Culture et Restauration
Mettre la Culture à la portée de tout le monde ! C’est la philosophie affichée de Daniel Spagnolo, le créateur de l’Oreille est Hardie du côté de la rue Saint-Dizier à quelques encablures de la place des Vosges à Nancy. Un Café-Librairie bienvenu en ces temps où les produits culturels sont mis à mal, victimes de la surconsommation.
L’Oreille est Hardie : culturellement bon…
Le café est offert de bon coeur, corsé mais avenant tout comme celui qui vient de le servir. D’instinct le visiteur prend place sur un tabouret de bar devant un zinc design mais pas clinquant. L’option de s’installer sur le canapé adjacent près d’une table basse accueillant de bons vieux vinyles aux microsillons nostalgiques est tentante, si bien que l’on se sent un peu comme chez soi au coeur de l’Oreille est Hardie du côté du 157 rue Saint-Dizier à Nancy. Une nouvelle adresse à 50 mètres de la place des Vosges «où la Culture est à portée de tout le monde», assure Daniel Spagnolo, le créateur du lieu entre deux mises à jour de son compte Facebook (faut bien être dans l’air du temps). Un café-resto rapide, librairie et plus si affinités presque unique dans la cité ducale. À l’heure où la musique se consomme plus qu’elle ne s’écoute, que les films sont streamés plutôt que réellement regardés, que les livres sont pilonnés dans des cimetières à bouquins quand ils sont invendus et juste bon à être recyclés en pâte à carton, toutes ses oeuvres oubliées et parfois méprisées se retrouvent dans cet havre de culture partagée comme une résistance face à une machine de guerre culturelle, apanage aujourd’hui d’une élite lobotomisée aux discours surfaits. Certains irréductibles, défenseurs du partage et de l’échange osent encore se lancer dans l’aventure, tels des croisés des temps modernes à la parole fédératrice.
Pas de vieilleries… de l’occasion
À 46 ans, Daniel Spagnolo fait partie de la tribu de ces «cultivés-partageurs » bien loin des «cultivés-rampants ». Le Jazz, la littérature américaine, le cinéma asiatique sont ses dadas, mais le patron des lieux fournit le meilleur des bouquins, des vinyles, des CD et DVD «tous d’occasion mais pas des vieilleries.» Tous les styles, tous les prix, une offre riche et hétéroclite, enivrante et captivante. Un vrai voyage culturel apaisant. Une halte où le voyageur urbain peut étancher sa soif, apaiser son appétit du moment en choisissant une formule «sandwich-soda». L’Oreille est Hardie est un lieu hybride, vitrine du savoir-faire et savoir être de son créateur. Ancien transporteur, salarié puis patron de feu Compact Boutique dans la même rue (temple au début du siècle du CD d’occasion). «La crise du disque et des produits culturels l’a tué.» Un autre mal le frappe en son corps même, une scoliose dégénérative antalgique. Soutenu, notamment par l’Agefiph (Association de gestion du fonds pour l’insertion des personnes handicapées), il monte alors son projet. Pas du genre larmoyant, plutôt battant et serein, posé mais déterminé, son affaire tourne depuis début décembre dernier et n’attend qu’à décoller. Le lieu, le concept valent le détour tout comme l’homme et un thé à 1,50 euro en plein coeur de Nancy, qui dit mieux ?