French Bukkake: 17 hommes seront jugés au premier grand procès du porno amateur
Des actes sexuels violents qui "s'enchaînaient par surprise" sur des actrices recrutées par ruse: un procès a été ordonné jeudi pour 17 hommes soupçonnés d'avoir participé à un système à l'origine de viols aggravés sur des dizaines de femmes lors...
Des actes sexuels violents qui "s'enchaînaient par surprise" sur des actrices recrutées par ruse: un procès a été ordonné jeudi pour 17 hommes soupçonnés d'avoir participé à un système à l'origine de viols aggravés sur des dizaines de femmes lors de tournages pour la plateforme pornographique French Bukkake.
Âgés de 29 à 61 ans, dirigeant de cette plateforme désormais fermée, associé, recruteur d'actrices ou acteurs, ils seront jugés par la cour criminelle départementale de Paris notamment pour viols en réunion, traite d'êtres humains en bande organisée ou proxénétisme aggravé, selon des sources proches du dossier.
Quatre des mis en cause sont actuellement en détention provisoire.
Une cinquantaine de victimes, en moyenne âgées d'une vingtaine d'années et ciblées pour leur précarité, ont été identifiées. Une quarantaine d'entre elles et quatre associations, Les Effrontées, le Mouvement du Nid, Osez le féminisme et la Ligue des droits de l'Homme, sont parties civiles.
"L'enquête a révélé que les violences perpétrées contre ces femmes étaient systémiques", a souligné Me Lorraine Questiaux, qui représente plusieurs parties civiles dont Le Nid.
Ouverte en octobre 2020, l'information judiciaire s'est focalisée sur le "système" bâti par Julien D., un père de famille rémois de 42 ans, d'après l'ordonnance signée par deux magistrates parisiennes dont l'AFP a eu connaissance.
Ses avocats n'ont pas souhaité commenter.
Stratagème
Dans une industrie où de nouvelles actrices sont "rares et difficiles à recruter", Julien D. est accusé d'avoir incarné, de 2013 à 2019, trois personnages virtuels successifs qui appâtaient des jeunes femmes: une amie rassurante, qui les persuadait de débuter dans l'escorting; le dirigeant d'une agence soi-disant de luxe qui les recrutait; un prétendu client de cette agence qu'elles rencontraient ensuite pour un rapport tarifé.
Julien D. est accusé d'avoir utilisé ce "stratagème" pour violer une trentaine de ces femmes, "rabattues" ensuite vers des tournages principalement sous l'égide de deux figures du porno dit amateur, le dirigeant du site French Bukkake et réalisateur surnommé Pascal OP, et son associé connu comme Mat Hadix.
On leur promettait alors une bonne rémunération, un bon traitement ainsi qu'une certaine discrétion avec une diffusion hors de France. Mais elles dénoncent avoir subi, sur place, de nouveaux faits de viols aggravés. Les films étaient ensuite diffusés via French Bukkake, notamment dans l'Hexagone.
Pascal OP est aussi renvoyé devant la cour criminelle pour proxénétisme aggravé pour avoir permis à des clients, qui payaient un abonnement à sa plateforme ou proposaient leur appartement comme lieu de tournage, de participer à des vidéos. Son avocate n'était pas joignable jeudi.
L'ordonnance souligne que "le système ne pouvait prospérer sans la participation des acteurs et d'autres réalisateurs qui profitaient des 2/3 jours de tournage de ces jeunes femmes avant que celles-ci ne soient +grillées+".
Nombre de plaignantes ont évoqué des tournages sous alcool et stupéfiants et décrit leur "sidération" en y découvrant le nombre de partenaires masculins et les actes sexuels à réaliser, qui "s'enchaînaient (...) par surprise", relèvent les juges.
Préjugés racistes et sexistes
"Nous avons été torturées", avait assuré à l'AFP l'une d'entre elles. "J'ai besoin aujourd'hui pour revivre que la barbarie, la haine sexiste et raciste dont j'ai été victime, soient reconnues et punies."
De nombreuses parties civiles avaient demandé à la justice de retenir que les viols lors des tournages avaient été accompagnés d'actes de torture, de barbarie et de racisme, mais les deux juges ont refusé. Plusieurs entendent faire appel.
Comme la Ligue des droits de l'Homme, qui compte "s'assurer que ce procès soit aussi celui des préjugés racistes et sexistes les plus rances", selon son avocate Valentine Rebérioux.
Les circonstances aggravantes de torture et de barbarie auraient pu mener le dossier à la cour d'assises et permis, selon Me Questiaux, "un vrai débat, avec des jurés, pour le premier procès de crime contre l'humanité des femmes" ou, selon Me Seydi Ba, qui représente une plaignante et a d'ores et déjà fait appel, de "débattre sur les notions de viol et de consentement".
La plupart des mis en cause ont eux contesté avoir eu une bonne connaissance du système et assuré que les femmes étaient consentantes.
Me Dylan Slama, avocat d'un acteur, espère pouvoir "enfin expliquer la réalité du parcours de (son) client, qui n'est pas celui d'un agresseur sexuel".
Plusieurs mis en cause ont indiqué leur intention de faire appel. Mes Mourad Battikh et Antoine Ory, qui défendent un accusé producteur et acteur, ont fustigé "une ordonnance sans surprise" après une enquête "exclusivement à charge".
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