“Préserver le lien entre l’agriculture et l’agroalimentaire”

Julien Dugué est adjoint au chef du Service régional de l’économie agricole, forêt et environnement, au sein de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) du Nord-Pas-de-Calais. Entretien.

“Notre rôle est de rester attentif à la diversité de l’agriculture régionale. Nous avons tout à gagner à cette diversité.” Julien Dugué, adjoint au chef du Service régional de l’économie agricole, forêt et environnement, au sein de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) du Nord-Pas-de-Calais.
“Notre rôle est de rester attentif à la diversité de l’agriculture régionale. Nous avons tout à gagner à cette diversité.” Julien Dugué, adjoint au chef du Service régional de l’économie agricole, forêt et environnement, au sein de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) du Nord-Pas-de-Calais.

Quel est le poids du secteur agroalimentaire dans la région ? Julien Dugué. Le secteur de l’agroalimentaire est une des filières d’importance de la région Nord-Pas-de-Calais. Nous représentons la 3e région agroalimentaire française en chiffre d’affaires. Avec la présence d’entreprises de renommée nationale et internationale, comme Roquette, Cargill, Unéal ou Bonduelle pour ne citer que celles-ci. Avec près de 17 000 exploitants ou co-exploitants agricoles et près de 24 000 salariés de l’industrie agroalimentaire, cela représente plus de 40 000 personnes travaillant dans le secteur. Ainsi, nous constituons la 4e région française. Environ 2 300 entreprises travaillent dans le milieu alimentaire. Le secteur constitue la 1re région industrielle de la région. Les pouvoirs publics se soucient et accompagnent la filière. Une attention particulière lui est accordée.

Quel est le lien entre l’agriculture et l’agroalimentaire ?
La région compte une grande diversité de productions agricoles de même qu’une multiplicité de sociétés dans les filières de transformation. L’industrie agroalimentaire s’est installée en région, entre autres car nous possédons un secteur agricole performant et diversifié. Je pense qu’il y a matière à une consolidation de ce lien car les industries de l’agroalimentaire s’approvisionnent de plus en plus localement.

La région est bien positionnée sur plusieurs secteurs et plusieurs produits font sa renommée. Lesquels ?
Le meilleur exemple concerne la pomme de terre, très bien placée sur le surgelé avec McCain, ou encore la betterave qui approvisionne le groupe Tereos. Le secteur des céréales dispose de grandes coopératives et alimente aussi le marché de l’exportation, via le port de Dunkerque, 1er port de commerce français. Puisque nous parlons de Dunkerque, n’oublions pas le port de Boulogne- sur-Mer, 1er centre européen de traitement des produits de la mer, avec 300 000 tonnes transformées annuellement. Le groupe Roquette, spécialisé dans les amidons et dérivés, emploie 2 850 personnes. De son côté, Bonduelle, à Renescure, emploie 780 personnes dans sa conserverie de légumes. Autre production qui classe notre région au 2e rang national, le lin, une des grandes productions de la région, avec près de 2 000 agriculteurs liniculteurs pour 53 800 tonnes récoltés. Quatorze transformateurs sont implantés dans la région et emploient 350 personnes. Nous avons des débouchés dans le monde entier, notamment en Asie. Le Nord- Pas-de-Calais peut s’enorgueillir d’être un des fleurons du lin textile. L’endive figure parmi les productions phares de la région, avec 78% de la production française. L’élevage est peut-être moins présent que dans d’autres régions, mais on peut néanmoins parler d’un bassin laitier dynamique. Tout cela pour vous montrer la diversité de notre région. Ce sont des atouts non négligeables qui font la richesse de la région.

La diversification du secteur agroalimentaire, vous y croyez ?
On ne peut pas nier que la région héberge de nombreuses industries de seconde transformation, avec Häagen Dazs, par exemple, qui s’approvisionne en crème et en oeufs auprès de sociétés qui les transforment. De plus en plus des entreprises fabriquant des plats préparés s’implantent. C’est un mouvement qui s’accentue, cela se voit dans la stratégie des industriels. Je pense à JB viande, à Hazebrouck, lauréat agroalimentaire en 2012 avec ses saucisses de porcelet prêtes à griller. C’est le bon exemple d’une entreprise qui se diversifie en proposant des produits plus élaborés. L’autre tendance observée concerne les agriculteurs qui font de la transformation à la ferme. D’autant plus que l’Union européenne apporte son soutien aux fermiers qui veulent se diversifier.

D.R.

“Notre rôle est de rester attentif à la diversité de l’agriculture régionale. Nous avons tout à gagner à cette diversité.” Julien Dugué, adjoint au chef du Service régional de l’économie agricole, forêt et environnement, au sein de la Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (Draaf) du Nord-Pas-de-Calais.

Concernant la filière lait, le Nord-Pas-de-Calais a-t-il encore un rôle important à jouer ?
Nous sommes encore une région dynamique dans la filière lait. Que ce soit dans la production laitière, la transformation du lait ou la fabrication des produits laitiers, la région est bien présente. Des coopératives s’approvisionnent en région mais exportent à l’étranger. Je citerai la poudre de lait, avec des produits à forte valeur ajoutée et dont la demande est en forte hausse à travers le monde. Etant donné la bonne rentabilité de ce produit, sa production va se poursuivre. Un marché très dynamique et qui pourrait donc être bénéfique à notre région.

Est-il encore possible de sauver nos abattoirs ? Les viandes bovines, porcines et ovines constituent un petit bassin connecté à la Belgique. Si le tonnage abattu représente encore plus de 113 000 tonnes, beaucoup d’animaux sont désormais abattus en Belgique. La proximité avec ce pays fait que la concurrence est difficile. Il est légitime d’avoir des inquiétudes là-dessus. D’où la nécessité d’impulser une véritable dynamique dans le secteur de l’élevage, en lien avec un schéma interrégional des abattoirs.

En septembre 2012, Stéphane Le Foll, ministre de l’Agriculture, et Guillaume Garot, ministre délégué à l’Agroalimentaire, ont lancé les Rencontres régionales pour l’avenir de l’agroalimentaire. Sur quoi cela va-t-il déboucher ?
Dans notre région, comme ailleurs, des ateliers thématiques ont abouti à la mise en place de centaines de propositions. En mars 2013, Guillaume Garot a assisté à la restitution des rencontres régionales. Cela a débouché, en juin, sur un contrat de la filière alimentaire. Maintenant, au niveau régional, il faudra se réapproprier ce contrat et le mettre en oeuvre. Un Comité stratégique régional de la filière alimentaire se réunira prochainement afin de consolider une stratégie partagée et de mettre en cohérence les actions des uns et des autres. Nous voulons préserver le lien entre le monde agroalimentaire et le monde agricole, faire en sorte que les deux soient cohérents. Notre rôle à la Draaf est de rester attentif à la diversité de l’agriculture régionale. Nous avons tout à gagner à cette diversité.

Propos recueillis par Stéphane GROSJEAN (Agri Ambitions)