Aprés le démantèlement, le port de Calais optimiste mais vigilant

Un mois aprés l'évacuation des 7 000 migrants qui squattaient les terrains contigus à la rocade portuaire, à quelques centaines de mètres du port de Calais, la Société des ports du Détroit a fait un point complet sur une situation qui s'améliore enfin.

« Le nombre de migrants signalés dans les camions a deccrue de 87 % dans le mois qui a suivi le démantélement ».
« Le nombre de migrants signalés dans les camions a deccrue de 87 % dans le mois qui a suivi le démantélement ».
CAPresse 2016

Sur les voies du port de Calais, un abri à scanner.

CAPresse 2016

Un nouveau buffer (parking de flux) sur le port de Calais permet d'augmenter de 400 le nombre de places dédiées aux camions.

 

Ce n’est pas encore un retour à la normale, mais ça y ressemble beaucoup. Depuis le démantèlement hypermédiatisé de la Jungle fin octobre dernier, le port de Calais respire… Dans les installations de détection qui parsèment le parcours des camions, l’ambiance est moins tendue. «On en a trouvé jusqu’à 60 dans un camion. C’étaient des milliers par mois. Depuis, c’est quelques-uns», raconte un salarié, au pied d’un camion roumain. «Il y a aussi des jours où l’on ne trouve personne», surenchérit Philippe Suisse, chef du département sécurité au port de Calais. La baisse du nombre de migrants détectés atteint 87% entre le mois d’octobre et celui de novembre (après démantèlement). Au-delà des contrôles, c’est la rocade portuaire qui se trouve soulagée : plus d’assauts de migrants, plus d’accidents, plus de blocages ni de bouchons. Les camions ne craignent plus de reprendre cette voie la nuit. «On a eu des nuits où les navires ne partaient qu’avec une dizaine de camions dans les soutes», rappellent Pascal Devaux et Sébastien Douvry, respectivement directeur de P&O à Calais et directeur opérationnel Calais-Dunkerque chez DFDS. Le trafic nocturne s’est effondré de 40% chez P&O. Pour DFDS, le mal fut moindre grâce à son autre ligne à Dunkerque, où trois autres navires accueillaient le fret qui s’y reportait naturellement en raison de la situation calaisienne. Quelques kilomètres plus à l’ouest, c’est aussi Eurotunnel qui en a bénéficié…

 

Des baisses très fortes et une remontée d’activité contrastéeToute l’année 2016, les trafics maritimes ont souffert en continu : les cinq navires de P&O et les trois de DFDS ont enregistré des baisses affolantes : « un million de passagers à ce jour en 2016» selon Pascal Devaux. Plus globalement, Jean-Marc Puissesseau, président de la Société des ports du Détroit, a pointé les dommages qu’a occasionnés la question migratoire : «Sur un chiffre d’affaires de 100 millions d’euros, nous avons perdu 10 millions d’activité en 2015.» Sur le segment fret, la Société des ports estime à 70 000 unités de fret perdues en 2016. Sur celui du tourisme, on compte 300 000 voitures en moins et 1,2 million de passagers qui manquent à l’appel (baisse par rapport à l’année 2015). Depuis le démantèlement, le trafic a globalement progressé de 26%. S’il faudra du temps pour que les touristes reviennent, le trafic fret (plus rémunérateur pour le port) sera plus rapidement au rendez-vous.

Des craintes et un mur. Commentant les chiffres de ces dernières semaines, Jean-Marc Puissesseau s’est projeté vers un avenir moins sombre, tout en conservant une pointe de ressentiment : «Ce n’est pas avoir respecté le port de Calais que d’avoir conduit ces pauvres gens à 500 mètres du port avec des milliers de camions qui leur passaient devant. Cela ne doit plus jamais arriver.». Le sous-préfet de Calais s’est voulu quant à lui rassurant : «Le démantèlement a produit ses effets. Il n’y a pas de camp sauvage, plus d’attaques sur la rocade. Nous nous gardons de tout triomphalisme, mais nous renforçons la sécurité passive avec le mur et d’autres travaux sont attendus.» Sans pour autant en dire davantage… Restent aujourd’hui 6,5 unités des forces mobiles contre 11 avant l’opération. L’Etat souhaite aussi que l’espace de la Lande soit utilisé, une zone classée ZNIEFF : «C’est une décision qui sera prise entre la Région et la Ville de Calais.» Sur la moitié de la voie portuaire allant vers l’A16, le mur, qui fait toujours polémique entre la Société des ports et la Ville de Calais (farouchement contre et déboutée une seconde fois en justice), est quasiment achevé : de la verdure doit recouvrir les plaques de béton. Elle poussera au printemps prochain, comme celle de la lande désertée. Ces terrains appartenant pour moitié à la Ville et pour l’autre à l’Etat seront renaturés ou accueilleront un projet économique comme Heroic Land d’après nos sources.