L’agriculture biologique a toujours des difficultés à s’imposer dans les Hauts-de France

Après deux années de crise, 2023 a été une année de stagnation pour l’agriculture biologique en France. Rien d’alarmant au niveau national donc, mais c’est au niveau régional que le bât blesse, notamment dans les Hauts-de-France. La région voit tous ses chiffres baisser par rapport à 2022.

L'agriculture biologique a stagnée en 2023. © Alicja Neumiler
L'agriculture biologique a stagnée en 2023. © Alicja Neumiler

La filière biologique a connu, au niveau national, une année 2023 de stagnation, entre crise du secteur, baisse des surfaces cultivées et légère hausse de la vente directe. Mais lorsque l’on se penche dans le détail sur la région Hauts-de-France, les résultats de l’année 2023 sont peu reluisants.

Le nombre d’exploitations bio a baissé de 3%, les distributeurs labellisés de 5% et le nombre de conversions de surfaces en bio de 55%, passant de 9 200 hectares en cours de conversion en 2022 à 4 100 hectares en 2023.

Un modèle agricole qui ne favorise pas le bio

Mais pourquoi le bio stagne-t-il au niveau national et baisse dans la région ? Car depuis deux ans, «nous subissons la crise, avec une baisse du pouvoir d’achat et le label bio en a particulièrement souffert, car il a l’image, souvent à tort, d’être des produits chers», comme l’indique Jean-Baptiste Pertriaux, codirecteur de Bio en Hauts-de-France. De plus, après une croissance «soutenue pendant 20 ans», accompagnée d’une «grosse communication, on s’est un peu reposé sur nos lauriers et la première crise que l’on subit nous fait mal», ajoute-t-il.

Ces chiffres en baisse dans les Hauts-de-France s’expliquent aussi par le fait que la région ait «un modèle agricole et agroalimentaire qui a été intensifié, donc passer en bio est assez complexe». Pourtant, la région peut être une terre bio. En effet, l’Avesnois est la tête de proue de l’agriculture biologique dans les Hauts-de-France, «qui à 10 % de sa surface en bio, puisque l’agriculture a été moins intensifiée dans ce territoire». L’Avesnois contient, à lui seul, la moitié des fermes laitières en agriculture biologique de la région, comme le souligne le journal L’Observateur.

Les possibilités sont là, mais la demande ne suit pas forcément, puisque selon une enquête de consommation d’A PRO BIO, les consommateurs de produits bio dans les Hauts-de-France, déjà moins nombreux que la moyenne nationale, a de nouveau diminué entre 2020 et 2023. Les consommateurs quotidiens sont passés de 29% à 11,3%. De l’autre côté du spectre, les personnes ne consommant pas de produits issus de l’agriculture biologique a plus que doublé, passant de 6% à 15,7% en trois ans.

Des aides qui restent insuffisantes 

Pour redonner le goût du bio aux consommateurs des Hauts-de-France, Jean-Baptiste Pertriaux préconise aux acteurs de la filière de relancer la communication autour de l’agriculture biologique et de faire de la pédagogie sur la valeur des différents labels qui entourent à la fois le bio, le local et d’autres types de produits plus verts, et qui se font de l’ombre entre eux. Pour le codirecteur de Bio en Hauts-de-France, le label bio, assez exigeant, pâtit de la sur-présence de certains labels, moins regardant, et qui perdent les consommateurs.
Certains délaissent le bio pour se tourner vers les produits locaux, qu’ils soient bio ou non. Mais ce n’est pas forcément un problème pour Jean-Baptiste Pertriaux, même si ce dernier préfère que les produits soient locaux et bio. «Manger bio et local c’est vraiment l’idéal et il faut favoriser cette adéquation».

Mais la diminution drastique des consommateurs de produits bio dans la région et malgré la mise en place de la loi Egalim qui oblige les cantines scolaires à avoir au moins 20 % de produits bio et locaux dans les assiettes, les producteurs ont subi de nombreux problèmes financiers.

Pour pallier ces ennuis, l’État a mis en place une aide du fond d'urgence aux exploitations bio en difficulté. Ainsi, la région Hauts-de-France a reçu 282 000 euros de ce fond. Une aide saluée par Jean-Baptiste Pertriaux : «Ça a donné de la respiration aux producteurs, qui faisaient face à beaucoup de difficultés de trésorerie. Le compte n’y est pas encore, mais il faut souligner l’aide qui a été faite. Mais, sur le long terme, ce n’est pas suffisant pour se projeter».

Du Bio pour tous

L’un des objectifs de Bio en Hauts-de-France est de donner la possibilité au plus grand nombre de manger des produits issus de l’agriculture biologique. Afin de «démocratiser le bio», Bio en Hauts-de-France a mis en place depuis 2018, avec le Réseau des AMAP Hauts-de-France et Les Jardins de Cocagne Hauts-de-France, le dispositif P.A.N.I.E.R.S. Ces initiales signifient «Pour l’Accès à une Nourriture Inclusive, Écologique, Régionale et Solidaire». Ce dispositif se base sur les producteurs et les centres sociaux, pour permettre aux bénéficiaires de profiter de produits bio à moindre coût deux fois par mois.