Cinébébé, où l'on fait les bébés hyperréalistes de vos films et séries

La pointe de la longue aiguille entre et sort du crâne du bébé: Céline Lallement, technicienne d'atelier, vient de débuter un marathon de plusieurs jours pour implanter un à un les cheveux de ce poupon...

Une technicienne d'atelier implante de la laine pour simuler une chevelure sur de faux bébés en silicone dans les locaux de l'entreprise Cinébébé, le 27 janvier 2025 à Saint-Denis, près de Paris © Julie SEBADELHA
Une technicienne d'atelier implante de la laine pour simuler une chevelure sur de faux bébés en silicone dans les locaux de l'entreprise Cinébébé, le 27 janvier 2025 à Saint-Denis, près de Paris © Julie SEBADELHA

La pointe de la longue aiguille entre et sort du crâne du bébé: Céline Lallement, technicienne d'atelier, vient de débuter un marathon de plusieurs jours pour implanter un à un les cheveux de ce poupon de 3 mois, dernière création de Cinébébé.

Cette entreprise, créée en 2008 et installée à Saint-Denis, en banlieue parisienne,depuis 2023, est l'une des seules au monde spécialisées dans la création de bébés en silicone hyperréalistes pour des tournages de films ou de séries.

"C'est du mohair, ça vient de la chèvre angora. C'est plus fin que les cheveux des adultes, donc ça imite très bien les cheveux des bébés", explique en cette fin janvier Céline Lallement, qui pique et repique. Soudain, elle repère un "poireau". "Il y a deux cheveux dans un même trou, ça ne va pas", dit-elle avant de prendre une pince à épiler pour corriger cela. 

Le dernier-né de Cinébébé est destiné à un tournage en Angleterre d'ici quelques jours, selon Justine Ray Le Solliec, co-gérante de cet atelier d'effets spéciaux avec Julie Barrère. 

Rougeurs sur les joues, petites veines apparentes sous les paupières, plis et pores de la peau, le réalisme de ce nourrisson est saisissant. 

"Il faut compter dans les 700 euros pour la location d'un bébé pour un jour de tournage et entre 9.000 et 15.000 euros pour l'achat, en fonction du temps de travail qui peut aller jusqu'à un mois et demi si on part de zéro", précise la dirigeante.  

Du prématuré de 26 semaines au bébé de 18 mois, une cinquantaine de mannequins miniatures ultra-réalistes sont disponibles à la location, selon les besoins des tournages, du film "Le Comte de Monte-Cristo" à la série "Emily in Paris", en passant par "Titane" ou "The Pod génération". 

A partir de photos, une sculpture de la tête du bambin est créée par l'équipe pour faire des moules dans lesquels sont réalisés des "tirages" en silicone. 

Une centaine de productions par an

"En France, la réglementation interdit de faire participer à un tournage un nourrisson de moins de 3 mois. Entre 3 mois et 3 ans, le temps de prise de vue est limité à une heure par jour. Ce qui peut être compliqué lorsqu'il y a de nombreuses scènes avec des enfants", décrypte Justine Ray Le Solliec. 

Outre la réglementation, depuis les différents confinements en 2020 et 2021 liés à la pandémie de Covid-19, leur activité a connu une accélération. "Cela nous a aidés car il ne pouvait pas y avoir de bébé sur les plateaux de tournage durant cette période", ajoute-t-elle. 

Leur chiffre d'affaires post-pandémie a doublé tous les ans, avec un "léger ralentissement" en 2024 par rapport à 2023 avec 35% de croissance, selon la dirigeante qui indique avoir "atteint un plafond en France" et souhaite s'installer à Londres en 2025 pour se développer à l'international. 

Ces dernières années, "on tourne à une centaine de productions par an en France et en Europe mais on passe plus de temps sur chaque projet, avec l'activité de conseil, donc ça fait plus de chiffre d'affaires".  

Car outre des bébés et autres ventres et poitrines de femmes enceintes, placentas, fœtus, cordons ombilicaux, Cinébébé propose des bassins de femmes pour pouvoir filmer des scènes d'accouchement de face, des conseils lors de l'écriture du film et une assistance aux comédiens sur le tournage pour que la scène soit la plus réaliste possible à l'écran. 

"On travaille nous-mêmes avec le milieu médical qui nous conseille, notamment avec l'association Néo'Sens basée à l'hôpital de Port-Royal (à Paris, NDLR), spécialisée dans les prématurés", fait savoir Justine Ray Le Solliec. 

Pour 2025, l'objectif est également de développer des bébés avec les yeux ouverts, un défi en termes de réalisme, et des poupons plus grands pour des scènes de cascade, conclut la dirigeante. 

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