«Je n’imagine pas du tout un risque de blocage financier»

Le 29 mars, l’ordre des avocats au barreau de Lille, présidé par Stéphane Dhonte, et la Région des Hauts-de-France, dirigée par Xavier Bertrand, ont organisé la Nuit du Brexit. Cette soirée, qui s’est déroulée au siège de Région, dès 20 h, devant un peu plus de 150 invités, avait pour objectif de faire le point sur les conséquences de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne le 29 mars 2019. A cette occasion, quatre tables rondes exposant les effets du Brexit dans différents domaines ont été proposées aux participants. Concernant l’impact sur les capitaux, François Fontaine, directeur commercial du CIC Nord-Ouest, s’est voulu rassurant.

«Je n’imagine pas du tout un risque de blocage financier»

La Gazette : Pourquoi êtes-vous optimiste ?

François Fontaine : Par souci de pragmatisme. Le thème que j’ai présenté concernait les impacts du Brexit sur la place financière de Londres. Bien évidemment, il y a des choses qui ont été remises en cause, mais il ne faut pas oublier toute son expertise historique, qui en fait la première place financière mondiale. De fait l’Europe est liée à cette bonne santé financière, et Londres a besoin de l’Europe. J’ai la conviction que le pragmatisme l’emportera et que des accords vont être trouvés. Des agréments vont être développés pour pouvoir continuer à bénéficier de cette expertise.

Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?

J’ai pris comme exemple la Suisse qui a toujours été considérée comme le socle de la banque privée. On disait fréquemment que le pays tenait cette compétence de son secret bancaire. Depuis maintenant une petite dizaine d’années, tous les secrets bancaires de la Suisse ont explosé. Pourtant, la Suisse est toujours la première place en termes de banques privées. C’est pourquoi je pense que la compétence technique et historique qui existe à Londres perdurera. Nous pouvons espérer en France, et peut-être aussi en Allemagne, gagner une partie de la compétence qui nécessitera d’être commercialisée en Europe continentale. Donc, que ce soit Paris ou Francfort, on peut imaginer effectivement – c’est le cas actuellement – des transferts d’une partie des compétences vers ces deux places, mais je n’imagine pas du tout un risque de blocage financier.

Comment expliquez-vous les réactions des analystes financiers qui ne sont pas du tout rassurés ?

D’abord parce que les marchés financiers aiment à se faire peur. Dès lors qu’il y a une incertitude, mécaniquement il y a une réaction plus ou moins violente. La réaction violente s’est faite sur la devise, principalement dans le mois qui a suivi l’annonce du Brexit, et un petit peu avant. Depuis, la livre sterling est relativement stable, même si elle est bien plus basse aujourd’hui qu’elle ne l’était avant le Brexit. Plusieurs scénarios ont été établis. Il y a les scénarios du pire : certains considèrent que la City pourrait perdre à peu près 40% de son activité. Concernant les scénarios les plus courants, d’autres imaginent que la City pourrait perdre autour de 10-15% de son activité. Quant aux plus optimistes, ils tablent sur 5% ! Donc, voilà ce que peut espérer gagner Paris ou Francfort : 5, 10 ou 15%. Les 40% sont peu vraisemblables.

Selon vous, la City conservera-t-elle sa place de numéro 1 ?

A priori oui, surtout à court terme. Je vais prendre un autre exemple. Il y a un accord qui a été signé entre la Bourse de Chicago, numéro un mondial des échanges de produits agricoles, et l’Europe, puisque la Bourse de Chicago est, comme chacun sait, hors de la zone européenne. Les systèmes étaient différents et il a fallu trouver un accord pour pouvoir bien fonctionner. Cela a mis quatre ans, ce fut très compliqué, et des négociations très dures ont été engagées. Mais les Etats-Unis et l’Europe avaient tout intérêt à ce que cela fonctionne, et dorénavant c’est le cas !