«Je suis prêt à reprendre en main l’Institut Pasteur de Lille»

Quelque temps en difficulté financière, l’Institut Pasteur de Lille redémarre sur des bases solides avec un ambitieux projet, sous la houlette du professeur Patrick Berche, arrivé à la direction générale en juillet dernier.

Le Professeur Patrick Berche a passé 14 années de sa vie à Béthune. « C’est là que j’y ai tous mes souvenirs.»
Le Professeur Patrick Berche a passé 14 années de sa vie à Béthune. « C’est là que j’y ai tous mes souvenirs.»
D.R.

Le Professeur Patrick Berche a passé 14 années de sa vie à Béthune. «C’est là que j’y ai tous mes souvenirs.»

« Nous n’aurions pas de difficultés financières si Calmette avait breveté le BCG. Mais il en a fait don à l’humanité !», s’amuse le professeur Patrick Berche. L’Institut Pasteur de Lille (IPL) sort en effet d’une crise profonde : en 2009, sa filiale IPL Sed Nord, chargée des analyses environnementales, rencontre des difficultés sur un marché fortement concurrentiel. Malgré des réorganisations et des licenciements, Sed Nord se fait racheter à 67% par Eurofins, contraignant la fondation lilloise à se recentrer exclusivement sur la recherche et la formation. Aujourd’hui, l’Institut semble aller beaucoup mieux. «Nous avons un léger déficit budgétaire, mais nous n’aurons pas de problèmes de trésorerie pour les deux ou trois années à venir. Je vois l’avenir d’un œil optimiste ! Je suis prêt à reprendre en main l’Institut Pasteur de Lille», poursuit le directeur général. L’IPL sait qu’il peut compter sur ses donateurs : sur un budget de 29 millions d’euros, 9% proviennent des legs. «C’était moins de 4% il y a trois ans. La population a une excellente opinion de l’Institut», rappelle le professeur Patrick Berche. Les subventions publiques complètent le budget à hauteur de 20%. Restent donc 70% à trouver, notamment à travers les contrats de recherche ou les plateaux techniques utilisés par les entreprises. Déjà, 230 partenariats avec le monde professionnel ont été noués. «Notre recherche n’est pas désincarnée : elle est adaptée aux pathologies de la région.» En témoignent les découvertes récentes des équipes hébergées à l’IPL : découverte de nouveaux gènes susceptibles de provoquer un diabète de type 2, d’une anomalie génétique qui multiplie par 50 le risque de surpoids, ou encore du rôle du gène de l’amylase dans l’obésité, etc. Cinq équipes de recherche se sont spécialisées dans ces problématiques clés − avec un but unique : améliorer l’état de santé des habitants du Nord-Pas-de-Calais − : cancer (Yvan de Launoit, SIRIC), maladies dégénératives (Philippe Amouyel, LabEx), maladies métaboliques (Philippe Froguel, LabEx), maladies cardiovasculaires (Bart Staels, LabEx) et maladies infectieuses (Camille Locht).

L’allongement de la vie. Si en 1950 on comptait 200 centenaires, ils seront 23 000 en 2014 et devraient être 250 000 en 2060 ! Une excellente nouvelle, mais surtout si l’on vit en bonne santé. La clé ? Prévenir la dépendance et préserver l’autonomie des personnes âgées. «Nous n’avons pas prétention à faire vivre les gens jusqu’à 120 ans, mais nous voulons qu’ils vivent en meilleure santé», poursuit le professeur Berche. D’où le projet d’implantation, d’ici trois ans maximum, du Centre transdisciplinaire de recherche sur la longévité qui réunira, en un seul bâtiment, cinq équipes de recherche. Un bâtiment de 7 000 m2 pour un coût de 28 millions d’euros, adossé à un nouveau centre de 4 000 m2 pour recevoir le public. Avec, pour moitié, un financement espéré de la Région, le reste serait ponctionné sur les fonds propres de l’IPL. «Plutôt que de rêver vivre un siècle et demi, mieux vaut viser arriver centenaire sans problèmes cardiovasculaires, sans perdre la tête et en restant autonome», assure le Professeur. On le croit sur parole.

Une fourmilière au service de la population et de la recherche

Trois pôles constituent l’Institut Pasteur de Lille :
− Santé publique (service aux populations vulnérables, vaccination via le centre de prévention) : 18 000 bilans de santé par an, 40 000 vaccinations, 400 000 tests Hémoccult pour le dépistage du cancer colorectal.
− Recherche : 1 000 salariés dont 600 chercheurs, 7 entreprises créées (dont deux cotées), 4 hébergées actuellement.
− Formation : 140 étudiants en master (dont un tiers d’étrangers), 3 200 stagiaires en formation professionnelle.

A quoi servent les dons et legs ?

Ils sont affectés en totalité, tout comme les contrats de recherche, au développement et la recherche lilloise. Ils financent les équipes de chercheurs, les frais de fonctionnement des laboratoires, les nouveaux équipements, et conditionnent l’ouverture des nouveaux programmes. Il faut compter près de 2 000 euros pour équiper une paillasse classique. Les dépenses mensuelles nécessaires à un chercheur sont de 1 000 euros. Plus important, le coût d’un outil de mesure des protéines en temps réel coûte 8 000 euros. Et pour les outils capables de travailler à l’échelle de la molécule, il faut compter entre 200 000 et 1 million d’euros.