L'avion de combat Rafale confirme son succès en export dans une Europe récalcitrante
Jadis jugé invendable et boudé par les pays européens membres de l'Otan, l'avion de combats français Rafale a poussé ses pions en Europe, avec encore jeudi l'annonce de la cession de 12 appareils neufs à...
Jadis jugé invendable et boudé par les pays européens membres de l'Otan, l'avion de combats français Rafale a poussé ses pions en Europe, avec encore jeudi l'annonce de la cession de 12 appareils neufs à la Serbie, le septième pays étranger à l'acheter.
C'est le troisième pays européen, traditionnel client de la Russie, à avoir opté pour l'avion biréacteur polyvalent, après la Grèce qui en possède 24 dont 12 d'occasion, et la Croatie qui en a racheté 12 d'occasion.
"Un client européen de plus, c'est une victoire notable. Cela confirme une fois de plus le basculement d'un certain nombre de pays, traditionnellement clients de la Russie, vers la France, après l'Indonésie, l'Egypte, l'Inde", commente Xavier Tytelman, consultant aéro-défense et rédacteur en chef digital de la revue Air & Cosmos, interrogé par l'AFP.
Le dernier succès en date était l'accord de principe de l'Inde en juillet 2023 à l'acquisition de 26 versions "Marine" de ce fleuron de l'aéronautique française de défense.
En Europe, la percée est d'autant plus appréciable que les Etats-Unis encouragent fortement les pays membres de l'Otan à acheter leurs équipements.
Plus aligné sur Moscou
"La Pologne ne se pose pas de questions, les Pays-Bas, la Belgique, l'Italie, l'Allemagne, ils ont acheté le F-35 (américain), parce que sinon ils perdaient la compétence nucléaire qui leur est fournie par les Américains. Ils n'ont pas eu le choix dans leurs achats. Les Anglais, ils ont acheté le F-35 uniquement parce qu'ils avaient besoin d'un avion qui décollait d'un porte-avions, sans catapulte", énumère Xavier Tytelman.
Il ne juge pas inquiétant que des avions performants se retrouvent entre les mains de ce pays des Balkans, certes candidat à l'adhésion à l'Union européenne, mais qui n'a pas demandé à adhérer à l'Otan et refuse d'appliquer les sanctions européennes contre la Russie.
"Ils n'ont pas de position officielle contre les Russes, mais ils vendent des armes à l'Ukraine. Et cela fait longtemps qu'ils ont arrêté d'acheter du matériel russe. Ils ne sont plus alignés sur Moscou", souligne-t-il.
Et techniquement, "l'avion est conçu d'une telle manière qu'on ne peut pas le démonter, voir comment c'est fait, et puis vendre les informations aux Russes ou aux Chinois", assure l'expert.
L'export explose dès 2015
Au total, le Rafale, conçu pour maintenir l'autonomie stratégique aéronautique française, a davantage été vendu à ce stade à des pays partenaires qu'à l'armée française: sur les 495 avions neufs commandés à ce stade, 261 l'ont été par les sept clients étrangers, et 234 par la France.
Né de la volonté de trouver un remplaçant aux Mirage 2000 français et aux Tornado britanniques, italiens et allemands, le démonstrateur Rafale A a accompli son premier vol le 4 juillet 1986 à Istres (Bouches-du-Rhône, dans le sud de la France).
Il est utilisé par la marine française depuis 2004 et l'armée de l'Air depuis 2006 et a remplacé sept types d'avions de combat de générations précédentes.
Son recours au combat à partir de 2007 en Afghanistan, puis en Libye en 2011, au Sahel et au Levant, parfois au terme de longs raids conduits depuis la France, démontre son efficacité.
Mais parallèlement, l'avion de combat de Dassault Aviation subit des revers à l'export, avec des échecs successifs en Corée du Sud, aux Pays-Bas, à Singapour, au Maroc, aux Emirats et au Brésil.
Si le Rafale a perdu des appels d'offres en Suisse et en Finlande où le F-35 américain lui a été préféré, son constructeur Dassault Aviation compte bien voir plusieurs prospects se concrétiser prochainement.
Fruit de l'activisme diplomatique français autant que d'une volonté de certains pays de ne pas dépendre seulement des Etats-Unis pour leur matériel de défense, il faut attendre 2015 pour que Rafale connaisse ses premiers succès hors de France avec l'Egypte, le Qatar, puis l'Inde.
L'Egypte possède 55 Rafale aujourd'hui, la Qatar 36, le même nombre que l'Inde (sans compter les 26 avions évoqués en 2023), les Emirats 80 et l'Indonésie 42. Et en Inde, l'avionneur français reste dans la course pour un appel d'offre concernant 114 appareils destinés à l'armée de l'air.
Monoplace ou biplace, il est destiné à l'armée de l'air et à la marine et peut intervenir depuis le porte-avions français Charles-de-Gaulle. Il est aussi le seul appareil militaire non-américain autorisé à opérer sur les porte-avions des États-Unis.
Sur le plan de l'armement, le Rafale dispose d'un système polyvalent: canon de 30 mm pour le combat aérien et l'appui au sol, missiles air-air, bombes guidées laser et missiles de croisière. Il est également le vecteur de la dissuasion nucléaire aéroportée française.
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