Economie solide mais électeurs déprimés, paradoxe aux Etats-Unis

L'économie américaine montre une vigueur inattendue et les créations d'emplois ont encore dépassé les attentes en septembre mais, alors que le sujet est crucial à moins d'un mois d'une élection très serrée entre Kamala Harris...

Evolution de l'indice des prix à la consommation aux Etats-Unis depuis 2010, en glissement annuel © Samuel BARBOSA
Evolution de l'indice des prix à la consommation aux Etats-Unis depuis 2010, en glissement annuel © Samuel BARBOSA

L'économie américaine montre une vigueur inattendue et les créations d'emplois ont encore dépassé les attentes en septembre mais, alors que le sujet est crucial à moins d'un mois d'une élection très serrée entre Kamala Harris et Donald Trump, les électeurs restent peu optimistes.

L'inflation ralentit, la récession tant annoncée ne s'est pas produite, la consommation reste solide, la vigueur du marché de l'emploi ne cesse de surprendre... Et pourtant, près de la moitié des personnes interrogées pour un sondage New York Times/Siena College publié mardi jugent que la situation économique est "mauvaise".

Car, après trois années de forte inflation, "les prix élevés nuisent au portefeuille des gens et c'est vraiment ce qui pèse sur la confiance des consommateurs, bien que les indicateurs soient solides", explique à l'AFP Joanne Hsu, directrice de l'enquête mensuelle de l'Université du Michigan sur la confiance des consommateurs.

Les prix sont en effet supérieurs de plus de 20% à ce qu'ils étaient début 2020.

"Le simple fait de voir les prix augmenter régulièrement pèse sur le psychisme collectif, en particulier pour les ménages à revenus faibles et moyens", analyse Ryan Sweet, économiste pour Oxford Economics.

Priorité des électeurs

Le candidat républicain Donald Trump tire régulièrement sur cette corde sensible pour séduire les électeurs, mettant en avant que les prix sont bien plus élevés aujourd'hui que lorsqu'il était au pouvoir. 

"L'inflation a dévasté notre économie", a-t-il déclaré vendredi à Augusta (Georgie).

"Avec (Kamala Harris) au pouvoir, l'inflation va monter en flèche", a-t-il martelé dimanche, en meeting à Juneau (Wisconsin), promettant qu'à l'inverse, s'il remporte l'élection, "dès le premier jour de ma nouvelle administration, (...) nous rendrons l'Amérique à nouveau abordable".

La situation économique est l'une des priorités des électeurs américains. Et "le fait que les gens n'aient pas l'impression de prospérer dans cette économie est une vraie difficulté pour le parti au pouvoir", relève Joanne Hsu.

Le parti démocrate semble toutefois convaincre un peu plus sur l'économie depuis que Kamala Harris est candidate, après le retrait de Joe Biden en juillet.

Un sondage de l'Université du Michigan publié le 20 septembre montre que 41% des personnes interrogées jugent que Kamala Harris est "meilleure pour l'économie", contre 38% pour Donald Trump.

La même enquête en juillet, lorsque Joe Biden était encore candidat, montrait une avance pour Donald Trump sur cette question, avec 40% contre 35%.

Rêve américain

Kathy Bostjancic, cheffe économiste pour Oxford Economics, met aussi en avant une étude du Bureau du budget du Congrès (CBO), un organisme indépendant, qui a montré en mai "que le pouvoir d'achat des ménages est en fait meilleur (aujourd'hui) qu'il ne l'était en 2019".

Les salaires sont en effet supérieurs à l'inflation depuis mai 2023. Mais ça n'est pas vrai pour tout le monde et beaucoup de ménages ont utilisé leur carte de crédit pour payer leurs achats, peinant désormais à les rembourser.

Et avec la hausse des prix, c'est le fameux "rêve américain" qui est ébranlé.

"L'achat d'une maison est incroyablement moins abordable aujourd'hui qu'avant la pandémie", souligne ainsi Kathy Bostjancic, entre des prix qui ont flambé et des taux d'intérêts "toujours bien supérieurs à 6%" pour les prêts immobiliers.

L'inflation a certes fortement ralenti depuis son pic de 9,1% sur un an en juin 2022 et n'était plus que de 2,5% en août, selon l'indice CPI, sur lequel sont indexées les retraites. Et l'objectif de 2%, considéré comme sain pour l'économie, n'est plus très loin.

En septembre, le taux de chômage a aussi légèrement baissé à 4,1% et les créations d'emplois ont été bien supérieures aux attentes.

Mais ces chiffres "masquent les variations massives", avec une croissance de l'emploi "fortement concentrée dans quelques secteurs seulement", indique à l'AFP Julia Pollak, cheffe économiste pour le site d'annonces d'emplois ZipRecruiter.

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