«Le transport routier de marchandises toujours vivant !»
Photo FntrTfl2
Après avoir traité du sujet politique de l’Europe des transports et de son vécu dans l’Hexagone, les professionnels du transport ont examiné plus prosaïquement leurs actualités professionnelles, à commencer les perspectives économiques qui s’offrent à eux. Sur la base des enquêtes mensuelles de la Banque de France sur l’ensemble de la région des Hauts-de-France, François Groh, directeur des services économiques de la succursale de Lille, a dressé un panorama de l’activité 2015 : chiffre d’affaires en baisse de 0,7% avec des volumes déclarés soit en stabilité, soit en hausse, dont -5,2% à l’export ; des effectifs stables à +0,1%, avec un recours plus élevé de 18,1% de l’intérim mais sur des bases peu élevées ; et, «bonne surprise», une légère reprise de l’investissement à +8,2%. Conséquence probable du CICE, des efforts de gestion et de la baisse des carburants, la rentabilité “a augmenté de façon très nette», certes en diminution pour 21% des entreprises déclarantes, mais en stabilité et en augmentation respectivement pour 35% et 44% de celles-ci. Le profil moyen 2015 des 350 entreprises qui répondent à l’enquête de la Banque de France est quasiment identique au profil 2014 : 44 salariés, 5,7 M€ de chiffre d’affaires, soit 129 999 € par personne, 0,39 M€ d’investissements (0,36 M€ en 2014), 0,34 M€ d’excédent brut (0,30 M€ en 2014) pour 38 véhicules (39 en 2014).
Après cette année 2015 qualifiée de «meilleure», comment se présente l’exercice 2016 sur la base des déclarations anticipatives recueillies en décembre 2015-janvier 2016 : les chefs d’entreprise tablent sur une hausse «très prudente» de 1,1% de leur chiffre d’affaires, une stabilité «très raisonnable» de leurs effectifs , une baisse de -5,1% de leurs investissements «faute de connaître leurs résultats 2015». S’ils sont 17% à envisager une diminution de leur rentabilité, ils sont 61% à espérer une stabilisation et 22%, une augmentation. En termes d’excédent brut d’exploitation, après 8,28 M€ réalisés en 2015 en remontée constante depuis les 7,38 M€ de 2013, ce sont 9,02 M€ qui sont escomptés pour un taux de marge en progression à 5,69% après 5,24% réalisé en 2015 et 4,34% en 2013. «Les prévisions sont encore un peu meilleures, a noté François Groh, Des volumes à peu près constants, une rentabilité un peu meilleure donnent un peu plus de perspectives et de capacité d’investissement pour l’avenir. Les perspectives 2016 sont plus sérieuses et plus stabilisées.»
Recrutement : retour des tensions. De l’intervention d’Olivier Arrigault, secrétaire général FNTR Nord et délégué régional TLF Hauts-de-France, sur l’action professionnelle en région, on retiendra notamment le constat d’un besoin de recrutement du fait de l’augmentation des volumes transportés, certes une bonne nouvelle, mais générateur d’un retour de tension sur ce recrutement. «Nous devons continuer à former (…) des personnels qualifiés et motivés», a-t-il indiqué, se félicitant de l’évolution des métiers offerts du fait de l’apparition de nouvelles solutions de transport telles que les véhicules GNV. Sur le sujet des contraintes de circulation, il a évoqué l’accessibilité lilloise, indiquant que «la situation lilloise n’est pas irrémédiablement catastrophique et (que) le transport routier de marchandises sert d’abord l’intérêt de la Métropole, à raison de plus de 60% pour ses besoins, et pas uniquement le transit». Faisant le constat que «toute la circulation est touchée sur la zone du Calaisis», il demande la mise en place de moyens de sécurisation de l’A16, d’une réponse pénale forte et d’un fonds d’indemnisation, régional ou national, des transporteurs victimes d’attaques.
Intervenant sur les thématiques actualités et dossiers professionnels, Florence Berthelot, nouvelle déléguée générale FNTR, est revenue sur le sujet des salariés détachés pour indiquer que si «nous n’allons pas empêcher l’application de la loi, nous avons donné beaucoup d’informations à nos adhérents et à nos homologues étrangers. Au final, nous sommes plutôt réservé sur son application. Pour l’instant, les mesures de contrôle ne sont pas efficaces. On attend le bilan l’année prochaine. On essaye de nous protéger, mais notre demande, c’est de nous redonner de la compétitivité, c’est de nous permettre de reconquérir des marchés !»
Rapprochement incontournable. Revenant sur le rapprochement entre la FNTR et TLF, pour s’en féliciter comme Yves Fargues, président de l’union TLF (“la nouvelle Fédération sera complètement incontournable»), elle a indiqué qu’être «dans une logique de convergences après des années d’opposition ne signifie pas perdre son âme». Elle a mis en exergue la fluidité du travail depuis le rapprochement des équipes dans les mêmes locaux parisiens depuis juin et surtout insisté sur l’importance des conséquences de la nouvelle représentativité de l’ensemble FNTR-TLF avec plus de 50% des salariés du secteur travaillant dans des entreprises adhérentes. «Ce front commun nous permet de nous opposer à tout accord social qui ne sera pas signé avec nous (et d’afficher) poids, force et crédibilité vis-à-vis des pouvoirs publics.» Après avoir évoqué les difficultés rencontrées par le Comité national routier dans ses besoins de financement, Yves Fargues a évoqué les «velléités de l’URSSAF de requalifier les congés de fin d’activité mis en place depuis un accord de 1977 − avec une participation de l’Etat à 50% de la dépense (240 M€), pour permettre aux salariés du secteur de partir cinq ans avant l’âge de la liquidation en préretraite d’entreprise − et donc de procéder à un redressement estimé à 50 000 € par conducteur… C’est inadmissible, nous ne l’accepterons pas ! a-t-il menacé. Nous ne pouvons pas accepter d’être rançonnés. A la première notification, nous dénoncerons et provoquerons la crise».
Après avoir rappelé que les professionnels du transport routier avaient besoin d’un environnement réglementaire et fiscal stable sur la base du CICE et des allègements Fillon, «garants de notre compétitivité», et qu’une «augmentation de la fiscalité serait mortifère pour la profession», Jean-Luc Dejode, coprésident FNTR Nord, a évoqué les effets de la crise pour indiquer que «la profession a montré qu’elle savait s’adapter et se réinventer (et que) le transport français est toujours vivant».