Budget: le Sénat pose ses exigences, avant une semaine décisive pour le gouvernement
Pilier du "barniérisme", le Sénat termine ce week-end l'examen du volet "recettes" du budget de l’État pour 2025, affichant une attitude constructive mais exigeante vis-à-vis du gouvernement, qui retient son souffle...
Pilier du "barniérisme", le Sénat termine ce week-end l'examen du volet "recettes" du budget de l’État pour 2025, affichant une attitude constructive mais exigeante vis-à-vis du gouvernement, qui retient son souffle avant une semaine où il pourrait tomber.
Dernières heures apaisées avant le couperet de la censure? Plus que jamais menacé d'être renversé après un premier 49.3 probablement activé lundi à l'Assemblée nationale, Michel Barnier continue d'éprouver son budget devant la chambre haute.
Dominée par une alliance droite-centristes qui soutient le gouvernement, la Haute Assemblée doit voter dimanche sur l'ensemble de la partie "recettes" du budget, un scrutin sans suspense.
Elle s'attaquera ensuite aux multiples missions budgétaires thématiques, promettant de nets coups de rabot dans la dépense, sur l'Aide médicale d'État (AME) en faveur des immigrés sans papiers, la formation des enseignants, le "Pass culture" ou le Service national universel...
Après une semaine de débats scrutés comme rarement au Palais du Luxembourg, les sénateurs ont globalement approuvé l'essentiel des mesures phares du gouvernement, en quête de 60 milliards d'euros d'économies pour relever des finances publiques en berne et ramener le déficit à 5% du PIB en 2025, contre 6,1% en 2024.
Taxe temporaire sur les très hauts revenus, contribution exceptionnelle des grandes entreprises, malus automobile renforcé, fiscalité augmentée sur les billets d'avion et les chaudières à gaz... Ces dispositifs ont passé sans encombre ou presque le filtre sénatorial.
Taxes et collectivités
Sur l'augmentation de la taxe sur l'électricité, censée rapporter plus de trois milliards d'euros, il a même devancé l'annonce de Michel Barnier en s'opposant à son relèvement au-delà du niveau d'avant la crise énergétique.
Plusieurs impôts nouveaux ou renforcés sont néanmoins venu contrecarrer les plans du gouvernement, parfois issus d'alliances de circonstance entre la gauche et le centre. Exemples parmi d'autres: le relèvement de "l'exit tax", de la "flat tax" et de la taxe sur les rachats d'actions.
Et sans surprise, celle qu'on surnomme la chambre des territoires a adressé samedi plusieurs gestes en direction des collectivités locales, pour un total de plus d'un milliard d'euros. Elle s'est notamment opposé à l'unanimité à la réduction du Fonds de compensation pour la TVA (FCTVA), un système d'accompagnement des collectivités dans leurs dépenses d'investissement.
Mais les débats feutrés et courtois du Sénat ne sauraient faire oublier au gouvernement son inquiétude majeure: celle de la censure.
L'étau va sérieusement se resserrer dès lundi, avec le retour à l'Assemblée nationale du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2025, un texte truffé d'irritants pour l'opposition (allègements de cotisations patronales, désindexation partielle des retraites, déremboursements de médicaments...).
Ultimatum du RN
L'utilisation probable d'un premier "49.3" par Michel Barnier ouvrira la voie à la première motion de censure de l'automne, qui pourrait, elle, être examinée mercredi.
Si la gauche et le Rassemblement national unissent leurs voix, le gouvernement tombera. Ce serait la première fois depuis la chute du gouvernement de Georges Pompidou en 1962. Et la menace du RN est toujours vive.
"Nous attendons de voir le projet de budget de la Sécurité sociale lundi pour en tirer les conséquences. Si le texte n'a pas évolué et que le gouvernement décide d'un 49.3, nous voterons la censure", a lancé le député RN Jean-Philippe Tanguy dans Les Échos samedi.
En effet, même si le budget de la Sécu a fait l'objet d'un accord entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire mercredi, le gouvernement peut encore modifier son texte jusqu'au dernier moment pour satisfaire aux exigences des oppositions.
A ce stade, les concessions du Premier ministre — abandon de la hausse de la taxe sur l'électricité au-delà de son niveau d'avant-crise, promesse de réforme de l'AME... — ne suffisent pas à Marine Le Pen.
Celle-ci a fixé un ultimatum à Michel Barnier, l'appelant à indexer les retraites sur l'intégralité de l'inflation dès le 1er janvier et à s'engager sur un maintien du taux de remboursement des médicaments.
Plus que jamais mis sous pression, le ministre de l'Économie Antoine Armand a appelé samedi "chacun à ses responsabilités" pour doter la France d'un budget "dans l'intérêt général", au lendemain du maintien de la note de la France par l'agence S&P.
36NT36B