Dunkerque se recentre à l’ouest

D’ici trois années, Dunkerque se dotera d’un nouvel équipement dans son quartier ouest, à Petite-Synthe. Cette salle de spectacle, qui s’appuie sur des équipes sportives, sera réalisée à travers un partenariat public/ privé qui regroupe la communauté urbaine de Dunkerque (CU D) et Vinci. D’une capacité de 10 000 places, ce plus grand espace de la Côte d’Opale accueillera, entre autres, le Basket Club maritime (BCM ), historiquement lié à Gravelines, et servira au club dunkerquois professionnel de hand-ball. Un large pan du projet sera également dédié à des surfaces commerciales. Son financement conséquent (entre 112 et 180 millions d’euros) n’a pas (encore) entraîné l’adhésion de l’ensemble des communes de l’agglomération.

Damien Carême, maire de Grande-Synthe et conseiller régional.
Damien Carême, maire de Grande-Synthe et conseiller régional.

 

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La future salle de spectacles sportifs et culturels de Petite-Synthe à Dunkerque.

D.R.L’histoire commence avec le club de basket de Lille qui, en 1922 avec un certain Albert Denvers dans ses rangs, remporte le championnat de France. Quatre ans plus tard, le futur sénateur-maire de Gravelines (de 1947 à 1995 !) prend son poste d’instituteur et fonde un club à Grand-Fort-Philippe, l’AS Huttes, qui connaît un succès foudroyant jusqu’aux portes de la N1. A Gravelines, l’autre club de basket se développe également. Pour augmenter l’impact que peut avoir le basket dans l’ouest dunkerquois, Albert Denvers les fusionne d’autorité. Bertrand Ringot, maire de Gravelines, raconte l’histoire : “Albert a piqué un sponsor à D.R.un club et a amené l’autre à fusionner. Et ça a marché.” Les années suivantes, le club monte régulièrement. La question de l’équipement trotte dans l’esprit des acteurs du club et, en 1986, Sportica avec ses 2 700 places assises est inauguré. En 1987, Gravelines est en Pro A. “Les Américains sont arrivés à cette époque-là”, se souvient le maire actuel. Mais dès les premiers matchs, la salle est pleine. Le potentiel est énorme : “On était installés jusque sur les marches des gradins”, sourit Bertrand Ringot. Albert Denvers prépare alors un nouveau projet de salle mais perd les municipales en 1995 (à 90 ans). Le projet est rangé dans un tiroir, les subventions au BCM s’érodent. En 2001, le BCM profite du soutien de la nouvelle majorité municipale pour rebondir. Hervé Beddelem prend en charge le club après un séjour au Kursaal. En 2005, le club remporte la coupe de France. Côté finances, l’ambiance est au beau fixe : “On a multiplié par quatre nos recettes publicitaires ces années-là”, indique le maire. Dans la décennie, le budget général double avec l’arrivée de la CUD. La ville procède à des travaux de rénovation de Sportica mais la problématique d’un agrandissement s’impose rapidement : “Il y avait de l’habitat proche, la configuration n’était pas bonne”, explique Bertrand Ringot. Sur les terrains de tennis voisins, Gravelines étudie la construction d’une nouvelle salle de 5 000 à 6 000 places. Problème là encore car le manque d’espace pour le parking et la proximité de la centrale nucléaire (directive Borloo) écartent cette possibilité. Finalement, Gravelines hésite sur un investissement de 30 millions d’euros car les soutiens sont rares…

 

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Damien Carême, maire de Grande-Synthe et conseiller régional.

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Bertrand Ringot, maire de Gravelines et conseiller général du Nord.

Du sport, de la culture et un financement élastique. Jusqu’à ce que Michel Delebarre lance l’idée d’un équipement polyvalent. Plusieurs sites sont étudiés et le maire de Gravelines remet Saint- Georges-sur-l’Aa dans le jeu pendant que Damien Carême, maire de Grande- Synthe, soutient le site du Bas-Roch, au pied de l’arrivée

de l’autoroute A1. L’étude de marché révèle que la meilleure zone de flux se situe plutôt dans le quartier de Petite-Synthe, en face de Grande- Synthe. La CUD prend la main dans un dossier qui doit peser plus de 100 millions d’euros. La nouvelle salle
accueillera le BCM et l’US DK de handball mais les cibles pour remplir les 10 000 sièges sont autant culturelles que sportives. Le 5 septembre dernier, Michel Delebarre, président de la CUD, dévoilait le nom du groupement chargé de construire l’Arena, Vinci. La CUD a en effet choisi le projet multidimensionnel du constructeur français : une salle de 10 000 places, une seconde de 300 places, un parking pouvant recevoir jusque 2 500 véhicules, des espaces de réception… La démarche PPP est raisonnée : “Il y a l’argument de la stratégie budgétaire. Nous avons déjà de gros investissements en cours comme à la Halle au sucre, au théâtre. Et faire vivre une salle de 10 000 places, c’est un métier de professionnels”, explique Patrick Chèvre, directeur général des services de la CUD. Mais les chiffres varient. En juillet, on parlait d’un coût d’une cinquantaine de millions d’euros pour la CUD ; au début du mois, le solde à financer, une fois déduites les subventions, avoisinait 75 millions d’euros. L’enveloppe globale est chiffrée à ce jour à 112 millions d’euros. Les subventions attendues restent cependant conséquentes : 30 millions en provenance du Conseil régional, 17 millions de l’Etat, 2,3 millions du conseil général du Nord. D’une manière ou d’une autre, on peut penser que l’Europe sera sollicitée. Il n’empêche : la CUD se met sur les bras un loyer de 6,7 millions d’euros annuel pendant près de 28 ans…

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Patrick Chèvre, directeur général des services de la CUD.

50 000 m² de surfaces commerciales.On attend 2 millions de recettes de l’exploitant. On aurait payé 8,7 millions sinon”, se défend le directeur général des services pour qui le risque est infime car “les exploitants se sont engagés sur une exploitation positive”. Sinon, le coût s’envolera à 180 millions d’euros. Point positif, la CUD ne commencera à payer qu’à l’ouverture de l’espace et pourra aussi compter sur les recettes sportives. “Les recettes du BCM vont doubler au minimum”, souligne Patrick Chèvre. Mais la ville de Gravelines reverra sa participation au fonctionnement du BCM en fonction du nombre de matchs que l’équipe fera à Sportica. La CUD devra donc recapitaliser. “Les chiffres ne seront définitifs que dans quelques semaines. Le loyer pourra être moindre”, conclut Patrick Chèvre. L’autre partie du projet

concerne les espaces commerciaux qui seront édifiés pour l’occasion ; 50 000 m² seront réalisés par le promoteur dunkerquois Beci. A deux pas de l’autoroute A1, ce nouveau centre sera un concurrent direct de celui situé à quelques encablures de là, autour du pôle Auchan de Grande-Synthe (en bordure de l’A16). La commune a développé un nouveau pôle commercial à proximité de l’A1. Mais ses élus n’étaient pas présents lors du vote au conseil communautaire de juillet. Il leur reste la séance du 5 octobre prochain qui votera la délibération finale sur le projet.