Eurotunnel encore sur du velours
L’année 2016 promet de ressembler aux précédentes pour Groupe EuroTunnel (GET) : croissance à quasiment tous les étages pour les activités du transporteur franco-britannique. Dans sa communication, GET ne semble pas donner beaucoup d’importance aux conséquences du Brexit. Ni au problème migratoire, au moment où il fait poser de nouveaux murs le long de son périmètre…
L’entreprise voit son chiffre d’affaires grimper de 2%, à 582 millions d’euros depuis le début de l’année.
On espère que le chiffre ne portera pas malheur : «13e semestre consécutif de croissance» se félicite, à juste titre, Eurotunnel. «Record absolu du trafic camions», ajoute l’entreprise qui voit son chiffre d’affaires grimper de 2%, à 582 millions d’euros depuis le début de l’année, et gagne toujours plus d’argent avec la hausse de 4% de son Ebitda1. Son résultat net de 38 millions d’euros suit la même tendance. L’activité principale du Groupe se porte toujours aussi bien : la liaison fixe affiche une croissance de 4% à 443 millions d’euros, tandis que celle des camions atteint 2 chiffres (10%). Seul le nombre de passagers des trains à grande vitesse est en baisse (-3%). Globalement, l’Ebitda progresse de 4% à 239 millions d’euros. Le PDG du groupe, Jacques Gounon, pouvait donc afficher un sérieux optimisme pour la suite : «Eurotunnel enregistre mois après mois des records de trafic, notamment pour les navettes camions. Le tunnel n’a jamais été autant emprunté que maintenant. Au-delà de la volatilité générée sur les marchés financiers par le vote du Royaume-Uni en faveur d’une sortie de l’Union européenne, l’entreprise reste confiante dans la performance de son modèle économique et de ses perspectives.»
Europorte en perte de chiffre d’affaires. A force d’enchaîner les records de trafic, l’idée de marge de croissance encore très importante est devenue un fait concernant le trafic sous la Manche : 830 000 camions sur les navettes depuis le 1er janvier dernier… Des parts de marché qui progressent partout (+2% sur les camions, +2% sur les voitures dans un marché qui a pourtant baissé de 4%), à l’exception des Eurostar qui perdent 3 points de trafic, avec un nombre de passagers qui repasse sous la barre des 5 millions : les grèves en France et en Belgique, les attentats de Bruxelles expliqueraient la baisse.
La filiale logistique d’Eurotunnel ne suit pas la même courbe que son aînée et perd 5 points d’activité. Le Groupe n’affiche pas de pertes, mais la déduction des chiffres affichés le montre. «L’Ebitda est stable à 10 millions d’euros, la baisse des charges d’exploitation ayant compensé la baisse du chiffre d’affaires. Celui-ci est lié à la baisse de l’activité transport de céréales et aux grèves SNCF en France qui ont paralysé le réseau national au mois de juin en bloquant les poste d’aiguillage», explique l’entreprise.
Côté projet, Eurotunnel pourra compter sur de nouvelles ressources avec «ElecLink», futur lien électrique entre le Continent et la Grande-Bretagne. Prometteur, ce projet a conduit Eurotunnel à acquérir les 51% des actions de la filiale qu’il partage avec Star Capital. Signée en mai dernier, l’opération suit son cours, indique le transporteur franco-britannique. Ces futures nouvelles recettes, grâce à un droit de péage supplémentaire, s’ajouteront dans un ou deux ans au chiffre d’affaires du groupe. Au premier semestre, celui-ci s’élève à 582 millions d’euros (+2% par rapport au premier semestre 2015).
Une attente sereine avant les conséquences du Brexit. «Les charges d’exploitation du Groupe sont quasi stables (+1%) pour le semestre. Pour la liaison fixe, les charges d’exploitation sont en hausse de 5% à 204 millions d’euros, une augmentation due à la croissance de l’activité ainsi qu’aux coûts supplémentaires générés par le renforcement des mesures de sûreté», détaille encore le Groupe. La direction de ce dernier fait actuellement poser de nouvelles barrières autour de son site afin de le préserver de l’incursion des migrants. Au chapitre du bénéfice (net consolidé), Eurotunnel l’estime à 60 million d’euros (+29 millions d’euros par rapport au 1er semestre 2015). Le futur s’annonce positif pour le Groupe. Pour autant, l’incertitude demeure quant aux conséquences du Brexit. Une fois voté, celui-ci pouvait produire des «conséquences positives» plaidait pourtant le Groupe dernièrement. Désormais, celui-ci se montre beaucoup plus mesuré : «Les mécanismes et les mesures de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne devant encore être définis, il est difficile de prévoir l’impact sur l’environnement macroéconomique et politique, et donc sur le transport transmanche et les activités du Groupe. Néanmoins, le Groupe n’attend pas d’impact significatif sur ses activités à court terme et l’activité reste actuellement dynamique», explique vaguement Eurotunnel, qui table une perspective légèrement différente vu l’arrêt de MyFerryLink : 535 millions d’euros d’Ebitda (à taux de change d’une livre sterling pour 1,27 euro, moyenne du premier semestre 2016) pour 2016 et 579 millions d’euros (même taux de change). Avec près de 300 millions d’euros en trésorerie au 30 juin, GET peut envisager le futur proche de manière sereine.
1. Ebitda : revenu avant intérêt, impôt, dotations aux amortissement, et provisions sur immobilisation.
Morgan RAILANE