Eurotunnel : quand le rail flotte
Groupe Eurotunnel (GET) vient de publier ses résultats semstriels : l'opérateur transmanche peut se targuer de voir augmenter le volume de toutes ses activités (ferroviaire, logistique et maritime), tout en affichant des pertes symboliques.
Affaires complexes. Si les résultats de cette première partie de l’année donnent toujours plus d’ambition à Eurotunnel, son activité maritime pourrait bien s’arrêter avant même que son appel soit jugé. L’autorité de la concurrence britannique a en effet ordonné pour la seconde fois, le 27 juin dernier, de fermer le port de Douvres aux navires de sa filiale maritime MyFerryLink sous six mois, accusant le groupe franco-britannique d’être en position dominante (rail + navires) sur le Détroit pour le plus grand bonheur de son concurrent DFDS.
Au milieu de l’année, le groupe affiche une hausse de 8% de son chiffre d’affaires (à 559 millions d’euros) et de 6% de son Ebitda (à 216 millions d’euros). Sur le lien fixe, la hausse est de 5% (à 393 millions d’euros) : Eurotunnel a vu passer plus de la moitié (54%) du trafic de voitures entre le Calaisis et Douvres. L’activité fret frôle les 700 000 camions sur la période (soit 38% des parts de marché). En termes de passagers, le groupe franchit la barre des 5 millions de personnes transportées. Côté logistique, la filiale Europorte voit sa croissance atteindre deux chiffres (à 10%, pour 127 millions d’euros), même si la marge est en partie grignotée par des frais de démarrage (ristournes) pour de nouveaux services de fret aux heures creuses.
Incertitudes levées et confirmées. Ces six derniers mois, Eurotunnel aura eu quelques sueurs froides avec la Commission européenne qui a finalement fait machine arrière dans les «griefs mentionnés dans l’avis motivé du 20 juin 2013» , avis qui pointait du doigt les tarifs de passage des trains des opérateurs jugés trop élevés et rédhibitoires pour la libre circulation. La foire d’empoigne avec Eurostar avait pris des proportions importantes. Les perspectives du groupe restent positives avec une prévision d’augmentation de ses activités et de sa rentabilité. Celle-ci reste, marginalement, plombée par sa filiale MyFerryLink qui a perdu 15 millions d’euros, faisant passer le groupe à 11 millions d’euros, sous la barre de rentabilité.
MyFerryLink, rentable en 2015 ? C’est l’objectif non avoué de la direction de la filiale maritime d’Eurotunnel. En deux ans, la compagnie maritime, qui sous-traite la partie rotation de navires ainsi que la commercialisation des traversées à la Scop des anciens de SeaFrance, a fait la preuve de sa pertinence. Comparée au premier semestre 2013, l’activité a pris plus de 30% (à 39 millions d’euros). Ses charges d’exploitation sont passées de 46 millions au premier semestre 2013 à 50 millions ces six derniers mois. La rentabilité n’est donc pas très loin, les charges d’exploitation progressant trois fois moins vite que le chiffre d’affaires. Le trafic fret représente ainsi plus de 183 000 camions transportés contre 141 000 à la même période en 2013. Si les véhicules de tourisme perdent 7% (avec 108 000 unités), le secteur des autocars explose en passant de 279 à 932 unités transportées. Jacques Gounon ne se faisait pourtant plus beaucoup d’illusions : «L’hypothèse la plus vraisemblable pour la fin de l’année est que MyFerryLink soit arrêtée», avait-il déclaré lors de sa conférence de presse du 21 juillet dernier. Le lendemain, la Commission britannique indiquait que le nouvel appel déposé par MyFerryLink serait étudié en novembre. Un nouveau sursis pour les 604 salariés.