«Une opportunité offerte par un cédant très ouvert !»
Aux Bois-Blancs, entre Lille et Lomme, une langue de terre nichée en plein port de Lille abritait depuis 25 ans Transfo plastique, dédiée à la fabrication et conception de sacs plastique industriels. Troisième reprise pour Arnaud Jonglez qui a tout restructuré, avec l’aval d’un cédant coopératif.
La Gazette. Quels étaient votre formation et votre parcours professionnel avant cette reprise ?
Arnaud Jonglez. J’ai fait beaucoup de choses depuis mes études à l’IUT de Valenciennes et l’EDHEC. Je suis passé par l’export, l’impression à Tourcoing, l’eurocommercial, j’ai créé en CCI Grand-Lille un service exportation pour la Scandinavie, l’Espagne, le Canada et le Japon, puis j’ai dirigé les achats d’un groupe textile dans le tissage et le fil industriel. Ensuite, j’ai créé une activité dans le fil pour le compte de sociétés étrangères en France et Belgique dans le tissage et la bonneterie. J’ai enfin repris Plibat que j’ai portée à 1,1 M€ de CA, puis cédée en 2012. Mais, depuis 2003, je voulais avoir mon affaire bien à moi et reprendre, pas créer.
Qu’est-ce qui vous a fait penser que vous étiez capable de reprendre cette société ?
Mon vécu multiforme, cette reprise heureuse jusqu’à 2012, des cibles raisonnables − c’est-à-dire des PME régionales de négoce ou de fabrication et pas forcément dans les métiers que je connaissais. A 50 ans, j’avais beaucoup d’appuis dans des réseaux d’entrepreneurs confirmés et, en juin 2013, j’ai repris avec succès AJP à Vieux-Condé qui était déjà dans le plastique, cette fois dans la fabrication de films plastique et papier pour l’industrie. Cette fois, j’ai repris Transfo plastique fort de ces deux reprises réussies, je me place d’abord dans la gestion et la restructuration même si les métiers pratiqués sont différents : on s’adapte !
Quel a été le facteur déclenchant votre volonté de reprendre cette entreprise à Lille Bois-Blancs ?
C’est Nord transmission qui m’a contacté en novembre 2013. Le cédant partait en retraite, le dossier était fortement recommandé et donc bénéficiait d’un a priori favorable. Comme je venais de reprendre quelques mois auparavant AJP, il m’a fallu aller vite. Cette PME travaillait aussi dans le plastique, avec 13 personnes très expérimentées. J’y retrouvais un peu la structure de la société cédée deux ans avant. Bref, pas mal de paramètres collaient à ce que je cherchais dans une PME à racheter, sans la chercher absolument chaque jour. Cette opportunité s’est présentée comme ça. Je l’ai saisie, d’autant que le contact avec le vendeur a été parfait. En décembre 2013, on s’est vus et on a parlé dans un accord de confidentialité. L’examen du dossier a été concluant, nous étions bien sur les mêmes rails.
Combien de temps a duré la reprise ?
Cinq mois et demi, j’ai signé en avril 2014. J’ai revu le cédant en mars avec l’expert-comptable, puis la lettre d’intention a suivi ainsi que la feuille de route de la cession. Nous avons procédé aux démarches de prêts, à l’audit des comptes et l’analyse des sols, tout était clair.
Quels ont été vos partenaires ?
La BPN avec sa chargée d’affaires Mme Biers, d’excellent conseil, la bpi pour la garantie de 40% de l’emprunt et son prêt avec amortissement sur deux ans, l’expert-comptable M. Tabardel pour les audits et Nord transmission qui m’a très bien conseillé et alerté.
Sur quelles bases avez-vous établi la valorisation de la société ?
Les ratios, les fonds propres, la trésorerie et les résultats d’exploitation : tout cela un peu mélangé. Et le prix. A ce sujet, je pense qu’il faut s’entourer de beaucoup de conseils, ceux qui ont l’habitude de négocier avec l’équipe du cédant. Et éviter, à ce sujet tout au moins, un contact direct avec ce dernier. Il faut accepter l’éventualité que chacun fasse un pas vers l’autre. C’est ce qui s’est passé avec bonheur.
Qu’avez-vous pensé de cette société en la découvrant au cours de la reprise et avez-vous été surpris par certains points ?
Tout d’abord, j’ai rencontré le personnel qui ignorait ce changement tout en se doutant que le cédant allait partir un jour ou l’autre, à 62 ans. Il a été satisfait et a écouté sans commentaires particuliers mon projet. Transfo plastique est de ces sociétés nordistes solides, à la bonne réputation, suivie par des clients fidèles. Elle avait été fondée à Hem voilà 40 ans et vendue il y a 25 ans. Entre-temps, elle s’était installée ici, sur cette pointe de presqu’île des Bois-Blancs où on est à l’étroit, surtout quand il faut manœuvrer en camion. Les débouchés sont à 70% industriels, nous achetons du plastique et fabriquons des produits, des sacs adaptés à une demande très diversifiée, avec une gamme d’impression particulièrement large. La grande distribution tient une place importante, mais pas seulement, car les volumes de production, les séries, varient beaucoup, par exemple en couleurs. Donc, cette société était déjà engagée dans ces process qui demandent beaucoup d’intervention humaine − nous posons des soufflets, des rabats, des trous d’aération parfois, etc. Puis, il y a la livraison par messagerie. Transfo plastique était déjà dans des produits très personnalisés. Pas question de lutter contre les Chinois et leurs produits standardisés à très gros volumes. Avec un CA de 2,5 M€ et une certaine stagnation d’activité, cette PME pouvait progresser, ce que ressentait aussi le personnel.
Quel est votre projet pour Transfo plastique ?
On est dans l’industriel aux applications très techniques, il faut donc jouer sur l’innovation et le savoir-faire, la réactivité aussi et la personnalisation. Dieu merci, les machines étaient là. Si on déménage, certaines seront difficiles à bouger, mais elles sont performantes et aident à la réalisation de plusieurs projets. D’abord augmenter les ventes à l’export via toujours plus de partenaires à l’étranger et de diversification. Il faut remettre de la vie dans cette activité ! L’informatique est rajeunie, le site internet − esthétique − est assorti d’un référencement performant : toute notre gamme y figure avec tous les prix, un travail énorme a été fait avec le personnel ! Après ce vrai site marchand, je recherche de vrais fournisseurs à l’étranger, je fais le tour du monde et je détecte les personnes compétentes et dynamiques. On fait une grille tarifaire et on y va !
La communication tient donc une place capitale dans ce dispositif : 80% de nos produits doivent être achetables en direct sur Internet. Le reste, c’est de la personnalisation au coup par coup. La communication portera sur nos nouveaux prospects, nos capacités et le financement des supports. Le marché est pour l’instant local, national et belge.
Je mets les outils en place, les tableaux de bord. Le CA doit progresser sereinement vers 3 M€ dans un premier temps. D’ici deux à trois ans, on fera le point.
Trois conseils à donner à un candidat repreneur ?
Bien analyser les forces et les faiblesses de la PME reprise, ainsi que le marché. Etre “réalistico-pessimiste” dans son business plan et ne pas le rédiger tout seul dans son coin. Avoir une vision marketing et commerciale de la société en songeant aux outils qu’il faudra installer.