Jean Castex rassure les pêcheurs du Boulonnais
Lors de sa visite à Boulogne-sur-Mer, puis à Calais, le 3 décembre dernier, le Premier ministre a voulu rassurer les acteurs locaux, notamment le secteur de la pêche.
Résignés, mais proactifs ? C’est la question que l’on peut se poser après la visite du Premier ministre Jean Castex, le 3 décembre dernier, sur la Côte d’Opale. Celle-ci avait pour but de s’assurer de l’état de préparation de la future frontière qui va naître avec la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. A Boulogne-sur-Mer, puis à Calais, le Premier ministre a voulu rassurer les acteurs locaux, notamment le secteur de la pêche. Retour sur une visite et un problème de visibilité qui reste entier.
Les négociations entre l’Union européenne et le Royaume-Uni sont dans la dernière ligne droite, et les pronostics penchent logiquement vers un “no deal”. De plus, comment conclure un accord aussi vaste en quelques semaines alors que plusieurs dossiers majeurs restent en suspens, comme la concurrence et la pêche ? Après une visite sur un chalutier à quai, Jean Castex s’est voulu réconfortant devant une vingtaine de représentants du secteur : «Nous nous préparons à toutes les hypothèses et je suis là pour marquer la solidarité nationale. Nous espérons un accord dans les meilleures conditions possibles et la pêche ne sera pas une variable d’ajustement.» La veille de ce déplacement, son cabinet expliquait «qu’on n’aurait pas de seconde chance. Selon l’accord – s’il y en a un –, les contrôles seront plus ou moins poussés. Au pire, le Royaume-Uni sera un simple pays tiers avec les règles de l’OMC comme cadre douanier». A Boulogne-sur-Mer, l’ensemble de la filière s’est montré très attentive aux propos de Jean Castex et des ministres qui l’accompagnaient, dont Brigitte Bourguignon, ex-députée de la sixième circonscription du Pas-de-Calais, accueillis par le maire de la ville et ancien ministre des Transports sous la présidence de François Hollande, Frédéric Cuvillier.
Le Sivep : une ouverture 24 heures sur 24
A Boulogne-sur-Mer, la filière est directement tributaire des eaux poissonneuses britanniques. «On a 55% des quantités pêchées dans cette zone. Le taux monte jusque 90% pour la pêche hauturière», indique Thierry Missonnier, dirigeant de From Nord, organisation qui rassemble 162 navires. Le Brexit pose clairement la question de la gestion de la ressource. «Que feront les Britanniques en cas de ‘no deal’ ?» questionnent les membres de la délégation. «Il faut des rotations dans les eaux du Détroit et des compensations», lâche Bruno Margolle, dirigeant de la Coopérative maritime étaploise qui rassemble 460 navires. «Il y a quinze ans, on a construit une gestion de la ressource. Dans quelques jours, on risque d’anéantir tous ces efforts», ajoute-t-il. La filière a rappelé au Premier ministre une demande ancienne : l’ouverture en continu du Service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (Sivep). Ce sera la seule annonce de Jean Castex : pour élargir les horaires d’ouverture du Sivep, l’État créera 21 postes supplémentaires en sus des 17 fonctionnaires qui font déjà tourner l’établissement depuis son ouverture en 2019.
Pas la fin du monde, mais la fin d’un monde
La nouvelle frontière sera bien gardée si l’on en croit le Gouvernement qui dit avoir recruté 1 700 agents au service des douanes sur la façade maritime des Hauts-de-France. Après Boulogne, le Premier ministre s’est rendu à Calais, où les bouchons sont désormais récurrents en milieu de semaine, jours de trafic toujours plus importants. Les Britanniques feraient-ils des stocks avant le Brexit ? Les chiffres du trafic de décembre seront probablement éloquents. La fluidité sur la ligne Calais-Douvres sera la question centrale au moment où les autorités britanniques – et européennes – ouvrent de nouvelles routes entre le Continent et le Royaume-Uni. Plus qu’ailleurs, la frontière sera marquée à Calais. Jean Castex est passé chez Eurotunnel avant d’enchaîner par une visite au port de Calais. Même préoccupation à l’esprit : envisager tous les scénarios. La fluidité du trafic dépendra de la lourdeur des contrôles, eux-mêmes dépendant de l’issue du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement qui se sont réunis les 10 et 11 décembre. Sur place, un cadre portuaire explique que le passage d’un voyageur en provenance de Grande-Bretagne pourrait nécessiter une minute contre vingt secondes actuellement. Côté camions, c’est l’inconnu. Les 6 000 places de parking disponibles sur la Côte d’Opale ne seront pas de trop pour faire face à la situation.
A l’heure où nous mettons sous presse, l’Union européenne et le Royaume-Uni tentaient de se mettre d’accord sur les trois derniers points de blocage : les conditions de la concurrence, la manière de gérer les conflits et la pêche. Dernier épisode dans quelques jours.