reprise peut être l’occasion de former les commerciaux à de nouvelles techniques de vente ou de réaménager leurs modes de rémunérations.
• les mesures psychologiques : le repreneur doit motiver, voire remotiver les salariés de l’entreprise, faire en sorte que tous aillent dans la même direction et créer un état d’esprit favorable au développement de l’entreprise. Ces premières mesures sont donc principalement des mesures qui iront en faveur du salarié (programme de formation, système de primes, participation des salariés aux résultats de l’entreprise, …). D’autres mesures nécessaires pourront être moins bien accueillies et devront alors être prises par étapes successives en expliquant toujours la nécessité de leur mise en place.
L’installation du nouveau dirigeant à la tête de l’entreprise et la mise en place de l’ensemble de ces mesures prend dans la plupart des cas près d’un an (sauf si l’état de l’entreprise nécessitait de véritables mesures radicales de redressement dès la reprise). Le repreneur pourra alors engager son véritable plan de développement pour l’entreprise qui s’appuiera sur la structure rachetée, renforcée par les mesures mises en place lors des ces premiers mois.
1- Le Bureau de rapprochement des entreprises (BRE), service de la Chambre de commerce et d’industrie de région Nord de France, est spécialisé dans l’accompagnement et la mise en relation entre cédants et repreneurs de PME-PMI. Pour plus d’informations et obtenir un rendezvous avec un conseiller en cession/ acquisition de PME-PMI, veuillez contacter Claudette ADAMSKI au 03 20 63 79 71 – c.adamski@norddefrance.cci.fr – 2, Palais de la Bourse – 59000 LILLE.