L’automobile face à un risque de court-circuitage
En septembre dernier, la Région Grand Est a signé avec l’État et les partenaires sociaux une convention de partenariat sur l’accompagnement de la filière automobile régionale pour les années 2024-2027. Cette feuille de route vise à anticiper les mutations du secteur liées à l’électrification et aux nouvelles technologies. Pas si simple quand les facteurs macro-économiques s’en mêlent.
Véhicules électriques, hybrides non rechargeables, véhicules à hydrogène en passant par des véhicules électriques intermédiaires pour les zones rurales et périurbaines ou encore l’allègement des composants des nouveaux modèles, le cap est donné dans la filière automobile depuis quelques années lors de l’annonce de la fin de la production des moteurs thermiques à l’horizon 2035. Le virage électrique sous toutes ses formes est pris, reste aujourd’hui à réellement le négocier même si bon nombre d’observateurs s’interrogent sur le fait de savoir si ce virage vers le tout électrique est réellement le bon ?
L’anticipation se veut, sur le papier, présente mais dans les faits les constructeurs apparaissent avoir bien du mal à adapter leur stratégie en la matière. Sur les territoires, on s’organise histoire de faire face à ce tsunami technologique. En septembre dernier, la Région Grand Est et les différents partenaires sociaux de la filière ont signé une convention pour accompagner la transformation de la filière automobile de 2024 à 2027.
«La décarbonation des transports et en particulier de la filière automobile est un enjeu majeur dans la lutte contre le réchauffement climatique mais aussi un enjeu crucial pour nos territoires et l’évolution des activités des entreprises et des compétences des salariés. Dans ce contexte, nous souhaitons devenir terre d’Excellence en matière de mobilité décarbonée. La feuille de route régionale quadripartite priorisera l’accompagnement des TPE et PME sous-traitantes de l’industrie automobile sur les mutations économiques pour gagner en compétitivité, en souveraineté et stimuler l’innovation pour créer de la valeur en Grand Est», assure l’exécutif régional.
Les fortes turbulences enregistrées chez les sous-traitants de l’automobile, et notamment dans nos territoires (voir encadré), tentent à confirmer que l’urgence est plus que de mise pour permettre à ce pan de l’activité régionale de s’adapter aux marchés de demain.
Vers de nouvelles chaînes de valeur
«La filière automobile fait actuellement face à des risques mais également des opportunités majeures en raison de l’arrêt prévisionnel du moteur thermique, du passage à l’électrification, l’intégration des technologies numériques embarquées ou encore l’évolution des modes de consommation. Ces risques et opportunités sont accentués dans la région par son caractère transfrontalier», note la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DREETS) Grand Est.
En mai dernier, Blue Solutions (groupe Bolloré) a annoncé sa volonté d’installer une gigafactory chez nos voisins alsaciens pour produire, à l’horizon 2030, des batteries pour véhicules électriques de nouvelle génération. Blue Solutions vise la création de près de 1 500 emplois d’ici 2032, avec un investissement global de plus de 2,2 milliards d’euros. La prise de décision, de l’installation (ou non) sur le territoire régional de l’industriel devrait être prise début 2025 mais reste encore à savoir réellement où ? Plusieurs sites apparaissent dans la course comme une ancienne friche de 92 hectares à Witellsheim ou nord-ouest de Mulhouse. La gigafactory de Blue Solutions pourra représenter une capacité annuelle de production de 25 GWh, soit l’équivalent de 250 000 véhicules par an, au bénéfice des consommateurs français et européens.
«C’est l’exemple typique des nouvelles chaînes de valeur à mettre en œuvre au niveau de la filière automobile. Ces projets permettent d’anticiper les restructurations et d’accompagner la reconversion des collaborateurs actuels de l’automobile impactés par la fin du moteur thermique aussi bien en amont qu’en aval de la filière», assure un observateur du secteur.
Reste qu’aujourd’hui, les sous-traitants actuels sont plus que malmenés dans un marché du véhicule électrique fortement concurrencé notamment par le géant chinois. «Une voiture de performances équivalentes, selon qu’elle est fabriquée en Chine ou en Europe a un coût de fabrication qui peut varier de 30 à 40 %», assure un spécialiste du secteur. Et là difficile de lutter même avec la plus grande des anticipations....