Canal Seine Nord Europe : un chantier aux multiples enjeux

Le 9 juillet, les membres du CESER (Conseil économique, social et environnemental) se sont réunis pour faire un point d’étape sur la construction de la liaison fluviale de 107 km portée par la Société du Canal Seine Nord Europe.

Vue 3D de ce à quoi ressemblera l’écluse de Oisy-le-Verger. © SCSNE-ONE
Vue 3D de ce à quoi ressemblera l’écluse de Oisy-le-Verger. © SCSNE-ONE

Dans les Hauts-de-France, l’année 2030, devrait être marquée par la mise en service du canal. Au total, ce sont 107 kilomètres de voie d’eau, reliant Compiègne dans l’Oise à Aubencheul-au-Bac, dans le Nord, qui vont être façonnés, pour un budget qui devrait avoisiner les 7 milliards d’euros.

«C’est un projet structurant, moteur d’avenir et de développement durable, pour la région des Hauts-de-France». Pour Laurent Degroote, président du CESER Hauts-de-France, le Canal Seine Nord Europe (CSNE), liaison fluviale entre Compiègne et Aubencheul qui doit voir le jour en 2030, est un projet pertinent. Mais alors que les travaux débutent de-ci de-là, le CESER a souhaité réaliser, le 9 juillet, un point d’étape avec le maître d’œuvre : la Société du Canal Seine Nord Europe.

La construction de cette liaison fluviale, qui doit permettre aux péniches à grand gabarit de circuler efficacement entre la France, la Belgique et les Pays-Bas, fait en effet face à de nombreux défis. «On parle, par exemple, d’enjeux autour du foncier, car pour creuser 107 kilomètres de voie d’eau, il faut énormément de terres disponibles», poursuit le Président du CESER Hauts-de-France. Et la préservation de l’environnement, la gestion de l’eau et le besoin croissant de main d’œuvre, sont aussi des défis auxquels doit répondre la Société du CSNE.

Faire de l’environnement, une priorité

Alain Lefebvre (CCI des Hauts de France), Emmanuelle Leroy (France Travail), Benoît Rochet (Société d'exploitation des ports du Détroit), Pierre-Yves Biet (Société du Canal Seine-Nord Europe) et Fanny Lefebvre (CCI Hauts-de-France). © L.Péron

«Les enjeux environnementaux guident nos choix», affirme Pierre-Yves Biet, Directeur Partenariats et Territoires au sein de la Société du CSNE. C’est pourquoi, pour compenser l’empreinte environnementale de la liaison fluviale, l’entité en charge de la construction du canal, a décidé que 165 hectares seraient dédiés à des aménagements écologiques (mares, bois, zones humides…), afin d’offrir un habitat de replis aux espèces présentes sur le passage de la construction. «Nous nous engageons à suivre ces sites durant 30 ans, afin que la faune et flore puissent s’y développer correctement. Au total, nous avons acté un programme de compensation écologique de 1 200 hectares», assure Pierre-Yves Biet.

Côté environnement, toujours, la Société du Canal Seine Nord Europe, affirme que son infrastructure sera économe en eau. «Il n’y aura aucun prélèvement dans les nappes phréatiques. Le Canal va être rempli, peu à peu, grâce à l’Oise. Seulement 1 % de son débit sera dédié au remplissage», explique le Directeur Partenariats et Territoires. Le maître d’œuvre du canal doit encore toutefois lever quelques réserves, notamment en prévoyant un plan d’action de dégradation de la qualité de l’eau et en montrant comment seront traitées les eaux de ruissellement. «Nous avons déjà tout prévu, mais nous allons de nouveau détailler cela dans nos rapports», assure Pierre-Yves Biet.

6 000 personnes nécessaires sur le chantier

Pour un canal, mis en service dans les temps, pas moins de 6 000 paires de bras, dans une trentaine de métiers différents, seront nécessaires. «Pour trouver cette main d’œuvre, nous comptons sur les organismes locaux comme France Travail», détaille Pierre-Yves Biet. Ces organismes se sont d’ailleurs mis en ordre de marche, dès qu’ils ont eu connaissance de ce projet titanesque. «Nous avons une plateforme régionale, qui permet aux personnes en recherche d’emplois ou souhaitant se reconvertir, de pouvoir postuler. Mais nous dispensons également des formations», précise Emmanuelle Leroy, Directrice Territoriale Nord-Pas-de-Calais au sein de France Travail.

Pour donner quelques chiffres. En 2023, quarante-huit actions ont été menées sur le territoire et ont permis d’informer près de 2 800 personnes sur les besoins du chantier. «Nous avons aussi organisé quatre-vingt sessions de formation, sur les métiers les plus en tensions, mais nécessaires au bon déroulement de la réalisation du Canal Seine Nord Europe», ajoute la Directrice Territoriale Nord-Pas-de-Calais au sein de France Travail. Les efforts vont être poursuivis, en fonction du calendrier du chantier. «Nous souhaitons mobiliser tout le territoire : les agences emplois, les organismes de formations, et même les fédérations professionnelle», lance Emmanuelle Leroy. Pour le moment, sur les 6 000 salariés recherchés, 3 000 auraient été débauchés. Le chemin à parcourir est encore long, mais le Canal Seine Nord Europe, peu à peu, fait son lit.

Une liaison fluviale où les bateaux s’arrêtent

Le foncier est un enjeu majeur du grand canal. «Pour le Canal Seine Nord Europe soit vraiment un atout pour notre territoire, il ne faut pas uniquement que les bateaux passent, mais qu’ils s’arrêtent», défend Alain Lefebvre, Conseiller en Affaires portuaires au sein de la Chambre de Commerce et de l’Industrie (CCI) des Hauts-de-France. C’est pourquoi, sur les abords de la liaison fluviale, il faut que des entreprises industrielles et logistiques, qui importent et exportent, s’installent. Pour ce faire, de nombreuses parcelles seront nécessaires. «Il faut imposer aux entreprises qui s’installent dans les ports intérieurs, via un contrat, d’utiliser les voies d’eau. Si une entreprise ne se sert pas du Canal seine Nord Europe, elle devra déménager», insiste Alain Lefebvre. D’autant que le report modal, vers le fluvial, se veut être un atout majeur dans les réductions des émissions de gaz à effet de serre. «Il ne faut pas penser qu’à la liaison fluviale, mais à tout ce qui gravite autour», conclut Alain Lefebvre.