Fusillade à Poitiers, après Rennes: Retailleau évoque "un point de bascule" dans le narcotrafic

Bruno Retailleau a jugé vendredi qu’on était "à un point de bascule" face aux trafics de drogue, après une fusillade sanglante à Poitiers où un adolescent de 15 ans est entre la vie et la mort, une semaine après qu'un...

 © Guillaume SOUVANT
© Guillaume SOUVANT

Bruno Retailleau a jugé vendredi qu’on était "à un point de bascule" face aux trafics de drogue, après une fusillade sanglante à Poitiers où un adolescent de 15 ans est entre la vie et la mort, une semaine après qu'un garçonnet a été grièvement blessé par balles près de Rennes.

Le ministre de l'Intérieur, en visite à Rennes vendredi après-midi, s'est dans un premier temps rendu dans le quartier populaire de Maurepas, haut-lieu du trafic de drogue et théâtre de nombreux règlements de comptes ces derniers jours. 

L'enfant de cinq ans blessé de deux balles dans la tête samedi dernier était originaire de ce quartier, de même que son père, "trafiquant de drogue" selon le ministre.

Dans un échange avec une habitante du quartier, au cours duquel il a promis des renforts et la venue de l'Unité nationale d'investigation, créée par Gérald Darmanin, Bruno Retailleau a utilisé un vocabulaire martial comme la semaine dernière à Toulouse.

La France, a-t-il dit , serait en voie de "mexicanisation", à ses yeux. 

"Moi, je vois bien d'ailleurs, sur le territoire français, des enclaves, des mini-Etats, des narco-enclaves qui sont en train de se constituer. Je vois bien, dans les rapports qu'on me fait, s'étendre la toile de la corruption qui menace jusqu'à notre souveraineté", a-t-il ajouté.

Le ministre a répété sa détermination à intensifier les amendes forfaitaire délictuelles contre les consommateurs. Et surtout il a de nouveau insisté sur son souhait que le gouvernement reprenne, en les renforçant, les propositions de la commission d'enquête sénatoriale contre les narcotrafics. 

Il a rappelé qu'une proposition de loi en ce sens était sur le bureau du Sénat et a formé le voeu que ce texte soit voté par le parlement dans les "prochains mois". 

Interrogée par l'AFP en marge de la visite, Nadège, 56 ans, raconte qu'elle vit à Maurepas depuis deux ans.

"C'est de pire en pire. Bien sûr qu'on a envie de partir", confie-t-elle. "Début août je partais au travail et il y avait des tirs de kalachnikov, je peux vous dire que vous décampez rapidement. A une époque c'était que la nuit, maintenant c'est toute la journée, ils font ce qu'ils veulent."

"Les +narcoracailles+ n'ont plus de limites (...) Ces fusillades, ça ne se passe pas en Amérique du Sud, ça se passe à Rennes, à Poitiers (...). On est à un point de bascule", s'était exclamé dans la matinée sur BFMTV/RMC le ministre de l'Intérieur. 

A Poitiers, "vers 22H45" jeudi soir, a-t-il relaté, "ça a commencé par une fusillade devant un restaurant et ça s'est achevé par une rixe entre bandes rivales qui a engagé plusieurs centaines de personnes". 

Selon les premiers éléments de l'enquête, il y aurait moins d'une centaine de personnes impliquées, entre "40 à 60", a indiqué une source policière.

Lors de cette fusillade, cinq personnes ont été blessées dont plusieurs grièvement. Selon une source policière, un adolescent de 15 ans a reçu une balle dans la tête et était entre la vie et la mort. Deux jeunes de 16 ans font aussi partie des blessés graves, selon une autre source policière.

Briser l'écosystème

Près de Valence, un homme d'une vingtaine années était lui aussi entre la vie et la mort après avoir reçu dans la nuit de jeudi à vendredi une balle dans la tête lors d'une fusillade devant une discothèque. Des faits liés à des trafics de drogue, selon la police.

Ces événements sont survenus une semaine après qu'un enfant de cinq ans a lui aussi été atteint de deux balles dans la tête, à Pacé, près de Rennes. Le garçon était dans la voiture de son père qui tentait de fuir des trafiquants de drogue. 

L'enfant est toujours entre la vie et la mort, a dit vendredi le ministre. "L'enquête avance", a-t-il ajouté, promettant des renforts "le temps qu'il faudra". 

Le garçon était dans la voiture de son père qui tentait de fuir des trafiquants de drogue. 

Depuis sa nomination au ministère de l'Intérieur, M. Retailleau plaide pour que la lutte contre le narcotrafic devienne "une cause nationale". Il souhaite une mobilisation contre les trafics de drogue à l'image de ce qui a été fait contre le terrorisme.

Le trafic de drogue génère un chiffre d'affaires de trois à six milliards d'euros en France, selon les estimations de la commission d'enquête sénatoriale. 

Vendredi prochain, Bruno Retailleau doit se rendre avec son collègue de la Justice Didier Migaud à Marseille où les règlements de comptes entre narcotrafiquants sont particulièrement meurtriers et sordides, avec l'implication de jeunes de 14-15 ans comme tueurs à gages. 

Les deux ministres doivent y annoncer ensemble plusieurs mesures.

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