De la sensibilisation à l’accessibilité aux bâtiments et à l’emploi

Créée en 2009, la Mission "handicap" du Centre de gestion de la Fonction publique territoriale du Nord sensibilise, conseille et accompagne les employeurs publics, collectivités territoriales et établissements publics, dans leurs démarches d’insertion des personnes souffrant d’un handicap. Entretien avec Céline Wambeke, responsable de cette mission.

De la sensibilisation à l’accessibilité aux bâtiments et à l’emploi
D.R.

La mission handicap du Centre de gestion de la Fonction publique territoriale du Nord dont la responsable est Céline Wambeke (à droite).

 

La Gazette. Pourquoi une Mission “handicap” au CDG59 ?

Céline Wambeke. La création de la Mission “handicap” au sein du pôle prévention du Centre de gestion de la Fonction publique territoriale du Nord trouve son explication dans la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées. Cette loi oblige les employeurs publics à recruter 6% de leurs effectifs en travailleurs handicapés. En engageant la notion de compensation du handicap, la loi a instauré un nouveau principe qui ne met plus en avant la personne porteuse d’un handicap, mais la situation qui rend la personne handicapée. Une fois cet environnement compensé, c’est-à-dire aménagé, toutes les inaptitudes de la personne souffrant d’un handicap sont gommées. C’est dans ce cadre qu’a été créé le FIPHFP (Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la Fonction publique), avec qui le CDG59, à l’initiative de son président, Marc Montuelle, a signé en 2009 une convention pour démultiplier ses actions auprès des employeurs publics territoriaux et les accompagner dans leurs réponses aux obligations de la loi. La Mission “handicap” représente le FIPHFP dans le département du Nord. 

Quelle est sa fonction ?

Elle a quatre volets. Le rôle de la Mission est d’abord d’informer, de sensibiliser et de répondre à toutes les questions des employeurs publics à travers les territoires sur le handicap, le recrutement, les aides du FIPHFP. Elle a aussi un rôle de facilitatrice du recrutement et de l’accès à l’emploi public en partenariat avec Cap emploi, réseau national d’organismes de placement pour personnes handicapées qui est une branche de Pôle emploi. Le troisième volet, c’est le maintien dans l’emploi par le développement de toutes les possibilités en interne d’aménagement des postes de travail de l’agent, qu’il soit déjà en poste ou en anticipation de son recrutement. Qui dit maintien dans l’emploi dit aussi le développement des stratégies de reclassement et de réorientation professionnelle pour les personnes qui ne sont plus aptes au poste. Le quatrième et dernier volet, c’est l’apprentissage aménagé pour lequel le Centre a été pilote ces trois dernières années. L’expérimentation a connu des résultats très favorables et probants au point que désormais l’ensemble des autres centres de gestion qui conventionnent ou renouvellent leur conventionnement avec le FIPHFP ont cette mission de développement de l’apprentissage aménagé dans le socle commun de leurs missions. 

Quel est le public concerné ?

Le constat est que les personnes en situation de handicap sont très peu diplômées, ont un parcours professionnel très clairsemé parce qu’elles sont sujettes à des rechutes, des hospitalisations, des maladies tardivement décelées. Elles sont en moyenne assez âgées, de l’ordre de 40/45 ans. Le public Cap emploi est essentiellement composé de personnes qui ont eu un ancien travail et sont donc en reconversion professionnelle. Leur problématique est la qualification, l’accès à un diplôme et à un parcours de réorientation professionnelle. Nous travaillons à leur trouver une structure ou un centre de formation qui les aidera à retrouver un emploi en adéquation avec leurs aptitudes physiques, psychologiques, voire psychiques. Pour améliorer la connaissance qualitative de cette population, le centre de gestion va à partir de janvier 2013 mettre en place un observatoire du handicap et de l’inaptitude avec la Fédération nationale des centres de gestion. 

Quelles actions menez-vous ?

Partie prenante du centre de gestion, la Mission organise pour les employeurs publics des réunions collectives et individuelles dans chacun des six arrondissements du département sur des thématiques comme le recrutement, le maintien dans l’emploi, le FIPHFP, la déclaration annuelle, ou en réponse à des demandes spécifiques des collectivités qui souhaitent sensibiliser leurs agents sur une thématique particulière, le handicap visuel, le handicap psychique, etc. Sur les sollicitations individuelles des collectivités, la Mission va jusqu’à engager des études si besoin.

Sur le recrutement, la Mission est présente sur les forums, les job datings et les salons. Elle conseille et oriente les demandeurs d’emploi sur les concours, les modalités de recrutement et les métiers proposés dans la fonction publique… Pour le maintien dans l’emploi, une psychologue du travail et une conseillère accompagnent individuellement les agents et les employeurs, du diagnostic à la mise en œuvre des solutions en passant par la constitution des dossiers d’aides financières sur la plate-forme du FIPHFP.

A quels critères répondent ces aides ?

Les employeurs publics ont la possibilité de se faire rembourser tout ou partie des dépenses engagées pour favoriser l’insertion de travailleurs handicapés. Le FIPHFP a constitué un catalogue assez ouvert et diversifié d’aides qu’ils peuvent solliciter. Ces aides répondent vraiment aux problématiques du handicap.

Les situations prises en compte par le FIPHFP sont plus larges que celles retenues pour la reconnaissance administrative de la qualité de travailleur handicapé, la RQTH que délivre la Maison départementale des personnes handicapées du Nord. Le FIPHFP a élargi ses interventions aux cas de personnes qui n’ont pas la RQTH, mais à qui, après visite médicale, le médecin reconnaît un certain nombre de restrictions d’aptitudes, par exemple dans le cas de hernie discale qui peut nécessiter un aménagement ergonomique particulier du poste de travail.

L’essentiel du travail de la Mission porte sur la démystification du handicap et la levée des préjugés. Sans être spécialiste du handicap, elle interagit comme un cabinet de consultant. Pour être financée par le FIPHFP, ses conseils et accompagnements sont totalement gratuits pour toutes les collectivités, qu’elles soient ou non affiliées au CDG59.  La clé de la réussite du travail sur le handicap, c’est l’entraide, l’échange de réseaux, le maillage d’un partenariat avec toutes les structures qui œuvrent dans ce sens du point de vue local. Seule sur le handicap, la Mission ne peut rien faire, le CDG59 isolé pas davantage, mais le CDG rattaché au FIPHFP, aux centres de formation, aux structures d’emploi, aux missions locales, toutes ces structures permettent de répondre aux besoins et obligations des employeurs. 

Avec quels résultats ?

Le taux d’emploi légal des travailleurs handicapés dans les trois fonctions publiques en Nord-Pas-de-Calais au 1er janvier 2010 était de 5,37% et de 5,39 dans le département du Nord, chiffres issus des déclarations 2011. Sur les trois ans qu’a duré la première convention signée avec le FIPHFP de juillet 2009 à juillet 2012, la Mission a sensibilisé 1 500 personnes, contribué à plus de 650 placements de travailleurs handicapés dans la Fonction publique, tous types de contrat confondus, avec le concours de Cap emploi, réalisé 397 études de maintien dans l’emploi et participé au recrutement de 51 apprentis en situation de handicap. La Mission a dépassé les objectifs attendus par le FIPHFP. Sur les 969 communes affiliées au CDG59, 269 sont assujetties à l’obligation des 6% car elles emploient plus de 20 agents équivalents temps plein.

La convention avec le FIPHFP a été reconduite ?

 Elle a été signée en juillet pour enchaîner sur une nouvelle période de trois ans jusqu’en 2015. La Mission repart sur le même socle de missions auquel s’est rattaché le dispositif d’aides décidé par le FIPHFP en faveur de l’accessibilité des locaux professionnels. Cette nouvelle mission répond à la nécessité d’aménager de façon globale et complète pour tous types de handicap, accessibilité, mais aussi visuel, auditif, psychique et moteur, les locaux, qu’ils soient professionnels à usage unique des agents territoriaux ou espaces publics. Ces aides ne ciblent que les établissements communaux, mairies, ateliers municipaux, annexes de mairie, hors espaces culturels ou d’enseignement. Seule est différenciée la prise en charge, jusqu’à 50% pour les usages mixtes et 100% pour les usages professionnels dans la limite de plafonds par seuil d’effectifs.

Les objectifs assignés à cette deuxième convention, c’est les 6% d’obligation, au moins 400 maintiens dans l’emploi. C’est continuer sur l’apprentissage avec au moins 25 apprentis. C’est continuer de pouvoir répondre de façon au moins aussi qualitative à la demande des employeurs tout en développant de nouvelles actions comme l’accessibilité. Il faut que l’ensemble des employeurs publics prennent conscience du handicap et l’intègrent de façon globale dans une thématique transversale à la totalité des champs visés par les collectivités, des marchés publics à l’accueil du public.

Si le rôle des collectivités, c’est de répondre à des obligations d’emploi, celui de la Mission “handicap” du Centre de gestion est aussi de s’adapter aux évolutions sociétales. Pour preuve, la transformation prochaine de son appellation en Mission d’accessibilité et de maintien à l’emploi pour une meilleure prise en compte des problématiques de santé au travail et de gestion de l’inaptitude plutôt que de se restreindre à ne parler que du handicap, très stéréotypé et stigmatisant. Notre mission s’en trouve élargie à l’accessibilité au sens des bâtiments et de l’emploi.