Edito Les maux et la parole
Dans les temps de tromperie universelle, dire la vérité devient un acte révolutionnaire.» La citation de Georges Orwell a sans aucun doute inspiré le trublion qualifié de militant par les chaînes d’infos lors de sa tentative d’intervention, le 10 juin, dans le grand salon de l’hôtel de ville de Nancy, durant le discours d’Emmanuel Macron, le ministre de l’Économie, alors que celui-ci faisait face à un parterre de dirigeants d’entreprises internationales participants au World Materials Forum. «Faites évacuer la salle, il y a un risque de terrorisme social (…) Monsieur Macron, ceci est un bleu de travail ! Ce n’est pas en mettant un costard que l’on travaille, c’est en mettant un bleu, je vous l’offre», entonne le jeune homme brandissant la tenue bleue (tout un symbole en Lorraine) avant d’être stoppé net dans son élan démonstratif par le préfet de Meurthe-et-Moselle rapidement aidé dans son intervention étatique par un service de sécurité composé de quelques agents. Ce n’est pas la première fois que ce «militant» intervient dans des colloques, à forte consonance économique et patronale. Déjà à l’occasion du forum ÉcoRévolutions de mai dernier, au Centre de congrès Prouvé toujours à Nancy, il avait interrompu l’ouverture des débats, interpellant cette fois-là Mathieu Klein, le président du Conseil départemental de Meurthe-et-Moselle. Preuves à l’appui qu’il y a, de nouveau, un fossé béant qui se creuse dans la société (voire une grande majorité, vu le nombre de manifestants dans les rues) laissant planer une résurgence de la lutte des classes qui va grandissante. L’intervention préparée de l’invité surprise du 10 juin n’est que l’énième révélation de la rupture de dialogue qui existe aujourd’hui. Soit ! La méthode peut paraître, sous de nombreux points, choquante pour certains qui sont loin des échos de la rue et de ses pavés. Les paroles des maux sont parfois difficiles à entendre mais faire la sourde oreille n’en n’est pas moins une mauvaise solution. À quand la fin de la politique de l’autruche pour qu’on évite d�en venir réellement aux mains ?
emmanuel.varrier