Des buffles pour pratiquer l’écopâturage
Le petit paradis naturel de 1 000 hectares du Domaine du Marquenterre accueille désormais 50 buffles. Ils sont idéaux pour pratiquer l’écopâturage.
S’étendant sur 1 000 hectares, le Domaine du Marquenterre est bordé par le célèbre parc ornithologique, la baie de Somme et le front de mer. C’est un joyaux naturel composé de marais, de dunes, de prairies et de futaies de pins façonné par la famille Jeanson dans les années soixante. « Le tas de sable est devenu forêt, raconte avec humour Hugues Chevallier, régisseur du domaine. L’agriculture a toujours eu sa place au domaine. En effet, la culture de buffles, entre autres, a occupé la famille Jeanson pendant des années. Son développement s’est fait grâce à l’implantation d’espèces exotiques, tant floristiques avec le pin Laricio de Corse que faunistiques avec le mouflon Méditerranéen. »
Complémentaires des mythiques mouflons
Encore aujourd’hui, sa gestion quotidienne demande un travail
important pour gérer les différents espaces naturels uniques et
fragiles. Afin de limiter la mécanisation et réduire la fermeture des
milieux naturels, la direction du Domaine du Marquenterre a misé sur des
bovins un peu particuliers. « Nous avons décidé d’implanter une espèce exotique elle aussi, poursuit le régisseur.
Il s’agit du buffle d’eau originaire d’Asie. Ces bovins sont très
adaptés aux milieux humides, leurs sabots sont larges et ils doivent se
baigner quotidiennement en période estivale. L’aventure a commencé en
toute discrétion en 2021 avec deux bufflonnes. Le cheptel compte
aujourd’hui 50 têtes. Au total, 20 bufflons sont nés en été 2023. Notre
troupeau est actuellement un des plus grands troupeaux du Nord de la
France. »
Le régisseur assure que depuis leur arrivée, les milieux naturels tant herbacés qu’arbustifs ont connu un rajeunissement car la forêt du Marquenterre était jusqu’alors uniquement pâturée par le mouflon, « icône sauvage de la zone dunaire ». « Les années de pâturage par ces ovins sauvages avaient laissé certaines herbes proliférer et se réduire à l’état de pelouses dunaires, précise Hugues Chevallie. En effet, ces petits ongulés ruminants ne consomment qu’une partie du panel d’herbes qui poussent dans notre écosystème. L’arrivée des buffles a permis de pâturer l’intégralité de la végétation pour la renouveler et enrichir les milieux naturels existants tant sur le plan floristique que faunistique. Les buffles ne mangent pas les mêmes herbes que les mouflons, leur arrivée a permis d’homogénéiser le pâturage et de voir réapparaitre de nouvelles essences asphyxiées par des plantes invasives depuis des années. »
Enrichissement du milieu
Autres avantages : le piétinement des zones marécageuses permet de rouvrir des mares inondées depuis des années par la végétation, les bouses permettent un engraissement naturel des zones sableuses composées essentiellement d’essences pionnières et le buffle participe activement à l’enrichissement du milieu. « Leur arrivée a aussi eu un impact très positif sur la fréquentation des oiseaux dans les zones plus ouvertes présentant de la visibilité par rapport aux prédateurs », ajoute Hugues Chevallier.
Les buffles sont répartis en trois troupeaux : femelles suitées, taurillons et génisses. Dans chacun, un buffle porte une cloche afin de retrouver le troupeau dans les méandres végétaux. Ces troupeaux changent régulièrement de zones géographiques et passent simultanément des herbages aux marais, aux zones forestières en fonction des saisons et des réserves alimentaires. Les animaux sont en permanence dehors et leur densité à l’hectare est très faible, une pratique proche du modèle Argentin ou Australien.
« Le domaine a une personne dédiée à cet élevage qui demande un suivi quotidien, ajoute t-il. C’est un animal très câlin qui aime le contact avec l’homme. Les clients sont impressionnés de voir leur silhouette atypique et préhistorique. En effet, dans cet univers magique et seul au monde, nous accueillons des entreprises, des familles et des amoureux de nature en tous genres à pied, en vélo, à cheval… Des sorties guidées à pied ou en voiture électrique à la découverte de la faune, de la flore, des points de vue uniques et des édifices de la seconde guerre mondiale sont aussi organisées. »
Depuis quelques semaines, trois buffles ont élu domicile dans la ferme pédagogique qui s’étend sur dix hectares et compte aussi chèvres, moutons, poneys, cochons, poules, ânes.… Ces buffles se baignent dans la mare du restaurant la Garinière. Les clients peuvent les admirer depuis la terrasse du restaurant La Garinière ou des chambres de l’hôtel du Marquenterre. Le domaine, qui emploie une trentaine de salariés selon la saison, compte aussi 18 lodges familiaux.
À partir de juin, leur viande sera servie dans les assiettes du restaurant. « Un circuit court du pré à l’assiette avec une viande originale et délicieuse à venir découvrir le midi ou le soir, prévoit Hugues Chevallier. La prochaine étape pourrait être la production de lait pour produire : beurre, yaourts, mais surtout la fameuse mozzarella très appréciée en France. C’est un projet à l’étude qui aurait tout son sens pour des dégustations savoureuses en circuit court. »