Immigration : Macron semble avoir circonscrit l'épisode des "frondeurs"

Des ministres mal à l'aise ou démissionnaires, finalement rentrés dans le rang : le président Emmanuel Macron semble avoir circonscrit l'incendie déclenché par la loi sur l'immigration du côté gauche de sa majorité et...

La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Sylvie Retailleau visite le siège de Parcoursup à Toulouse, le 12 juin 2023 © Lionel BONAVENTURE
La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Sylvie Retailleau visite le siège de Parcoursup à Toulouse, le 12 juin 2023 © Lionel BONAVENTURE

Des ministres mal à l'aise ou démissionnaires, finalement rentrés dans le rang : le président Emmanuel Macron semble avoir circonscrit l'incendie déclenché par la loi sur l'immigration du côté gauche de sa majorité et qui menaçait de tourner à la fronde.

Au final seul le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, heurté dans ses convictions par un texte jugé trop dur, a jeté l'éponge.

La ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche Sylvie Retailleau a bien présenté mercredi sa démission en raison d'un "désaccord profond" sur les mesures concernant les étudiants. Mais il lui a été signifié qu'elle était refusée et elle reste en poste, selon son entourage.

Quant au ministre des Transports Clément Beaune, qui avait fait part de son malaise et échangé avec des collègues réfractaires avant le vote, il garde depuis le silence.

Le chef de l'Etat, soucieux de se montrer pugnace dans la crise et souvent prompt à la verticalité, n'a rien laissé filtrer en public. Mais il n'en paraît pas moins agacé par ces ministres au bord de la crise de nerfs et par ces menaces de démissions.

Il a brutalement recadré mercredi une autre frondeuse présumée, la ministre de la Culture Rima Abdul Malak, en prenant le contre-pied de ses déclarations sur l'acteur Gérard Depardieu, dans la tempête après des accusations de viol et agression sexuelle.

Éteindre l'incendie

La ministre, qui n'est autre que son ancienne conseillère à la Culture, tout comme Clément Beaune aux Affaires européennes, avait pourtant démenti le jour même les rumeurs de démission la concernant.

Emmanuel Macron, qui avait lui-même démissionné de Bercy pour acter sa rupture avec François Hollande et préparer sa propre marche vers l'Elysée, appréciera sûrement à leur juste valeur toutes ces menaces avortées.

A peine arrivé à l'Elysée en 2017, il avait sèchement remis à sa place le chef d'Etat-major des armées, le général Pierre de Villiers, inquiet pour son budget, d'un cinglant "Je suis votre chef !".   

Sur cette séquence immigration, il a tout fait pour colmater les brèches et éviter l'image d'une majorité facturée. 

Avec un seul mot d'ordre à l'approche de 2024, année des JO de Paris dont il entend faire un tournant de son quinquennat: se mobiliser, serrer les rangs, poursuivre les réformes. 

Pour éteindre l'incendie, le chef de l'Etat a immédiatement saisi le Conseil constitutionnel sur certaines dispositions de la loi, qui sont pourtant le fruit d'un compromis avec la droite mais restent très décriées sur son aile gauche.

Une manière de donner des gages aux plus récalcitrants de son camp, qui peuvent espérer ainsi voir certaines mesures censurées.

Jeu ambigu

Le débat s'est notamment cristallisé sur les aides au logement, qui seront accessibles plus tard pour des étrangers arrivant sur le sol français et sur la "caution retour" demandée aux étudiants étrangers.

Le chef de l'Etat a lui-même convenu que demander une telle caution n'était "pas une bonne idée" alors que la compétition internationale est grande entre universités pour accueillir les talents étrangers.

La communauté universitaire (France Universités) s'est déclarée de son côté "rassurée" vendredi après un échange avec sa ministre de tutelle visant à obtenir le retrait de "plusieurs mesures discriminatoires", dont la caution.

La secrétaire d'Etat à la Ville, Sabrina Agresti-Roubache, a annoncé pour sa part sur RMC qu'elle allait "se battre" pour rétablir "de manière règlementaire" une mesure retirée du texte qui permettait aux demandeurs d'asile de travailler non plus au bout de six mois mais d'un mois et demi.

De quoi faire craindre aux Républicains, artisans de la version plus dure de la loi, que le texte ne soit tout simplement détricoté sur ses points les plus litigieux.

"Pouvez-vous prendre l'engagement solennel que vous ferez appliquer la nouvelle loi immigration ?", a lancé leur patron, Eric Ciotti, dans une lettre à la Première ministre Elisabeth Borne. 

Dans un entretien au Figaro vendredi, une autre figure du parti, Laurent Wauquiez, candidat potentiel à la présidentielle en 2027, a également critiqué "le jeu ambigu" et "très dangereux" exercé selon lui par le président Emmanuel Macron qui pourrait "neutraliser les mesures les plus fortes" du texte.

De l'autre côté du spectre, la maire de Paris, Anne Hidalgo (PS), s'est pour sa part refusée à "faire le tri" entre familles et enfants accueillis dans les lieux d'hébergement d'urgence, comme l'y obligerait la loi.

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