Fin de la grève à La Provence après la crise liée à la Une sur la visite de Macron

Les journalistes du quotidien La Provence ont mis fin lundi à la grève qu'ils avaient entamée vendredi en réaction à la mise à pied du directeur de la publication, après la Une sur la visite...

Des journalistes de La Provence manifestent devant le siège de leur journal, à Marseille le 25 mars 2024 © Nicolas TUCAT
Des journalistes de La Provence manifestent devant le siège de leur journal, à Marseille le 25 mars 2024 © Nicolas TUCAT

Les journalistes du quotidien La Provence ont mis fin lundi à la grève qu'ils avaient entamée vendredi en réaction à la mise à pied du directeur de la publication, après la Une sur la visite d'Emmanuel Macron jugée "ambiguë" par la direction.

La direction de ce journal régional détenu par l'armateur CMA CGM, propriété du milliardaire Rodolphe Saadé, avait décidé dimanche de réintégrer le directeur de la rédaction, Aurélien Viers, et lundi les salariés ont choisi de reprendre le travail.

A l'issue d'une assemblée générale, 94 votants se sont prononcés pour la reprise, tandis que 71 journalistes ont voté en faveur de la poursuite du mouvement de grève.

Dans la matinée, plusieurs dizaines de journalistes avaient participé à un rassemblement devant les locaux du quotidien, brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : "Nos infos, c'est pas du travail d'a(r)mateur", "la liberté de la presse à l'article de la mort" ou encore "On recoupe les infos, coupez pas les têtes".

Mais d'après Jean-Christophe Tortora, directeur de la filiale médias de CMA CGM, Rodolphe Saadé n'est "jamais intervenu dans cette affaire". 

"S'il était dans l'ingérence sur le plan éditorial, pensez-vous qu'il aurait attendu un an et demi (depuis qu'il est propriétaire, NDLR) pour se mêler des Unes et des sujets ?", a-t-il lancé au Figaro.

La crise avait été déclenchée par la Une du quotidien de jeudi, barrée du titre "Il (Emmanuel Macron, ndlr) est parti et nous, on est toujours là...".

Garanties suffisamment fortes

La direction estimait que cette phrase, attribuée en pages intérieures à un habitant d'une cité paupérisée de Marseille où s'était rendu le chef de l'Etat mardi pour une opération contre le trafic de drogue, pouvait donner l'impression que le journal donnait la parole à des trafiquants.

Aurélien Viers était présent lundi devant le journal. "J'ai obtenu des garanties suffisamment fortes dimanche pour revenir au travail et me dire que je pouvais travailler avec la rédaction en toute indépendance éditoriale, sans pression", a-t-il déclaré.

Concernant la Une, il a expliqué: "Il y eu une erreur dans le fait d'écrire une citation sans savoir qui est l'auteur, il y a une ambiguïté (...) donc je pense qu'on peut reconnaître ça. C'est pas grave, on fait 364 Unes dans l'année, il peut y avoir des erreurs de commises".

"On n'est pas une rédaction qui a une culture sociale hyper développée, mais par contre sur les valeurs, on ne veut pas transiger", avait expliqué Sylvain Pignol, élu SNJ au CSE, durant le rassemblement, en indiquant qu'avant 2023, le quotidien régional n'avait "connu dans son histoire qu'un seul jour de grève".

La Une sur la visite d'Emmanuel Macron "n'avait rien de scandaleux, était parfaitement intègre sur le plan déontologique", a affirmé M. Pignol.

Après avoir repris le groupe La Provence en 2022, M. Saadé a pris une participation dans M6, racheté La Tribune et annoncé la semaine dernière le rachat d'Altice Media, maison mère de BFMTV notamment.

A La Tribune, où la rédaction s'était prononcée pour une grève mardi en solidarité, l'appel a été levé lundi soir, à l'issue d'une assemblée générale. "Nous avons obtenu des garanties d'indépendance satisfaisantes, notamment la création d'un comité d'indépendance éditoriale, l'affirmation par l'actionnaire de l'importance de l'indépendance et du pluralisme politique" notamment, a indiqué un élu du personnel à l'AFP.

S'ils se sont "félicités de la réintégration du directeur de la rédaction de La Provence", les sociétés des journalistes de BFMTV et RMC, ainsi que les syndicats d'Altice Media (SNJ, CGT et SNME-CFDT) ont estimé dimanche dans un communiqué qu'en "intervenant directement auprès du directeur de la publication, l'actionnaire a franchi une ligne rouge" et se disent "prêts à se mobiliser" si "l'indépendance des rédactions et la liberté éditoriales" étaient à nouveau menacées.

34M98HL