“Faire sauter les verroustechnologiques ou économiquesqui nous séparent du facteur 4”

Fraîchement élu à la tête de l’Ademe, François Loos était présent à Dunkerque pour les Assises de l’énergie et du climat. L’occasion de faire un point sur les ambitions de l’entité nationale, dans un contexte où il est d’autant plus légitime de faire rimer énergie avec économie.

“A l’Ademe, nous souhaitons renforcer la mobilisation des acteurs du développement durable.” : François Loos.
“A l’Ademe, nous souhaitons renforcer la mobilisation des acteurs du développement durable.” : François Loos.

 

“A l’Ademe, nous souhaitons renforcer la mobilisation des acteurs du développement durable.” : François Loos.

“A l’Ademe, nous souhaitons renforcer la mobilisation des acteurs du développement durable.” : François Loos.

La Gazette. Quel est, en pleine crise économique, l’intérêt d’une manifestation comme les Assises de l’énergie et du climat ?
François Loos. La crise économique s’accompagne d’un moindre intérêt pour le développement durable, or ce sujet doit demeurer au premier plan des préoccupations. A l’Ademe, nous souhaitons donc au contraire renforcer la mobilisation des acteurs du développement durable. Une manifestation comme les Assises de l’énergie nous permet de mettre à la disposition des collectivités territoriales une boîte à outils les aidant dans leur engagement local.

En tant que coorganisateur de l’événement, l’Ademe visait quel objectif ?
L’Ademe s’est beaucoup investie pour cette 13e édition des Assises de l’énergie car une manifestation de cette ampleur nous permet de progresser collectivement dans la mise en mouvement des territoires. La démarche de l’Ademe est double. D’une part détecter et soutenir les territoires pionniers, ceux qui vont plus loin et plus vite que les autres dans leurs initiatives locales, pour diffuser ensuite les enseignements de ces exemples à suivre. D’autre part, mobiliser tous les autres, les territoires qui ne se sont pas engagés les premiers mais dont l’effort est maintenant indispensable pour que le développement durable devienne concret pour 65 millions de Français.

Est-ce que le public des Assises, essentiellement composé de représentants des collectivités, est facile à convaincre ?
Les représentants des collectivités connaissent l’ambition des objectifs qui ont été fixés : la mise en place des PCET pour les collectivités de plus de 50 000 habitants d’ici le 31 décembre 2012, l’atteinte du 3×20 en 2020, le facteur 4 en 2050… Les collectivités savent que l’enjeu est de passer d’une solidarité environnementale affichée au niveau mondial à l’action de proximité au niveau territorial. Elles sont conscientes de leur responsabilité de mise en oeuvre de cette action de proximité. Lorsqu’il y a des freins, ils sont essentiellement du côté du manque d’outils à disposition pour savoir par quel bout prendre des sujets nécessairement complexes et interdépendants. C’est là que l’Ademe intervient par la mise à disposition d’outils adaptés.

L’Ademe est essentiellement tournée vers l’énergie et le climat, l’air et le bruit, les déchets et sols, les consommations et productions durables, ou encore les villes et territoires durables. Mais à choisir, où sont aujourd’hui les priorités ? Où est l’urgence ?
Je n’établirais pas de priorité entre ces thématiques, car la force d’une bonne démarche de développement durable est justement sa transversalité. Par contre, je dirais qu’il y a deux démarches essentielles et complémentaires à mettre en oeuvre. La première – l’urgence comme vous le dites – est d’appliquer dès aujourd’hui les meilleures solutions disponibles. Par exemple, si tout le parc résidentiel existant passait à une consommation moyenne en énergie primaire de 80 kWh/ m²/an, la France économiserait 50 millions de tonnes équivalent pétrole par an ! Mais cette économie n’est qu’une première étape, insuffisante pour atteindre le facteur 4 en 2050. Pour paraphraser Edgar Morin, je dirais qu’il ne faut pas sacrifier l’essentiel pour l’urgence. La deuxième démarche essentielle est donc de pousser plus loin encore le niveau des meilleures solutions disponibles, que ce soit pour les bâtiments, les véhicules ou l’industrie. Les soutiens de l’Ademe à la recherche et l’innovation, en particulier via les investissements d’avenir, ont pour ambition de faire sauter les verrous technologiques ou économiques qui nous séparent encore du facteur 4.

Quels sont vos moyens d’action ? Comment inciter les politiques à aller dans votre direction et à considérer ces phénomènes dans leurs actions et projets ?
Ce ne sont pas seulement les décideurs politiques que nous voulons inciter à agir. Il est indispensable de pouvoir interpeller chaque habitant sur ses modes de vie, d’accompagner les plus démunis, en situation de précarité énergétique, de mobiliser les acteurs économiques du territoire pour qu’ils agissent. Ce que nous voulons faire, c’est démontrer que chacun a à y gagner. Les territoires qui s’engagent aujourd’hui sur le chemin du développement durable sont ceux qui, demain, auront les meilleures conditions de vie et seront les plus attractifs.

Avez-vous quelques initiatives en tête qui seraient faciles à dupliquer partout et par tous ?
Il y a beaucoup d’initiatives remarquables, et pour les valoriser nous tenons à l’Ademe une rubrique des “exemples à suivre”, disponible sur notre site internet, afin que chacun puisse trouver des réponses concrètes à la question que vous me posez. Pour ma part, je citerais le cas des collectivités qui intègrent systématiquement des critères environnementaux dans leurs divers appels d’offres, car c’est un levier particulièrement puissant de l’action publique.

Finalement, comment concevez-vous le territoire durable idéal ?
Il n’y pas de solution unique, mais une constante dans la méthode. Le territoire durable idéal est celui qui, par la qualité de sa gouvernance, la constance de son engagement, aura obtenu l’adhésion de tous. L’excellence environnementale ne se décrète pas d’en haut, elle se construit avec la contribution de chacun.