Des quartiers de Roubaix respirent à nouveau !

Depuis trois ans, beaucoup de monde se presse du côté du quartier du Pile à Roubaix. Réhabilitation de logements collectifs, créations, redéfinition des espaces, utilisation systématique des techniques et matériaux durables, le Plan régional énergétique trouve là son application ad hoc.

Un chantier va s’ouvrir bientôt au Pile…
Un chantier va s’ouvrir bientôt au Pile…
D.R.

Un chantier va s’ouvrir bientôt au Pile…

Que de thématiques brassées sur un seul et même chantier !

“Vers un urbanisme durable” qui motive la Ville de Roubaix à solliciter une «nouvelle conception et gestion durable des quartiers» ; réhabilitation du parc privé dégradé dans le cadre du PMTQAD via une OPAH au Pile, Moulin, Sainte-Elisabeth et Cul-du-Four ; dynamique climat et objectif “Facteur 4” ; Cap climat aux Trois-Ponts ; PACT Bâtisseurs de solidarité pour l’habitat 4 bis cour Remery à Roubaix ; Schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie, de la réhabilitation énergétique et environnementale du logement ancien ; plan “100 000 logements”…

Ce qui motive l’intervention de ces différents dispositifs publics et leurs relais privés, c’est une seule et même chose : le climat se modifie en Nord-Pas-de-Calais (encadré) comme ailleurs, sous l’effet de l’accumulation des gaz à effet de serre. L’une des façons de lutter contre est d’appliquer à l’habitat, cette fois à Roubaix, toutes les mesures durables possibles et imaginables dans les consommations d’énergie, de nouveaux comportements individuels et collectifs des locataires et propriétaires, l’installation de techniques et matériaux durables, l’utilisation de ressources locales dont l’eau, la réorganisation de l’espace et, bien sûr, la création de nouveaux équipements et de voiries qui n’existaient pas au moment où ces barres d’immeubles ont été érigées voilà environ 50 ans. L’habitat ancien, collectif ou non, est en première ligne.

 

Sur le terrain, les politiques locaux et régionaux, les architectes, urbanistes, sociologues et les autres spécialistes des questions précitées, les entreprises du BTP, les bailleurs sociaux, les cabinets spécialisés, bref les acteurs de la filière réhabilitation durable, se rencontrent et échangent depuis trois ans. Et ce, dans un vaste dialogue avec la population sans le concours de laquelle l’opération périclitera puisque, après avoir rénové et construit, il faudra rendre l’espace aux habitants, charge à eux de l’entretenir et de l’utiliser dans l’esprit dit “durable”.

 

Pour suivre l’évolution de cette vaste intervention visant à diminuer par quatre les émissions de GES d’ici 2020 et d’augmenter de +23% les énergies durables et alternatives, des rencontres ont lieu régulièrement entre les opérateurs, 5 depuis 2007 (Ademe, conseils généraux Nord et Pas-de-Calais et 62, Etat, Région), et les élus locaux dont certains ont créé un Agenda 21. Depuis 2008, le point est fait à Lille Grand-Palais, car chaque année la donne change même si le but reste le même. A certains niveaux d’échange, on est à peine à la sensibilisation au niveau national sur ces questions. A d’autres on passe déjà aux actes avec la réhabilitation thermique et les moyens financiers à employer. A cet égard, tout le monde est d’accord : il faudra à l’avenir trouver d’autres sources de financement de ces programmes que les bonnes vieilles subventions. Sur le terrain dans la région, les situations sont très différentes les unes des autres.

 

Très concrètement, à Roubaix, plusieurs quartiers sont concernés par cette vaste intervention, la principale étant située le long de l’avenue de Verdun. Il s’agit là plutôt d’une reconfiguration de logements qui sont un peu plus performants que les normes par rapport aux précarités énergétiques qu’on constate ailleurs. Trois ans de travaux ont déjà bien amélioré les choses : Vilogia et les ILM, le Pile qui sort de terre, des dispositifs qui ont été mis en place pour aider les habitants démunis de moyens financiers et donc ne pouvant pas investir dans l’isolation de leur logement, un autre programme de transformation de petites maisons. Les choses avancent, même si au niveau des coûts énergétiques et de populations qui y sont très sensibles, la situation s’est aggravée de 25%. Les élus ont donc enclenché de nouveaux dispositifs vraiment alternatifs mais qui supposent des consensus entre différentes obligations : la protection du patrimoine face à certaines nécessités comme comment financer le développement durable. Là, le travail des architectes est complexe et pourtant l’enjeu est dans ces interfaces, trouver des entrées pour résoudre tous les problèmes à la fois.

 

L’écoquartier des Trois-Ponts (en ZUS) , ex-ZUP de 20 hectares (5 000 habitants) à peine à 2 km du centre, est isolé par des boulevards trop grands (effet de muraille). Il a donc fallu créer des pénétrantes. Pendant les cinq ans du PRU (jusqu’en 2014), 799 logements sont détruits (90 M€), 208 réhabilités, 262 reconstruits. Les nouveautés : verdissement omniprésent, nombreux équipements collectifs (petite enfance, un pôle multi-accueil), bonne orientation des bâtiments, priorité à la circulation piétonne, une future ligne de transport en commun haut niveau de service. Ce sera l’un des trois écoquartiers prévus à Roubaix. En “durable”, on y enregistrera des niveaux de performance énergétique élevés comme la liaison au réseau de chaleur urbaine de la ville (le plus important au nord de Paris avec 1 105 000 MWh) qui a demandé la construction d’une chaufferie à bois qui fournira plus de 60% de la chaleur à partir de la biomasse et permettra de réduire de 50% les GES. Sans oublier la gestion préventive des eaux pluviales, la priorité aux essences végétales locales, aux modes doux, à la mixité sociale. Certaines performances iront au-delà du BBC rénovation avec 80 kWh/m2/an.

 

Exemple d’intervention sur un immeuble réouvert en mars 2011 par VilogiaC’est le premier équipement, en fait deux immeubles, a être terminé dans ce vaste quartier, il est préfiguratif et… respecté par les habitants. Pour les 132 logements réhabilités à partir de 2009, il a fallu revoir l’enveloppe extérieure et l’étanchéité, augmenter la performance énergétique et poser des panneaux solaires (80 m2 par bâtiment). Il y a eu volonté de résidentialisation avec privatisation et sécurisation (gros travail sur l’électricité, les VMC et les ascenseurs). Les loyers ont augmenté de 19% mais l’économie est en fait de 9% si l’on intègre les charges qui chutent. La performance énergétique est de 80 kWh au lieu de 240, après 18 mois de travaux. Ces immeubles étaient bien conçus, donc les travaux ont été simplifiés, et chaque intervention sur un logement a coûté moins de 48 000 €. Ainsi, 640 000 € ont été globalement investis. Le taux de couverture durable en eau chaude atteint les 45 à 60%. La Ville de Roubaix veut garantir ces résultats avec les professionnels et accompagner l’usager car, quand il sera propriétaire, il sera seul à devoir tout gérer.

 

D’autres interventions ont lieu dans des quartiers anciens. Concernant le pôle d’appui Nouveau-Monde (quartier Nord), LMCU a été sollicité pour permettre la maîtrise foncière des sites identifiés. Depuis 2007, quatre conventions publiques d’aménagement sont opérationnelles à Crouy, Carnot/Pile, Watt/Epeule et Nouveau-Monde, une en cours à Alouette/Espérance et deux en projet quai de Marseille et Sainte-Elisabeth. Trois missions de maîtrise d’œuvre urbaine sont lancées via des groupements de cabinets pour les quartiers nord, ouest et est. Pour tous, il sera demandé de restructurer les cahiers des charges de prescriptions urbaines, architecturales, paysagères et environnementales. Sont présents LMH (Lille Métropole habitat), le groupe CMH-logiciel et Partenord habitat. De plus, la cour Remery, îlot dense de plusieurs courées avec 98 logements, sera repositionnée sur la rue de Lannoy et intégrée dans la réhabilitation qualifiante précitée avec maintien de sa vocation sociale îlotière, le tout dans le cadre du PACT.

 

D.R.

La maquette des 3 Ponts donne une idée de l’ampleur du chantier.

 

 

 Le constat 2012 de l’Observatoire climat Nord-Pas-de-Calais

 

Le climat change chez nous et pourtant l’Ademe et la Région déplorent que sur les 22 zones constituant la région, 3 n’aient toujours pas signé le Schéma régional climat. Si certains politiques nient encore la dégradation climatique et la nécessité d’agir dans leurs territoires, l’OC a publié en 2012 un rapport éloquent (disponible au Cerdd de Loos-en-Gohelle − www.cerdd.org)

 

  • les évolutions climatiques sont significatives : hausse des températures moyennes, des précipitations, élévation du niveau marin avec modification du trait de côte, risque accentué de catastrophes naturelles, arrivée de nouvelles espèces florales, dépendance confirmée des variations climatiques et phénologiques, baisse des populations d’oiseaux.

 

  • Baisse des GES : bilan mitigé car contrasté, augmentation des consommations d’énergie (industrie en tête), flambée de la facture énergétique, modestie des énergies renouvelables, réseaux de chaleur peu développés, évolution de l’occupation des sols à mesurer, baisse des émissions d’origine industrielle, moins d’utilisation des énergies carbonées, baisse de l’efficacité énergétique, sensibilité forte au coût de l’énergie, pic des GES en 2002, véhicules moins émissifs mais plus nombreux, report modaux des voyageurs mais baisse du fret.

 

  • Dans le bâtiment : hausse des émissions, idem dans le résidentiel car développement du parc, un parc bâti en mauvais état, peu de réhabilitations.

 

  • Stabilisation des flux de déchets ménagers.