«Ramery est et restera une entreprise familiale»

On ne change pas une équipe qui gagne… Le groupe Ramery demeure une ETI familiale autour de Matthieu Ramery qui en est l'actionnaire principal. Dans la continuité de sa stratégie de diversification et de transversalité, il entend accélérer sur les marchés de la commande privée et se renforcer dans les métiers de l'immobilier.

«Ramery est et restera une entreprise familiale»
D.R.

Matthieu Ramery, directeur général et membre du directoire, et Philippe Beauchamps, président du directoire.

 

«Ramery est et restera une entreprise familiale.» En recevant les journalistes le 1er décembre, Matthieu Ramery, 39 ans, ingénieur en travaux publics, depuis dix ans dans le groupe après dix autres chez Razel, a d’entrée voulu couper court aux rumeurs qui circulaient depuis le décès, le 6 mai dernier, de son père et fondateur du groupe éponyme, Michel Ramery, rappelant que ce dernier, avec son épouse et en plein accord avec ses trois sœurs, avait décidé et fait en sorte qu’il soit l’actionnaire majoritaire du groupe : «Une voiture, ça ne se conduit pas à deux.” Sa mère, Monique Ramery, a pris la présidence du conseil de surveillance et Philippe Beauchamps, président du directoire depuis décembre 2015, a été reconduit à cette fonction «pour continuer le développement du groupe, m’accompagner dans la suite de ma prise en mains et pérenniser le groupe». Lui-même a, en juin, rejoint le directoire en complément de son poste de président de Ramery environnement où il a pris la casquette de directeur général, fonction qu’il partage avec Xavier Deltour, président de Coexia et secrétaire général du groupe. «Très différents et très complémentaires, c’est notre force et elle nous permet de travailler collégialement pour animer le directoire, pour gérer tous les sujets d’actualité et travailler sur la stratégie du groupe

Ce préambule étant acquis, et avant d’évoquer la feuille de route du groupe pour les mois et années à venir, Philippe Beauchamps a évoqué son «histoire d’amitié avec un homme (Michel Ramery), à une famille et à une conception de l’entreprise», insistant sur la chance du Nord de compter de nombreuses entreprises familiales de toutes tailles et sur la capacité de Michel Ramery à anticiper la transmission. «Si Matthieu, nouvel actionnaire majoritaire, avait décidé de vendre à un major par exemple, je serais parti car ce n’est pas mon projet de vie. Le sujet est clair : l’entreprise est familiale et a un actionnaire majoritaire. Les sujets de succession ont été réglés et l’entreprise n’est pas pénalisée par le sujet de la succession. (Nous sommes) dans la continuité. Je suis et resterai chez Ramery (…) pendant cinq à huit ans.» Et de marteler : «L’entreprise n’est pas à vendre. Elle est et restera familiale et sur la voie du développement comme elle l’a été jusqu’à présent

Développer et accélérer la commande privée. Pour avoir longtemps assis son développement sur les collectivités et les avoir dotées au fil des années d’équipements de qualité, le groupe Ramery n’a eu de cesse de saisir les opportunités qui s’offraient à lui, de faire évoluer ses activités et de se diversifier. «Aujourd’hui, il est inévitable que, crise ou pas crise, endettement ou pas endettement, hors le sujet des routes en très mauvais état, le budget des collectivités va diminuer sur l’investissement», analyse Philippe Beauchamps pour expliquer s’être tourné depuis des années vers le marché privé. Si en 2006, à son arrivée dans le groupe, Ramery faisait selon les métiers de 10 à 15% de son chiffre avec les commandes privées et 85 à 90% avec les commandes publiques, aujourd’hui la commande privée est majoritaire, hors Ramery travaux publics à 37%, à 52% chez Ramery bâtiment, 63% chez Ramery environnement et 56% chez Coexia. La volonté du groupe est de développer encore cette part. Comment ? «Jusqu’ici, ce travail (avec le privé) se faisait chaque métier de son côté. Nous avons décidé de réunir nos métiers dans un ‘club des industriels’ pour leur permettre de travailler ensemble et conjointement sur le sujet de la commande privée.» Et d’avoir donné un challenge à chacun des représentants de ses métiers : «Tu as un an pour faire travailler deux autres métiers du groupe chez tes clients.» C’est ainsi que Ramery peut offrir à ses clients une offre de services totalement globale, de la problématique des fondations à celle de la maintenance, en passant par celles de la dépollution, du désamiantage, de la déconstruction, de la reconstruction jusqu’au traitement des résidus de fabrication. «Tout cela s’est fait par agrégation des compétences, dans un but commercial très précis et très agressif, de prise de marchés complémentaires, en particulier auprès des industriels, des activités du commerce et de la logistique.» Ce métier de la logistique est d’ailleurs nouveau pour le groupe qui en était encore totalement absent il y a deux ans, tout en étant plus que prometteur à entendre Philippe Beauchamps, qui fait état de trois projets d’aménagement et de commercialisation conséquents : le premier signé et obtenu de la MEL pour deux fois 50 000 m² sur une ZAC de 60 hectares derrière Conforama et à proximité du projet Lil’Aéroparc avec un démarrage des travaux fin 2017-début 2018, le deuxième, lui aussi signé, pour 100 000 m² sur un lieu non révélé mais dans la Métropole, tout comme le troisième de même envergure mais encore en études et attente de signature.

Création de Ramery immobilier. Au vu du développement réussi de Pream, société de promotion immobilière et d’aménagement créée en 2007 sur le territoire du Nord – Pas-de-Calais (elle livrera en 2017 plus de 400 lots, appartements et terrains dans le cadre de lotissements), le directoire de Ramery «a décidé de mettre l’accélérateur sur l’immobilier en développement Pream et en unifiant au sein d’une nouvelle structure, Ramery immobilier, toutes les activités du groupe en promotion immobilière, celles de Pream auxquelles s’ajoutent celles de Ramery bâtiment et de Ramery travaux publics en copromotion». Cette nouvelle filiale, présidée par Philippe Beauchamps et opérationnelle à partir du 1er janvier 2017, a vocation à se développer sur deux nouveaux métiers : une présence affirmée sur les projets urbanistiques de grande envergure, grâce à une réponse accrue aux appels à candidatures avec projets de conception, et le lancement de l’activité de contractant général positionnée en conception-réalisation de bâtiments clefs en main au niveau national et qui nécessitera de faire appel majoritairement à des entreprises extérieures au groupe. «Nous avons toutes les capacités à être présent sur ce métier», assure Philippe Beauchamps qui ambitionne de faire passer le chiffre d’affaires de cette activité, 35 M€ en consolidé aujourd’hui, à 100 M€ à horizon 2021.

Pour expliquer la nécessité de ces évolutions et à la suite de Philippe Beauchamps qui rappelle que «depuis quatre ans, dans le Nord – Pas-de-Calais, la Fédération régionale du bâtiment déclare chaque année la disparition de 2 500 à 3 000 emplois dans le secteur, comme si chaque année le groupe Ramery était rayé de la carte», Matthieu Ramery avance la transformation des métiers et l’adaptation à la conjoncture «en s’appuyant fort sur nos expertises». «Notre cheval de bataille, c’est de favoriser la transversalité dans le groupe. Jamais les métiers n’ont autant travaillé ensemble que cette année pour trouver de nouveaux relais de croissance.» Un exemple : «Il y a deux-trois ans, la filière bois était anecdotique, aujourd’hui nous sommes leader au nord de Paris. Nous évoluons tous les jours.»

«Meilleur l’année prochaine que cette année». Interrogé sur la croissance externe, Philippe Beauchamps a rappelé avoir fait deux acquisitions depuis le début de l’année − la société Meurisse et sa filiale SEF, toutes les deux basées dans le Pas-de-Calais et spécialisées dans les métiers de la géotechnique, et Grandin, experte à Sainte-Luce-sur-Loire des installations électriques − et précisé n’avoir pas de besoin de croissance externe hors niches dans les Hauts-de-France. «Je serai suivi par les banques, j’ai la capacité à intégrer dans mon organisation 150 M€ supplémentaires, mais je n’ai pas assez d’hommes à mettre à la tête, constate-t-il. Qui dit croissance externe, dit obligatoirement déplacement géographique et dit obligation d’avoir quelqu’un qui connaisse déjà Ramery et accepte de partir pour diriger, ou au moins représenter Ramery. Nous avons des hommes pour diriger, mais pas assez.» «Dans nos nombreux défis, le sujet qui nous tient à cœur, précise Matthieu Ramery, c’est la mobilité, le changement complet de métier, d’activité.» Le groupe a fait une trentaine de mobilités depuis le 1er janvier et recruté 170 personnes. «Nous ne sommes pas dans une phase de régression de l’emploi», même si, à quelque 3 000 salariés, l’effectif est moindre que l’an dernier − 3 600 annoncés −, une diminution que le groupe explique par le marché algérien et un recours modéré à l’intérim, actuellement entre 200 à 250 personnes.

«Mon problème n’est pas un problème de carnet de commandes, Ramery n’en a jamais eu, indique encore Philippe Beauchamps, mais un problème de prix qui se sont effondrés depuis 2008. C’est un problème de fonds.» Et d’ajouter : «Il n’y a pas de miracle. Si j’arrive à supprimer les foyers de pertes, qui représentent 5 à 6% des 520 M€ du chiffre d’affaires, soit de 25 à 30 M€ des activités, Ramery serait largement bénéficiaire, mais que bénéficiaire.  Pas facile tous les jours certes, mais Matthieu Ramery est confiant : «Nous sommes au début d’une nouvelle aventure. Je vais m’appuyer sur les forces et les valeurs du groupe, tournées autour de la considération des hommes, sur le respect des engagements et le service aux clients. Je vais m’appuyer sur les réussites du groupe pour être meilleur l’année prochaine que cette année.»

 

ENCADRE

 

Quelques chiffres

− 3 000 salariés

− 520 M€ de chiffre d’affaires consolidé

− 560 M€ par activité (bilans sociaux) :

• Ramery travaux publics : 180 M€

• Ramery bâtiment : 190 M€

• Ramery environnement : 70 M€

• Coexia : 85 M€

• Pream : 35 M€

− 72 implantations