"En matière d’apprentissage, nous sommes passés d’une logique de l’offre à celle de la demande"
La CAPEB est un syndicat patronal de l’artisanat du bâtiment. La CAPEB des Hauts-de-France est la première organisation patronale de France en nombre d’entreprises adhérentes. Elle fédère les CAPEB de l’Aisne, du Nord, de l’Oise, du Pas-de-Calais et de la Somme implantés à Laon, Villeneuve-d’Ascq, Beauvais, Arras et Boves. Rencontre avec Paul Péchon, 55 ans, plombier chauffagiste à Doullens, son président régional depuis début 2018.
La Gazette : Comment se porte aujourd’hui le bâtiment ?
Paul Péchon : Le secteur se porte mieux et l’emploi salarié continue de progresser, représentant aujourd’hui 109 000 salariés dans les Hauts-de-France. Mais nous manquons encore de visibilité, notamment pour les activités liées à la rénovation énergétique. Cela est dû en partie au manque de stabilité des dispositifs d’aides aux ménages ; 2020 n’échappe pas à la règle avec «Ma prime rénov» qui remplace désormais le Crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE).
La volonté louable du gouvernement est de rendre davantage solvables les ménages précaires, mais les ménages exclus dorénavant de ce dispositif représentaient 50% des travaux réalisés en 2019 sous l’ancien CITE. Il y a donc de grandes incertitudes sur le maintien d’activité de ces marchés.
Quel est le rôle du président de la CAPEB Hauts-de-France ?
La CAPEB Hauts-de-France représente les entreprises artisanales du bâtiment auprès des décideurs publics tels que l’État, la Région, mais aussi auprès de toutes les structures régionales dédiées au domaine du bâtiment. Elle assure également une fonction de coordination des actions menées en lien avec les CAPEB départementales sur des sujets aussi variés que la formation, les ressources humaines, la gestion des déchets du bâtiment, la rénovation énergétique, etc. Présider la CAPEB régionale repose donc avant tout dans le fait d’animer et coordonner nos actions coconstruites avec les départements.
Le salon Nordbat est reporté aux 13, 14 et 15 octobre. En quoi ce rendez-vous est-il incontournable pour la CAPEB ?
Naturellement, je regrette que ce salon soit reporté, mais la situation est ainsi. Avec les autres organisations professionnelles et acteurs du secteur, nous prenons une part importante dans l’organisation du salon puisque nous faisons partie du comité de pilotage qui travaille durant près de deux années pour l’organiser. Je tiens d’ailleurs à remercier Expo Conseil, l’organisateur de Nordbat, qui veille à ce que cet événement soit construit avec la profession. Les cinq CAPEB départementales (Arras, Beauvais, Boves, Laon et Villeneuve-d’Ascq) seront bien sûr présentes sur le stand CAPEB, accompagnées de nos nombreux partenaires. Nordbat est aussi l’occasion pour notre organisation d’accueillir nos adhérents dans une ambiance conviviale.
À propos d’adhérents, pourquoi adhérer à la CAPEB ?
Nous avons un rôle de représentation et de défense de la profession auprès des pouvoirs publics, et plus nous sommes nombreux, plus nous serons écoutés. Une entreprise adhérente à la CAPEB dispose d’une palette de services destinée à l’accompagner dans la formation du chef d’entreprise et de ses salariés, répondre à toutes ses problématiques juridiques, administratives et réglementaires, bénéficier de tarifs négociés grâce à nos nombreux partenariats, l’accompagner dans son développement, voire sa transmission d’entreprise…
“Le numérique qui passionne les jeunes devient de plus en plus incontournable dans nos métiers”
Vous parlez de formation des chefs d’entreprise et des salariés. Comment voyez-vous aujourd’hui la réforme de la formation ?
Nous nous félicitons que la loi «Avenir professionnel» de 2018 ait fait le choix de prioriser les fonds de la formation professionnelle vers les entreprises de moins de 50 salariés. En matière d’apprentissage, nous sommes passés d’une logique de l’offre à celle de la demande. L’objectif affiché par le gouvernement a été de mettre un coup d’accélérateur sur l’apprentissage en simplifiant ses conditions d’accès et d’exercice, et c’est évidemment pour les entreprises du bâtiment une bonne chose. Le rôle des Régions est donc amoindri sur le champ de l’apprentissage, mais il est renforcé sur des sujets tels que l’orientation et la découverte des métiers auprès des jeunes. Nous travaillons donc avec la Région Hauts-de-France, au travers du contrat de branche qui nous lie, pour faire découvrir nos métiers et répondre aux besoins en recrutement de nos entreprises. Cette réforme de la formation continue de se mettre en place progressivement et il faudra un peu de temps avant de pouvoir juger de sa pleine efficacité.
Quels messages pouvez-vous adresser à un jeune pour qu’il s’engage dans le bâtiment, vu comme un métier peu attractif et difficile ?
Travailler chez Amazon est à mon sens aussi difficile que de travailler dans le bâtiment. Par ailleurs, nos métiers ont considérablement évolué. La prévention des risques, par exemple, est un sujet de préoccupation majeure pour notre branche professionnelle, qui a même développé son propre organisme de prévention, l’Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPP BTP). Le numérique, qui passionne les jeunes, devient de plus en plus incontournable dans nos métiers. Le BIM par exemple (Building Information Modeling) permet de partager les données d’un bâtiment, de sa conception à sa maintenance, avec l’ensemble des acteurs concernés (architectes, maîtres d’ouvrage, etc.) et concerne l’ensemble des chantiers, du neuf à la rénovation. Imaginez aussi qu’un couvreur peut utiliser aujourd’hui un drone pour effectuer un diagnostic ou encore mesurer une toiture. Enfin, on sait à quel point la jeunesse est préoccupée à juste titre par les questions environnementales. Nos métiers sont en première ligne sur ce sujet avec la rénovation énergétique des bâtiments, les écomatériaux, la gestion des déchets, etc. C’est également une valeur ajoutée de Nordbat que d’accueillir beaucoup de jeunes qui viennent découvrir le bâtiment d’aujourd’hui et surtout celui de demain.