Eurovanille développe le bio à marche forcée et innove
Développement rapide du bio, arrivée sur le marché américain, projet de serre pilote... Chez Eurovanille, l'un des leaders mondiaux de la vanille, les projets à venir sont nombreux. Tout semble sourire à l'entreprise créée en 1990 par Laurent Bourgois et installée en partie du côté de Gouy Saint-André depuis les années 2000.
Sous la gousse, la plage. Chez Eurovanille, la vanille se décline sous toutes ses formes : en gousse, liquide, en poudre ou en pâte. Une fois transformée sur les sites de production et de conditionnement de Gouy-Saint-André ou de Maresquel, celle-ci se vend sous la forme de sachets, de tubes, de pots, de flacons, de bouteilles ou encore en cubiteneur partout dans le monde. L’Europe est traditionnellement et historiquement le marché le plus important où se vend et s’échange cette épice. «On réalise 75% de notre chiffre d’affaires avec l’Europe. C’est notre plus gros marché», indique Laurent Bourgois, le président fondateur. Les 25% restants, c’est en France qu’elle le réalise avec l’industrie agroalimentaire (50% de son activité), les artisans, les grossistes et la grande distribution. L’entreprise, qui a réalisé un chiffre d’affaires de 54 millions d’euros en 2018, se tourne vers l’export, avec des perspectives de croissance digne des grands groupes industriels. «On a une augmentation du volume de l’ordre de 25% par rapport à l’année dernière à la même période, soit 11% de plus que le budget que l’on s’était fixé à fin mars cette année.» La raison ? «On prend des parts de marché. En 2019, on devrait vendre entre 110 et 120 tonnes de vanille, ce qui représente 5 à 7% du marché mondial.»
Développer la vanille bio partout
Dans la ligne de mire de l’entreprise : son développement sur le marché américain, et notamment aux Etats-Unis. Depuis ses débuts, Eurovanille mise sur le bio pour faire la différence face aux concurrents. Il est actuellement le leader. À ce titre, un gros travail est effectué avec les fournisseurs pour proposer le bio au même prix que le hors-bio. Productions et certifications différentes, plus de contrôles… la démocratisation du bio nécessite de s’adapter, mais surtout allonge le temps de production : «c’est le jeu pour réussir et conquérir de nouvelles parts de marché» – sans que les marges augmentent – sous-entend le directeur. Dès le mois de juin, Eurovanille compte se développer aux Etats-Unis. Le groupe se laisse six mois pour se lancer, puis envisage de passer à la vitesse supérieure dès 2020. «Le marché américain est extrêmement demandeur de vanille bio, notamment sur des produits tels que la vanille liquide et les pâtes pour la grande distribution. L’offre y est très faible, donc on souhaite se positionner et être les premiers. Jusqu’à maintenant on y était très peu présent car, historiquement, le marché le plus vendeur, c’est l’Europe», explique Laurent Bourgois. Ce développement contribuerait à atteindre les objectifs fixés il y a un an : vendre 50% de produits bio en 2019, 85% en 2020, et parvenir à vendre 150 tonnes de vanille en 2022. Pour y arriver, ses équipes innovent à un rythme effréné. En moyenne, chaque semaine, deux nouvelles recettes sont élaborées par le service recherche et développement, qui viennent compléter les quelque 600 recettes déjà existantes. Pour autant, Laurent Bourgois n’oublie pas de regarder plus à l’est, vers la Chine, le Moyen-Orient et, plus près de chez nous, vers les pays d’Europe de l’Est. «Ce sont des marchés qui montent et pour lesquels il va falloir se positionner rapidement.»
Une serre pilote pour définir la vanille de demain
Aujourd’hui une tendance se dessine : la demande est de plus en plus importante et tend vers plus de produits naturels, ainsi que plus de traçabilité «de la fourche à l’assiette». Pour répondre à ce défi, Eurovanille s’implique, depuis plusieurs années déjà, dans la recherche fondamentale et appliquée. Dernièrement, l’entreprise a dépensé 500 000 € pour un projet de serre pilote à Gouy-Saint-André. L’idée, c’est de développer des variétés de vanille plus résistantes aux maladies et de nouvelles variétés au goût différent. Pour cela, un gros travail de recherche a été fait en amont : il s’agissait de déchiffrer le génome de la vanille Bourbon (la plus réputée, originaire de Madagascar et de la Réunion principalement). C’est désormais chose faite. Reste maintenant à déchiffrer le génome de la vanille de Tahiti, une «affaire de mois» selon Antoine du Granrut, ingénieur agronome, qui a rejoint l’aventure en 2018. Dans cette serre pilote, 2 500 pieds de vanille vont être plantés d’ici fin avril. «On va proposer différents types d’engrais, de climats, de substrats à la vanille. L’idée derrière, c’est d’en apprendre davantage sur la manière dont elle pousse, et proposer des solutions innovantes aux pays producteurs», explique l’ingénieur. De nouvelles variétés sont d’ores et déjà à l’étude, et obtenues par croisement et non par modification du génome lui-même. «On pense à terme que ces nouvelles variétés représenteront 50% de notre approvisionnement. On se laisse trois ans pour déchiffrer ces nouveaux génomes.» Améliorer par croisement la vanille pour faciliter sa culture, c’est la recette de la vanille du futur.