En Iran, casse-tête pour les utilisateurs d'iPhone, populaire mais banni
Dans un café de Téhéran, Hamid agite son téléphone portable dans l'espoir de capter un faible signal et ainsi contourner l'interdiction imposée par les autorités...
Dans un café de Téhéran, Hamid agite son téléphone portable dans l'espoir de capter un faible signal et ainsi contourner l'interdiction imposée par les autorités iraniennes sur les derniers modèles d'iPhone.
Le jeune habitant de la capitale a acheté son nouveau portable à l'étranger peu de temps après l'interdiction par la République islamique des iPhones 14 et 15 en février 2023.
Depuis, Hamid espère que les restrictions vont s'assouplir, mais en vain jusqu'ici.
"J'ai eu une couverture réseau pendant seulement un mois, puis elle a disparu", explique à l'AFP l'homme de 32 ans, en appuyant à plusieurs reprises sur son téléphone pour tenter de rétablir la connexion.
"J'ai recours aux bandes 3G inférieures pour tenter d'obtenir une couverture", se désole-t-il.
En vertu de l'interdiction en vigueur, les utilisateurs des derniers modèles d'iPhone ne peuvent plus déclarer leur portable, une obligation en Iran y compris pour les touristes, faute de quoi la carte SIM est bloquée au bout d'un mois.
Cette mesure vise officiellement, selon l'agence Isna, à réduire les dépenses en devises qui manquent, alors que le gouvernement fait face aux sanctions internationales et à la flambée de l'inflation.
Malgré cela, les iPhones d'Apple restent très convoités en Iran pour leur technologie avancée et comme symboles d'un statut social élevé.
Marché souterrain
Apple n'a jamais été officiellement présent en Iran en raison des sanctions américaines qui ont été réimposées après le retrait de Washington en 2018 d'un accord nucléaire historique.
Les restrictions alimentent un marché clandestin lucratif et des vendeurs gonflent les prix d'anciens modèles, plus faciles à enregistrer.
Elles ont même déclenché une combine à la Ponzi qui a escroqué des milliers d'Iraniens. Une société appelée "Koroush" a proposé pendant des mois des iPhones à des prix réduits allant jusqu'à 200 milliards de rials (340 dollars) l'appareil via des publicités en ligne mettant en vedette des célébrités.
Elle aurait permis de récolter environ 35 millions de dollars, selon le quotidien Javan. D'autres médias, citant la police, ont rapporté des chiffres inférieurs, d'environ trois millions de dollars. Le propriétaire de l'entreprise, contre laquelle quelque 5.000 personnes ont porté plainte, est en fuite.
L'interdiction "a chamboulé les prix" des iPhones, témoigne Navid, propriétaire d'un magasin de téléphonie dans le centre de Téhéran.
Ainsi, l'iPhone 13, bien que plus ancien, coûte pratiquement aussi cher que les modèles plus récents "grâce à la couverture dont il bénéficie", souligne Arafeh, un photographe de 26 ans qui achète un nouveau téléphone.
Son prix varie de 410 millions de rials à plus d'un milliard (710 à 1.900 dollars) alors que l'iPhone 15 se vend de 440 millions à un milliard de rials (750 à 1.900 dollars).
Hostilité croissante
Au total, les téléphones coûtant plus de 600 dollars l'unité, y compris les iPhones, représentent près du tiers des 4,4 milliards de dollars d'importations iraniennes de portables de mars 2021 à mars 2022, selon un rapport des douanes cité par les médias.
Ces dernières années, les autorités ont manifesté une hostilité croissante à l'égard des produits américains.
Le guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, a exhorté en 2020 le gouvernement à cesser les importations d'iPhones.
"J'ai entendu dire qu'environ un demi-milliard de dollars avait été dépensé pour l'importation d'un type de téléphone portable américain de luxe" de 2019 à mars 2020, a-t-il déclaré: "Le secteur privé en est responsable, mais le gouvernement doit y mettre un terme".
Avec l'interdiction, les utilisateurs d'iPhone 14 et 15 n'ont d'autre choix que de trouver des moyens illicites et souvent coûteux d'accéder au réseau.
Les fournisseurs facturent de "4 à 70 millions de rials" la modification de paramètres du réseau pour tenter de contourner les limitations, selon Navid.
Mehdi, un ingénieur de 26 ans, se bat depuis des mois pour trouver le bon moyen pour utiliser son iPhone, mais "aucune des solutions n'est permanente", regrette-t-il.
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