Medef de Meurthe-et-Moselle

De l’optimisme combatif...

Président du Medef de Meurthe-et-Moselle, réélu en septembre dernier pour un deuxième mandat, Gilles Caumont, ingénieur de formation et fondateur d’Adista, l’un des majors du secteur de l’IT, il y a plus de quarante ans, affiche un optimisme raisonné malgré une conjoncture plus que complexe. Détonnant et rassurant !

(c) Guillaume Ramon. «2025 va être compliquée. Il est indispensable de retrouver une certaine stabilité politique, cela risque d’être délicat si la durée de vie d’un gouvernement ne dépasse pas les trois mois», assure Gilles Caumont, le président du Medef de Meurthe-et-Moselle
(c) Guillaume Ramon. «2025 va être compliquée. Il est indispensable de retrouver une certaine stabilité politique, cela risque d’être délicat si la durée de vie d’un gouvernement ne dépasse pas les trois mois», assure Gilles Caumont, le président du Medef de Meurthe-et-Moselle

Il prend un petit chocolat avec son café, une petite douceur par les temps qui courent cela ne peut pas faire de mal ! Dans un des salons d’accueil du paquebot de la Maison de l’Entreprise sur le site Saint-Jacques de Maxéville, Gilles Caumont, le président du Medef de Meurthe-et-Moselle est encore un peu dans l’interview express (trois minutes montre en main) qu’il vient de donner en ce début décembre sur le plateau de nos confrères de France 3 Lorraine pour répondre sur le sujet de la situation économique régionale. Pas un scoop, elle est loin d’être au top. 

«C’est la conséquence de toutes les crises que l’on subit depuis quatre ans. Celle de la Covid-19, de la guerre en Ukraine et dernièrement l’inflation face à laquelle la Banque centrale européenne (BCE) a augmenté significativement les taux pour ralentir l’économie. Cela a plutôt réussi, l’économie de la France et de l’Europe sont en berne et cela semble aller de mal en pis.» Mais il y a (et oui, c’est possible) plus grave . «À la différence des autres périodes difficiles que nous avons traversées, notamment au début des années 2000, c’est que personne ne voit réellement d’issue. Bon nombre de chefs d’entreprise ont tout arrêté, investissement, recrutement.» 

À cela on ajoute les épisodes de la dramaturgie politique, élections européennes, dissolution de l’assemblée nationale, vote de la censure du gouvernement Barnier (à l’heure où l’entretien a été réalisé, la motion de censure n’avait pas encore été votée : NDLR), un climat social à la limite de l’explosion, le tableau est loin d’être multicolore.

Adaptation continue

«2025 va être compliquée. Il est indispensable de retrouver une certaine stabilité politique, cela risque d’être délicat si la durée de vie d’un gouvernement ne dépasse pas les trois mois.» La solution  ? «L’adaptation comme d’habitude, les chefs d’entreprise savent faire, dans une optique positive. L’optimisme, c’est un choix, une décision de comportement. Le pire n’est jamais sûr  !» 

Une adaptation rendue possible si une réelle solution politique est trouvée loin des querelles partisanes. «J’aime assez la phrase de l’ancien premier ministre britannique Tony Blair qui affirmait qu’il n’y avait pas de politique de gauche ou de politique de droite mais qu’il n’y avait que des politiques qui réussissent et celles qui échouent», assure celui qui a été réélu en septembre dernier pour un deuxième mandat à la tête du mouvement patronal meurthe-et-mosellan. Un engagement, de nouveau pour l’homme qui a sa carrière de chef d’entreprise derrière lui. Fondateur d’Adista, en 1981, l’un des majors aujourd’hui dans le secteur de l’IT (qui devrait réaliser de nouveau prochainement deux opérations de croissance externe) racheté par Equistone puis par Keensignt Capital, il a peu à peu laissé les rênes opérationnelles tout en restant au conseil de surveillance. «Cela me permet aujourd’hui de tenter de redonner un peu de ce que j’ai reçu et de partager une certaine expérience.» Au sein du Medef et auprès de ses adhérents mais d’une manière générale à l’écosystème entrepreneurial local. Un ADN affiché pour cet ingénieur de formation. Il y a dix ans, avec trois compères, il lance Yeast, le réseau régional de Business Angels, pour épauler des start-up et entreprises prometteuses, le réseau compte aujourd’hui une quarantaine d’entrepreneurs investisseurs.

(c) Emmanuel Varrier. La Maison de l’Entreprise de Maxéville sur le site Saint-Jacques abrite le Medef de Meurthe-et-Moselle mais également le Medef Grand Est.


Pour une école de chefs d’entreprise

«L’investissement financier est une chose mais nous fournissons également notre expérience, nos compétences, du réseau et du conseil pour leur permettre de faire les bons choix.» Et surtout insuffler au tissu économique local et régional, une dynamique de développement à l’image de l’association Lorn’Tech (devenue French Tech Est) de soutien aux start-up qu’il a cofondée. Même approche au sein du mouvement patronal qu’il préside. 

«Il faut aider nos adhérents à appréhender les 360°C du métier d’entrepreneur. Il faut les faire monter en compétences, éveiller les esprits, échanger sur les enjeux et opportunités qui touchent directement leurs activités à l’image du numérique, de l’écologie ou encore de la transition technologique.» Afterwork, soirée dite de décryptage en passant par l’accueil d’événements nationaux, à l’image du récent Tour de France de l’Intelligence artificielle à la mi-novembre, Gilles Caumont et son équipe (une petite dizaine de permanents) ont développé des séries d’outils collectifs tout en conseillant et aiguillant sur des cas particuliers. Pour l’année qui vient de débuter, et vu le contexte général où la résilience et l’adaptation seront de mise, l’artillerie devrait être renforcée. 

«Nous travaillons sur un concept d’école de chefs d’entreprise. Le métier d’entrepreneur est intrinsèquement complexe. Cette école, dont nous n’avons pas encore défini le nom, sera un genre de club sur des cycles de vingt-quatre mois où une dizaine de dirigeants se retrouveront une demie journée par mois autour d’un sujet et d’un expert sur les domaines qu’ils se doivent d’intégrer en tant que chef d’entreprise histoire de pouvoir se projeter dans les cinq ans.» Former les chefs d’entreprise pour les mettre en «mode combatif», comme l’assure Gilles Caumont. 

«Le principe même d’un entrepreneur, c’est d’accepter le risque ! Même si avec le contexte actuel, personne ne sait réellement où l’on va, il ne faut pas arrêter de prendre des risques.» Autre chantier, et pas des moindres, «tenter de combler le vide entre le monde de l’Université et celui de l’entreprise.»

Préparer le coup d’après

Dans la région, l’Université de Lorraine y est pleinement engagée notamment via Polaris, le Pôle universitaire d’innovation de Lorraine (faisant partie des vingt-quatre Pôles universitaire d’innovation identifiés dans l’Hexagone). 

«L’écosystème local est favorable mais il n’existe pas encore assez de synergies et il faut également identifier les véritables besoins de nos entrepreneurs, répondre à ce qu’ils demandent réellement pour améliorer leur compétitivité et assurer leur développement.» Exemple typique avec le projet Enact du Centre européen en intelligence artificielle par l’innovation, porté par l’Université de Lorraine, lauréat à l’appel à manifestation d’intérêt «IA cluster» visant à impulser la technologie de l’IA. 

«Nous sommes partie prenante de ce programme mais il va falloir des solutions pratico-pratiques pour les entrepreneurs. L’IA fait aujourd’hui partie de la conduite du changement au sein des entreprises. Ce qui entraîne une adaptation en matière de management et de formation au niveau des compétences des équipes. Il faut que nos entreprises s’approprient l’Intelligence Artificielle! Il faut la voir comme une opportunité. Demain, il y aura celles qui ont pris le virage et les autres.» 

Un message que le président du Medef de Meurthe-et-Moselle tente de porter à ses troupes tout comme celui, beaucoup plus large et notamment à destination des décideurs politiques, de la «nécessité de remettre rapidement en place une véritable culture économique. Elle n’existe pas ou peu.» Histoire de compléter ce que les instances nationales du Medef ont mis en place, un Front économique composé de chefs d’entreprise, d’économistes pour éclairer les décideurs sur les réalités du terrain, le Medef de Meurthe-et-Moselle a décidé d’aller plus loin en lançant cette année les Journées du patrimoine économique (voir encadré). 

Dans la même optique, Gilles Caumont assure «préparer le coup d’après, car un mandat de quatre ans, c’est court» avec le lancement il y a un peu moins d’un an (en février 2024) du Comex 40 de Meurthe-et-Moselle. «C’est un groupe d’une quinzaine d’adhérents qui sont des entrepreneurs de moins de 45 ans. Ils réfléchissent sur les enjeux sociaux, sociétaux, environnementaux et anticipent leurs impacts sur les entreprises.» Présidé par Alexandra Colin d’Acoris Mutuelles et Pierre Pisterman de l’industriel HPP, il incarne, pour Gilles Caumont, «le Medef de demain.» La relève est assurée…

Des Journées du patrimoine économique…

JPE pour Journée du patrimoine économique ! Le Medef de Meurthe-et-Moselle entend lancer, en lien notamment avec le rectorat, ce concept dès cette année sans doute au mois de septembre. Objectif : «ouvrir les portes des entreprises au public pour qu’il découvre leur fonctionnement et leur contribution à la richesse collective histoire de démystifier l’image de l’entreprise», comme l’assure Gilles Caumont, le président du Medef de Meurthe-et-Moselle.