Jeux Olympiques Paris 2024 : une bonne affaire pour les PME ?
Le Slip Français, Rysosphère... Des PME surfent sur les Jeux Olympiques Paris 2024. Mais les bénéfices sont parfois à rechercher sur le long terme a montré une récente table-ronde organisée par l'AJPME, Association des journalistes spécialisés dans les PME.
«Jeux Olympiques Paris 2024 : quel bilan pour les PME ?»
Le 25 juin dernier à Paris, l'AJPME, Association
des journalistes spécialisés dans les PME, organisait une
table-ronde pour répondre à cette question. L'enjeu avait été
identifié par les organisateurs de l'événement. «Les
acheteurs des JO ont mis en place une véritable politique pour
flécher les retombées économiques vers les PME et les TPE»,
explique Jonathan Soisson,
responsable
des projets Grand Paris et Jeux Olympiques et Paralympiques 2024 à
la CCI Paris Ile-de-France.
Solideo, la société de livraison des ouvrages olympiques
(infrastructures sportives, hébergements...) s'était fixée un
objectif de 25% des montants de la commande publique attribués aux
petites entreprises. Elle a atteint le seuil de 36% (800
millions d'euros environ).
Pour
la partie événementielle, gérée par le Comité d'organisation des
Jeux Olympiques et Paralympiques (Cojo),
il est encore bien trop tôt pour dresser un bilan. Mais sur les
dépenses déjà engagées, la part qui a bénéficié aux petites
entreprises est importante, d'après la CCI Paris IDF. Cette dernière
fait partie des acteurs qui se sont mobilisés pour que les PME
bénéficient de l'opportunité des JO : mise en relation avec
les éventuels donneurs d'ordre, information et accompagnement pour
accéder à la commande publique... Une «fabrique
économique et solidaire des jeux»
a fédéré un réseau de collectivités locales, chambres de
commerce et réseaux d'insertion pour aider les entreprises de l'ESS,
Économie sociale
et solidaire, et
PME.
De
son côté,
le groupe bancaire BPCE, partenaire premium des Jeux Olympiques,
a mis sur pied un dispositif destiné à ses clients professionnels.
«Certains
n'avaient jamais répondu à des appels d'offre publics, nous les
avons accompagnés»,
explique Julien Campagne, directeur «Économie du sport»
chez BPCE. L'établissement a organisé une cinquantaine de
rencontres à travers la France, réalisé des opérations ciblées
de mailing, mis à disposition une plateforme.
Savoir-faire de niche et marque valorisante
Parmi les petites entreprises qui ont participé à l'aventure des Jeux Olympiques figurent Le Slip Français (fabriquant de slips et autres vêtements MIF, Made in France, 20 millions d’euros de chiffre d'affaires et 80 salariés) et Rysosphère, spécialiste de la végétalisation de toits. Cette société de trois personnes est intervenue sur plusieurs chantiers, dont le toit de l'immense salle de l'Arena. Raphaël Dupont, co-fondateur de Rysosphère et expert de la végétalisation depuis 20 ans, avait commencé à travailler sur ce chantier prestigieux, dans le cadre d'une autre entreprise. «Lorsque j'ai créé ma société en 2022 avec un collègue, je me suis dit, les JO, ce n'est plus pour moi ! Mais ils sont revenus nous chercher. Nous avons un savoir-faire de niche», explique-t-il.
Rysosphère a donc travaillé en sous-traitance, à la
demande d'un étancheur couvreur, dans le cadre d'une commande
beaucoup plus large. «Ce qui nous a fait un peu
peur, c'est que nous n'étions pas sûrs d'avoir la capacité
financière et humaine. Répondre à ce projet prend beaucoup de
temps», se souvient
Raphaël Dupont.
Pour
le Slip français, l'aventure est un peu différente : la marque
a acheté une licence, qui lui donne le droit sigler ses produits JO
Paris 2024, moyennant un pourcentage sur les ventes. En 2022, «les
organisateurs sont venus nous chercher . Ils nous ont dit qu'ils
souhaitaient avoir une marque engagée», témoigne Léa Marie,
directrice générale de
l'entreprise qui incarne la cause du MIF. «Nous
avons commencé par nous dire que nous n'avions pas les moyens de
réaliser cette opération, puis, nous nous sommes dit : qui
d'autre que nous peut le faire ?»,
se souvient-elle. Depuis décembre 2022, l'entreprise a vendu
20 000 pièces.
Elles sont vendues à des
prix plus élevés que le reste de la gamme. «Nous
considérons que cela a généré du travail dans les usines et a
maintenu de l'emploi. Les clients sont réceptifs»,
note Léa Marie.
Fierté et promesses d'avenir
Pour
ces deux entreprises, la participation aux JO est motif de fierté.
Mais sur le plan économique, l' équation est complexe et
diffère selon les cas. Le Slip français est parti dans l'aventure
en se disant «on va essayer de ne pas perdre d'argent»,
explique Léa Marie. Mais au delà du potentiel des ventes, qui devra
être confirmé, «cela nous a ouvert les portes de nouveaux
magasins, comme Monoprix et Les Galeries Lafayette»,
ajoute-t-elle. Par ailleurs, l'entreprise approfondit son expertise
en matière de licence : elle s'apprête à renouveler celle du
Tour de France et détient celle du Quinze de France (rugby),
rentable.
Chez Rysosphère, où la participation aux chantiers a été particulièrement chronophage. «nous sommes à l'équilibre sur cette partie. Nous n'avons pas perdu d'argent. Quand on aime, on ne compte pas son temps...», résume Raphaël Dupont. En revanche, la société a grandi. En 2024, elle a recruté deux personnes en plus. Le chiffre d'affaires est passé de 830 000 euros (sur dix mois) en 2022, à 1,6 million d’euros, en 2023. «Cela a contribué à notre développement», estime le chef d'entreprise. Sur le chantier Arena, il a dû répondre à des demandes qui allaient au delà des obligations légales en matière de durabilité, comme le sourcing de plantes en Île-de-France et des fiches sur le cycle de vie des produits utilisés. «Cela nous a demandé un travail important, mais nous saurons le refaire (… ) Cela donne une crédibilité à l'entreprise», se réjouit Raphaël Dupont.