Jusqu'à 11 ans de prison requis au procès des attentats de Trèbes et Carcassonne

Des peines allant jusqu'à 11 ans de prison ont été requises mardi à l'encontre des sept accusés jugés depuis cinq semaines devant la cour d'assises spéciale de Paris au procès des attentats de Trèbes et...

L'entrée de la salle d'audience à l'ouverture du procès des attentats de Trèbes et Carcassonne, le 22 janvier 2024 à Paris © Bertrand GUAY
L'entrée de la salle d'audience à l'ouverture du procès des attentats de Trèbes et Carcassonne, le 22 janvier 2024 à Paris © Bertrand GUAY

Des peines allant jusqu'à 11 ans de prison ont été requises mardi à l'encontre des sept accusés jugés depuis cinq semaines devant la cour d'assises spéciale de Paris au procès des attentats de Trèbes et Carcassonne, qui ont fait quatre morts en 2018.

Le 23 mars 2018, Radouane Lakdim, petit délinquant radicalisé de 25 ans, avait "lâchement et par surprise", selon l'avocate générale Alexa Dubourg, abattu un homme sur un lieu de rencontre homosexuel à Carcassonne, puis tiré sur des policiers faisant leur footing, avant de poursuivre son périple meurtrier au magasin Super U de la ville voisine de Trèbes.

Là, celui qui se revendiquera de l'organisation Etat islamique avait "en guise de combat", "lâchement et par surprise", répète la magistrate, tué à bout touchant un salarié et un client. Il avait ensuite pris en otage une caissière avant de croiser "l'héroïsme, l'honneur, la bravoure" du gendarme Arnaud Beltrame, mortellement blessé après s'être substitué à l'otage.

Radouane Lakdim sera tué dans l'assaut des forces de l'ordre.

Le parquet national antiterroriste (Pnat) le reconnaît dès le début des réquisitions: "Bien sûr qu'il y a un décalage" entre l'"horreur absolue" décrite au début du procès et "la suite".

Car après les éprouvants enregistrements audio de la prise d'otage, les témoignages à la barre de ceux "qui pleurent leurs morts" et des victimes "traumatisées" qui vivront pour toujours "à côté de leur vie", on a ensuite davantage parlé à ce procès de "trafics de cité" que de "zone irako-syrienne", admet Alexa Dubourg.

Aucun des accusés n'est jugé pour "complicité", l'enquête ayant montré que Lakdim avait agi seul. Même si "tout le monde savait" qu'il était farouchement radicalisé et "haïssait" les forces de l'ordre, les homosexuels, les "mécréants", insiste le Pnat. 

Cinq des accusés, âgés de 24 à 35 ans, sont ainsi jugés pour "association de malfaiteurs terroriste", deux autres pour des délits connexes.

Poids de l'absence

La peine la plus lourde, 11 ans de réclusion criminelle, a été requise à l'encontre de Marine Pequignot, la petite amie de l'assaillant, âgée de 18 ans à l'époque des faits. Après deux ans de détention, elle comparaissait libre et n'est plus radicalisée, selon les professionnels. 

Mais celle qui, au moment de son arrestation, avait crié "Allah akbar" - un "réflexe", avait-elle justifié -, avait "vu" les armes de Lakdim, ses vidéos jihadistes sur les réseaux sociaux, connaissait les "cibles" qu'il envisageait de viser... Elle n'a pourtant jamais alerté du danger qu'il pouvait représenter. 

"Pas par naïveté, insouciance ou par amour... mais par dissimulation, parce qu'elle adhérait à la même idéologie", martèle la seconde avocate générale Aurélie Valente, convaincue que la jeune fille préparait de son côté un départ en Syrie. Et d'évoquer à son sujet un profil "dangereux et jusqu'au-boutiste". 

Dix ans de réclusion criminelle ont par ailleurs été requis contre Samir Manaa, 28 ans, "l'ami de tous les jours" de Lakdim, qui avait "pleine conscience" de son "engagement jihadiste", même "s'il ne le partageait pas", dit Mme Valente. 

Quinze jours avant l'attentat, il avait fait "un mauvais choix" aux "conséquences tragiques" en accompagnant son ami acheter le poignard de chasse qui blessera mortellement Arnaud Beltrame.    

Des peines d'un an de prison, dont quatre mois avec sursis, à huit ans de prison ont été demandées à l'encontre des autres accusés. 

Contrairement aux juges d'instruction, le Pnat a toujours estimé que la qualification terroriste ne tenait pas pour plusieurs d'entre eux, notamment pour le chef du trafic de drogue de la cité où dealait Radouane Lakdim et son beau-frère, et demandé qu'elle soit abandonnée.  

Les peines réclamées sont donc bien éloignées de la réclusion criminelle à perpétuité que le Pnat aurait requise contre Lakdim s'il était encore en vie ou même de la peine maximale encourue pour association de malfaiteurs terroriste, soit 30 ans.

Mais même si "c'est difficile pour les victimes", les accusés ne peuvent pas porter "le poids de l'absence" de Radouane Lakdim, dit Alexa Dubourg. Il faut "condamner les gens pour ce qu'ils ont fait et uniquement ce qu'ils ont fait". Et à cette audience, il n'y a "personne dans le box" pour payer "le prix fort, le juste prix en réparation de ce qui a été commis".

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