«Une cession paisible pour un développement reposant sur l'urgent et l'existant»

Plus gestionnaire que concepteur, Amaury Honoré a mené tambour battant cette reprise dans un climat particulièrement serein. Cédant et repreneur étaient d'accord sur tout : faire franchir à Millon métallerie un cap supplémentaire avec pragmatisme et un sens aigu de l'opportunité.

Un repreneur qui veut immédiatement refaire du chiffre.
Un repreneur qui veut immédiatement refaire du chiffre.
1 300 nouveaux mètres carrés permettront de meilleures solutions…

1 300 nouveaux mètres carrés permettront de meilleures solutions…

La Gazette. Quelles étaient vos activités avant cette reprise ?

Amaury Honoré. J’ai connu plusieurs postes au sortir d’une formation en commercial. D’abord chez Fraikin à Arras, Rennes et Saint-Malo, puis 11 ans comme directeur général adjoint à la direction de Portakabin, chargé du marché français. En 2007, j’ai commencé à songer à reprendre. Pas à créer parce que je ne suis pas un concepteur, je n’ai pas de compétences techniques, pas non plus de métier spécifique. Je suis très préoccupé par l’acte de vente et le management d’un modèle économique. J’ai donc repris en 2008 Duthoit menuiserie à Houplin-Ancoine, que j’ai ensuite vendue en janvier 2014 pour me consacrer à Millon métallerie qui, en réalité, était cédée par Million SAS. En mai 2012, j’ai racheté le fonds de commerce de cette société, comme cela m’est arrivé auparavant. Millon SAS avait en effet deux activités, j’ai donc récupéré la partie métallerie.

Quel a été le facteur déclenchant votre volonté de reprendre cette entreprise et quelles actions avez-vous menées pour devenir repreneur ?

J’étais fort de pas mal de vécu dans les domaines déjà énumérés. En décembre 2011, j’ai recherché une PME d’une vingtaine de personnes avec, autre critère de sélection, une activité qui soit complémentaire à Duthoit menuiserie que je possédais alors. Je voulais une fabrique et une équipe compétente. C’est une aspiration de base chez moi : la valeur se crée à la fabrication en local. Avec aussi la volonté de construire un savoir-faire technique dans l’entreprise. Enfin, je voulais formaliser les compétences, notamment pour tenir le coup en période de crise : il me fallait une société qui soit pérenne ou le devienne et tournée vers de nouveaux marchés. Le BRE m’a alors indiqué Millon métallerie. J’ai donc rencontré les conseillers du BRE qui m’en ont dit plus, cela correspondait à ce que j’attendais.

Millon métallerie est sur le chantier de l’auberge de jeunesse de Lille.

Millon métallerie est sur le chantier de l’auberge de jeunesse de Lille.

Quel a été le facteur clé dans le choix de cette société?

La parfaite adaptation à mes souhaits et le contact particulièrement positif immédiatement établi avec le cédant Francis Millon que j’ai rencontré en décembre 2011. Il était déjà en retraite, mais il avait dû revenir dans l’entreprise pour la relancer, son fils ne souhaitait pas lui succéder. Il voulait vraiment repartir et donc céder. C’est d’un ensemble de rencontres avec lui que s’est forgée l’idée que cette société serait vraiment celle qu’il me fallait. Francis Millon avait néanmoins soumis la reprise à quelques exigences fermes. Transmettre à un entrepreneur en qui il avait totale confiance. Maintenir l’activité de tous les salariés et consolider la pérennité et l’identité de l’entreprise. Mon projet collait à cela, la famille Millon m’a donc choisi. Dès lors nous avons travaillé main dans la main, Francis Millon a effectué pendant trois mois sa période d’accompagnement. En fait, on a continué pendant deux ans et demi en parfaite harmonie. Enfin, j’ai été dans la société indirectement et discrètement avant de la reprendre officiellement, puisqu’avec M. Million, nous organisions déjà la complémentarité avec Duthoit, j’étais son client avant de le reprendre… J’ai donc pu connaître en détail cette entreprise à partir de ces différents postes d’observation.

Les machines ont été réinstallées à Seclin voilà à peine un mois.

Les machines ont été réinstallées à Seclin voilà à peine un mois.

Combien de temps a duré la transmission ?

Six mois, de décembre 2011 à fin avril 2012. J’ai rencontré le personnel tout à la fin. Il était un peu inquiet puisqu’il ne me connaissait pas, l’émotionnel joue toujours, c’est logique. J’ai dit que je gardais tout le monde et j’ai expliqué mon projet et là, au fil des jours passés ensemble à l’atelier, la confiance s’est établie.

Quels ont été vos partenaires ?

Le BRE en amont, qui m’a très bien conseillé, puis ma banque historique, la BNP Lille, mon expert-comptable le cabinet Valoxy à La Madeleine, et ma famille qui m’a soutenu !

A partir de quels critères avez-vous estimé la valorisation de l’entreprise ?

Le résultat, le niveau de marge brute. Pas sur l’étude de marchés mais sur mes capacités à faire croître la société, car tout dépend de ces capacités, pas des facteurs extérieurs.

Finalement, comment avez-vous trouvé la société reprise quelque temps après avoir signé ?

Comme je l’ai déjà dit, je la connaissais déjà assez bien comme client avec Duhoit. Je ne m’appesantis pas sur le passé. Le CA 2011 était de 1,4 M€, c’était correct. C’est ce que je dois dégager prochainement de l’activité pour atteindre la vitesse de croisière souhaitée. Millon métallerie était et reste solide. Elle était à l’étroit à Lille dans ses 1 100 m2, je l’ai fait venir à Seclin sur 1 300 m2. Ce qui change, c’est qu’avant le process s’auto-limitait à l’étroitesse des lieux, alors que maintenant, c’est le volume qui sert l’activité ainsi que la réorganisation des équipes… En fait, même si je vois ce qui ne va pas, ce qu’il va falloir améliorer, je pense tout de suite à l’urgence et à l’action efficace qui va ramener de l’argent − ce que j’appelle mettre d’abord du carburant dans le moteur, à savoir des commandes. Dans les cessions, le repreneur ne va pas suffisamment à l’essentiel et se perd en examens superflus.

Un repreneur qui veut immédiatement refaire du chiffre.

Un repreneur qui veut immédiatement refaire du chiffre.

Quel est votre projet pour Millon métallerie ?

Nous gardons le marché régional, il est assez large par rapport à nos compétences. Le principe de base est là : faisons ce que nous savons faire. L’ingénierie de notre bureau d’études, sur lequel je fonde beaucoup d’espoirs, ne concevra pas des produits que nous ne pouvons pas fabriquer. En revanche, à travers la boîte à idées de nos collaborateurs, on pourra innover et donner au BE des indications sur de nouvelles possibilités. J’ai réorienté l’activité vers d’autres chantiers, une niche qui souffrait un peu, le coffrage métallique. La collaboration avec Duthoit se poursuit, l’immeuble de taille moyenne et le particulier sont un débouché à intensifier, nos métiers de serrurerie et métallerie vont aussi viser les gros chantiers. On est sur la future auberge de jeunesse de Lille, sur un Casto à Hénin-Beaumont. Bref, on va chercher une dimension supérieure, tout en restant agile… C’est-à-dire ramener assez d’activité pour les équipes en place dont il faut accroître les compétences : aisance au travail, maîtrise, liens étroits avec le BE, ingénierie du personnel et formation de jeunes apprentis.

Trois conseils à un candidat repreneur ?

Etre concentré sur les «possibles» dans l’entreprise visée, identifier les grands risques sommairement, pas de montage financier tendu, mais rester agile, attentif aux opportunités, même avec quelques risques, car ça ne se passe jamais comme prévu.