Chantelle conforte la reprisede Desseilles

L’industrie dentellière n’est pas morte. Contrairement à Lejaby, Chantelle se porte mieux et cultive tant bien que mal sa spécificité avec des fournisseurs de luxe comme Desseilles Laces. Le 2 février, la PME a accueilli – c’est une première à Calais – toute l’équipe de création du plus grand linger-corsetier français. Cet événement marque un renouveau pour Desseilles, encore en grande difficulté l’été dernier avant son rachat par ses cadres, appuyés par deux dentelliers caudrésiens. Récit d’une renaissance.

Jean-Louis Dussart, directeur général de Desseilles Laces.
Jean-Louis Dussart, directeur général de Desseilles Laces.

 

Jean-Louis Dussart, directeur général de Desseilles Laces.

Jean-Louis Dussart, directeur général de Desseilles Laces.

Mise en liquidation judiciaire au milieu de l’été dernier, l’entreprise Desseilles renaît de ses cendres depuis la reprise par ses trois cadres dirigeants, Jean-Louis Dussart, Gérard Dezoteux et Michel Berrier. L’actionnaire letton Lauma ne souhaitait plus poursuivre l’aventure calaisienne après plus de deux ans de difficultés consécutives qui l’ont amené à injecter 200 000 euros par mois dans la trésorerie déficiente de Desseilles, de plein fouet dans la crise. Dans le même temps, Lauma voyait également fondre son activité de moitié et se séparait de 500 personnes sur 1 000. Pourquoi alors reprendre une PME dans un environnement si instable ? “Pour moi, c’est l’inflexion du marché au niveau des mouvements des clients et de la mode. C’est une opportunité avec des risques modérés. L’une des raisons, c’est qu’on pouvait changer la structure de Desseilles, répond Jean-Louis Dussart. Les clients ont fait le tour de l’Asie et ils en reviennent. Il y a d’autre part une massification de la dentelle avec des armées de machines et des produits qui se ressemblent. Notre chemin, c’est l’innovation, la réactivité et l’alliance.” L’innovation réside dans la réorganisation de la production en Leavers, avec un atelier qui fonctionne désormais sans tullistes. Seul le contremaître l’est. Il est appuyé par des passeurs de chaîne (en fait des tullistes en voie de confirmation) et les résultats sont au rendez-vous. Moins de retour qualité sur les dentelles, pas de problème technique majeur… L’atelier Leavers produit 40% de la production des dentelles de Desseilles, le reste sortant de l’atelier tricotage. “Notre mouvement est double : nous devons maintenir le Leavers en abaissant les coûts. La dentelle Leavers pour la lingerie est un marché à marge fragile. Nous ne sommes pas encore optimaux sur ce plan. Sur un second plan, nous devons nouer des partenariats sur la dentelle tricotée”, explique le dirigeant. Une politique qui l’a amené à faire affaire avec le dentellier colombien Encajes qui est devenu son distributeur aux Etats-Unis. Et Desseilles va même en Chine pour discuter avec des clients et des producteurs : “Nous vendons très peu en Asie, pas du tout à la hauteur de ce grand marché.”

Un partenariat étroit entre Chantelle et Desseilles. A Calais, la réorganisation de Desseilles a été présentée à son client phare, Chantelle, l’un des plus gros acheteurs de dentelle en Europe et une des dernières industries lingères-corsetières françaises. Cependant, tout n’est pas fabriqué à Calais : “Nous avons deux sites de production en France mais nous produisons aussi ailleurs”, déclare Claire Terentiev, directrice du style de la marque Chantelle. Le 2 février dernier, toute l’équipe de Chantelle, soit une trentaine de personnes, s’est déplacée pour appréhender les différentes étapes de la fabrication de la dentelle de Calais… “La plupart des gens connaissent le produit qui passe tous les jours dans leurs mains mais ne connaissaient ni l’usine ni la Cité de la dentelle”, explique Jean-Louis Dussart. “C’est un voyage d’équipe, ajoute Claire Terentiev. Toute l’équipe travaille tous les jours avec de la dentelle. C’était une récompense pour l’année 2011 où tout le monde a fait des efforts. Pourquoi Desseilles ? Parce que nous avons un partenariat très étroit avec Desseilles, notamment sur une ligne faite sur mesure ‘Eternelle’. La dentelle Leavers reste la Rolls- Royce de la dentelle. Chantelle rime d’ailleurs avec dentelle. On retrouve de plus en plus cette délicatesse aujourd’hui.” La venue de Chantelle est un signe qui ne trompe pas et la reprise des cadres ne s’est probablement pas faite sans l’assurance de la fidélité de son client principal. L’année 2011 fut une période excellente pour Desseilles et Chantelle. Le dentellier est sorti de l’impasse où l’avait conduit la crise. Le linger-corsetier voit la vente de certains de ses produits rebondir. “Avec de la dentelle Leavers, la cliente ne se trompe pas. Elle ressent la qualité du produit”, affirme la directrice du style de la marque française de luxe. L’équipe de Chantelle n’a pas manqué de visiter aussi la Cité internationale de la dentelle et de la mode. Une plongée dans les origines dentellières de la ville et un voyage parmi des modèles qui inspirent toujours les stylistes.