Gigafactory : l’Airbus de la batterie pourrait s’installer à Douvrin
L’Union européenne a déclaré la fabrication de batteries comme une priorité absolue. Un consortium entre PSA et Saft développe actuellement un projet de Gigafactory. La région des Hauts-de-France se positionne pour accueillir un des trois sites de production à Douvrin.
L’avenir de l’automobile se conjuguera avec des véhicules toujours plus efficients et électriques offrant plus d’autonomie. Pour cela, les constructeurs ont besoin de batteries plus performantes. Il y a un peu plus d’une année, un premier projet de Gigafactory associant les groupes PSA (Peugeot, Citroën) et Saft était annoncé outre-Rhin pour concurrencer la Gigafactory développée par Tesla aux États-Unis.
La volonté de l’Union européenne est que d’autres projets voient le jour pour fabriquer des cellules de batteries de dernière génération et répondre ainsi aux besoins de l’industrie automobile européenne. En effet, pour convaincre et continuer à se développer, les constructeurs européens ont aujourd’hui besoin de batteries innovantes et compétitives et offrir de nouvelles solutions d’électromobilité.
Face à l’hégémonie des pays asiatiques dans le domaine de la batterie, l’Europe n’a d’autres solutions que de créer une alliance entre plusieurs pays pour développer, comme ce fut le cas dans le domaine de l’aéronautique, une sorte d’Airbus de la batterie.
Le 9 décembre, la Commission européenne a élevé ce projet au rang d’objectif stratégique de long terme. Un projet important d’intérêt européen commun (PIIEC) a été notifié conjointement par sept États membres bien décidés à soutenir les initiatives de dix-sept industriels européens du secteur de la batterie. Jusqu’en 2031, en plus des 5 milliards d’euros d’investissements privés, France, Allemagne, Pologne, Suède, Finlande, Italie, et Belgique vont contribuer à hauteur de 3,2 milliards d’euros (dont 690 millions d’euros pour la France) au développement d’une véritable industrie de la batterie.
Parallèlement à cette annonce, la semaine dernière, les groupes PSA et Total (via sa filiale Saft) ont annoncé s’être associés pour porter un projet de mise en place d’une usine de fabrication de batteries pour véhicules électriques sur le territoire national et la région Hauts-de-France figure en bonne place pour accueillir ce nouvel outil industriel.
Douvrin plutôt qu’Amiens
Cette «gigafactory» fait partie d’un ensemble de trois nouveaux sites industriels envisagés par un consortium franco-allemand, adossé sur l’Union européenne et des partenaires industriels, destinés à fonder une filière européenne des batteries électriques pour l’automobile (un projet à 5 milliards d’euros).
Si on évoque d’ores et déjà un premier site en Allemagne à Kaiserslautern sur un ancien site de production Opel, et un second en France à Nersac en Charente, l’implantation du troisième et dernier site n’est pas encore définitive et plusieurs solutions sont actuellement à l’étude.
Le Groupe PSA qui s’est stratégiquement positionné sur ce dossier, étudie plusieurs possibilités pour implanter cette usine. Le site de Sochaux, berceau de la famille Peugeot, est en lice au même titre que le site PSA de Trémery en Moselle et le site PSA de Douvrin dans les Hauts de France.
La ville d’Amiens qui s’était très tôt positionnée sur ce dossier et comptait bien profiter de l’arrivée d’une usine de batterie pour redynamiser son territoire semble donc écartée, d’autant que la région, par la voix de son président, se positionne clairement pour l’ancien site de la Française des Mécaniques de Douvrin (voir encadré).
2 500 emplois
La région Hauts-de-France est la première région automobile de France, elle a clairement une carte à jouer dans ce dossier Gigafactory. La Région compte bien ne pas passer à côté de cette opportunité et vient de couper l’herbe sous le pied aux autres régions en lice en avançant des garanties financières quant à la mise en oeuvre de ce projet à Douvrin.
Le projet doit dans un premier temps créer 2 500 emplois directs, sans compter les sous-traitants. Il représente également une chance pour le site PSA de Douvrin, le premier assembleur de moteurs thermiques en France qui emploie 1 800 personnes et est en pleine restructuration actuellement.
En outre, l’usine, qui est implantée sur 140 hectares, est en phase de compactage et doit dans un avenir proche libérer plusieurs hectares qui pourraient être utilisés pour accueillir l’usine de batterie. Autre argument de taille, le site de Douvrin est le seul à produire le moteur hybride EP PHEV pour PSA, dont la production s’établit actuellement à hauteur de 660 moteurs par jour, avec comme objectif d’atteindre rapidement les 350 000 unités par an.
Enfin, notons que le Syndicat intercommunal des industries Artois Flandres (SIZIAF) et les deux communautés d’agglomérations de Lens-Liévin (CALL) et de Bruay-Béthune Artois Lys Romane (CABBALR) se positionnent également sur ce dossier politiquement et financièrement parlant, à hauteur de 41 millions d’euros. Les partenaires autour de ce projet confirmeront leur décision début 2020, des travaux à hauteur de 2,2 milliards d’euros débuteront dès 2021, pour un démarrage de la production en 2023.
La région s’engage pour une Gigafactory
Après la Toyota hybride à Onnaing et le Kangoo électrique à Maubeuge, les Hauts-de-France vont peut-être franchir un nouveau pas pour devenir premiers dans le secteur de l’automobile de demain. La région est prête à débloquer 80 millions d’euros sur trois ans pour construire une usine de fabrication de batteries.
«Un nouveau Toyota», «un Airbus de la batterie li-ion», les mots sont forts pour qualifier un potentiel projet de construction d’usine de batteries automobiles dans la région. Xavier Bertrand, président de la région Hauts-de-France, insiste : «Rien n’est définitif, c’est à PSA que reviendra la décision finale». Pourtant, à l’hémicycle, vendredi dernier, la délibération a conquis l’intégralité de l’assemblée.
Les constructeurs européens vont devoir augmenter le nombre de véhicules électriques, jusqu’au nombre de 5 millions en 2030. La demande de batteries électriques pourrait alors être multipliée par 10 dans les années à venir. Problème : la fabrication des batteries pour véhicules ne se concentre qu’autour de cinq acteurs, aujourd’hui, tous asiatiques. «Il tient donc de la souveraineté nationale de construire une usine française en la matière, martèle Xavier Bertrand. Un tel projet prouve qu’écologie et économie sont bien compatibles.»
C.M