“Il faut cinq ans pour absorber un achat”

Olivier Baërt a cédé la société Adicam qu’il avait cédée en 2009 à Bertrand Loridan. L’entreprise spécialisée en travaux électriques et en sécurisation de sites professionnels est implantée à Lillers et rayonne sur la région Nord-Pas-de-Calais. Nous avons rencontré son jeune repreneur, 45 ans, Bertrand Loridan, qui possède déjà un parcours intéressant de créateur et de repreneur d’entreprises.

Entretien d’un réducteur.
Entretien d’un réducteur.

 

Olivier Baërt, ancien dirigeant d’Adicam, “se consacre maintenant pleinement au développement technique qu’il affectionne tout particulièrement”.

Olivier Baërt, ancien dirigeant d’Adicam, “se consacre maintenant pleinement au développement technique qu’il affectionne tout particulièrement”.

Quels sont votre formation et votre parcours professionnel avant cette reprise ?
Après une courte formation, baccalauréat F1 construction mécanique, j’ai fait mon service militaire avec l’idée de faire carrière dans la gendarmerie. En 1987, mon père employé aux Verreries de Masnières, crée Sopalor à Cambrai qui se spécialise dans le contrôle qualité flaconnage et pot. J’intègre l’entreprise à sa création, à l’époque en contrat aidé SIVP, avec mon épouse Laurence. J’y apprends le métier de choisisseur qui consiste à trier des flacons en verre selon certaines normes ou à repérer certains défauts. En accord avec mon père et mon frère qui reste à Sopalor, je crée en 1994 Socodi, société de contrôle et de conditionnement spécialisée dans l’emballage de produits cosmétiques. Mon épouse m’accompagne dans cette nouvelle aventure.

Quel a été le facteur déclenchant votre volonté de reprendre une entreprise ?
La concurrence dans le domaine de l’emballage de produits cosmétiques est devenue plus difficile, de nouveaux acteurs ayant investi ce marché, comme certains transporteurs ou structures aidées. Faute de perspective d’évolution, je sentais – on était dans les années 2004 – qu’il fallait diversifier mes activités. En 2007, j’ai repris la société Lamanda à Jean-Luc Lamanda qui, faute de parent repreneur, m’a fait confiance en me cédant son entreprise, une fois de plus mon épouse m’a suivi.

Quelles actions dans votre carrière vous ont fait penser que vous étiez capable de reprendre une entreprise ?
Mon parcours professionnel est très enrichissant. J’ai découvert le travail et le monde de l’entreprise avec mon père. Fort du soutien familial, j’ai eu la possibilité de créer une/mon entreprise dans un monde professionnel qui m’était familier. Dès la reprise de Lamanda installée à Cambrai quartier Saint-Roch, ses ateliers ont été transférés dans les locaux appartenant à la SCI familiale zone de Cantimpré. Jean- Luc Lamanda m’a accompagné pendant un an, le chiffre d’affaires est passé de 1M€ à 1,5 M€ en 5 ans. Ces prises de responsabilités successives m’ont permis de mieux maîtriser les outils de gestion et de management d’une entreprise. Je me sens bien armé avec l’aide de partenaires fidèles pour reprendre une activité dans la mesure où celle-ci évolue dans un domaine technique qui me parle.

Combien de temps s’est-il passé entre l’idée et la clôture du dossier ?
Le cabinet comptable ECA à Cambrai m’a présenté le dossier Adicam en septembre 2011. La rencontre avec Olivier Baërt le même mois fut bonne. Artisan depuis 10 ans, il avait basculé en Sarl. Le développement de l’entreprise a nécessité un fond de roulement important assez difficile à assurer. En effet, les chantiers démarrant de plus en plus vite, il est important de disposer de stocks suffisamment importants pour répondre. La reprise fut effective en janvier de cette année.

 

Les ateliers apportent une réelle valeur ajoutée aux interventions… et aux clients. Jean- Jacques Joly, responsable électromécanique, intervient sur le bobinage d’un moteur.

Les ateliers apportent une réelle valeur ajoutée aux interventions… et aux clients. Jean- Jacques Joly, responsable électromécanique, intervient sur le bobinage d’un moteur.

Quels ont été les facteurs prépondérants dans le choix de l’entreprise reprise ?
Au-delà du bon contact avec le cédant, le métier d’Adicam “toute l’électricité technique” me parlait et représentait une complémentarité certaine avec l’activité de Lamanda. Lillers étant dans le Pas-de- Calais, à 80km de Cambrai, la couverture géographique régionale est également intéressante. Adicam fabrique des armoires de commande pour chaufferies ou châteaux d’eau, nous ne sommes pas très loin en terme de métiers, nous avons les mêmes clients dans des milieux et avec des interlocuteurs différents. La possibilité de croiser nos donneurs d’ordres est réelle et déjà bien engagée, idem pour nos techniciens.

Quels ont été vos partenaires durant cette reprise ?
Le contact a été initié par Émilie Daviaud, conseillère à la CCI de Béthune, puis le cabinet ECA Cambrai a pris le relais pour m’accompagner dans les domaines comptable, financier et juridique. Notre banque, la CIC BSD-CIN Entreprise à Douai a naturellement assuré le financement de l’opération.

Sur quels critères avez-vous estimé la valorisation de l’entreprise ?
Un cabinet spécialisé qui travaille avec la CCI a établi une valorisation. De mon côté, ECA a procédé à sa propre analyse sur les bases chiffre d’affaires, résultats antérieurs et prévisionnels, stocks et portefeuille de commandes. La valorisation retenue pour la cession est le résultat de cette confrontation des chiffres.

 

Intervention sur une armoire de relèvement.

Intervention sur une armoire de relèvement.

Au final, comment avez-vous trouvé l’entreprise reprise ?Avez-vous été surpris par certains points ?
Olivier Baërt est resté dans l’entreprise comme cadre directeur technique et commercial assurant une continuité naturelle d’exploitation. J’assure la partie direction générale, administrative et financière, conformément d’ailleurs au souhait du cédant. L’équipe est compétente avec une moyenne d’âge inférieure à 30 ans. Je me rends trois fois par semaine dans l’entreprise où j’interviens principalement dans la planification et l’organisation générale des chantiers, un poste de chef de chantier ayant d’ailleurs été créé.

Quels ont été les meilleurs moments de cette période ?
Sans vouloir apparaitre comme blasé, la signature de la reprise en fin décembre 2011 avec la remise des clés de l’entreprise est un moment fort. La première réunion accompagnée d’un repas avec l’équipe reste un souvenir sympathique. Le schéma d’exploitation retenu avec Olivier Baërt garantissant une réelle continuité sans-à-coup, il n’y a pas eu de moment particulièrement difficile.

Avec le recul, que vous a-t-il manqué le plus pendant la durée de la transmission ?
La reprise d’Adicam n’a pas posé de problème particulier, j’avais déjà bien appris lors de la reprise de Lamanda. En effet, j’ai pu observer que l’attente des salariés était forte vis-à-vis du nouveau patron : qui est-il, que va-t-il faire de l’en-treprise, quels sont ses projets, etc. J’avais opté pour un accompagnement du cédant pendant un an avant qu’il ne prenne sa retraite. Cette approche crée une certaine difficulté dans la posture de dirigeant qui a du mal à s’affirmer, ce n’est pas une mise en cause du cédant.

 

Entretien d’un réducteur.

Entretien d’un réducteur.

Si vous aviez trois conseils à donner aux futurs repreneurs, quels seraient-ils ?
Je pense qu’il faut opter pour un accompagnement du cédant durant 3 à 6 mois, au-delà si besoin mais sous forme de missions ponctuelles. La relation avec les salariés doit être directe, il faut les rencontrer pour faire connaissance, les rassurer, leur expliquer comment on voit la suite et le développement de l’entreprise, traiter certains positionnements salariaux ou organisationnels, par exemple qualifications et/ou responsabilités.

Quels sont les projets pour les entreprises que vous avez reprises?
Pour Lamanda, les projets sont largement réalisés ou engagés : transfert des ateliers, organisation en deux pôles : électrique et électromécanique. La reprise d’Adicam ouvre d’autres projets et chantiers. Dans un premier temps, nous recherchons des nouveaux techniciens. Des travaux pour améliorer la qualité de l’accueil devraient être réalisés prochainement. Le site Internet a également besoin d’être ajusté et relooké pour rendre nos offres plus visibles. Ainsi, Adicam a une vraie compétence dans la vidéo protection, je pense à la référence ville de Laventie, qu’il convient de développer. Sur le plan développement des deux entreprises, nous avons engagé le croisement des savoir-faire sur le plan offres clientèle et meilleure couverture géographique, compétences à acquérir pour nos techniciens pour qu’ils soient polyvalents si possible, etc. Le boulot ne manque pas, je suis bien conscient qu’il faut cinq ans pour absorber un achat. Néanmoins, je suis toujours en veille pour reprendre une autre structure dans des domaines similaires pour quadriller encore mieux la région ou apporter des services complémentaires à nos clients.