André Beirnaert, l’enfant du textile a tissé du rêve
Derrière chaque grande réalisation, il y a un homme de conviction. André Beirnaert porte le Ceti depuis les limbes et raconte avec modestie sans oublier les précieux partenaires. André Beirnaert est tombé tout petit dans le textile. A 17 ans, il y faisait ses premières armes. Aujourd’hui, alors que d’autres sont depuis longtemps retraités, il voit avec bonheur se réaliser son rêve.
La Gazette. André Beirnaert, racontez-nous l’histoire du Ceti…
André Beirnaert. L’histoire remontre à dix ans quand en 2002, sous le gouvernement Jospin, Christian Pierret, ministre de l’Industrie, et Pierre Cotte, constatant que le désastre textile était déjà bien avancé, ont lancé le R2ITH, Réseau industriel d’innovation du textile et de l’habillement. Dans les vieilles régions textiles dont la nôtre, des gens étaient déjà fédérés. Gérard Loingeville est devenu président de cette structure un peu spontanée.
Et dans le Nord plus précisément ?
Le Nord a échafaudé un projet autour du nontissé innovant avec le Cent, Centre européen du non-tissé, à Tourcoing. Quelques mois auparavant, l’Etat avait été sollicité par la communauté urbaine pour la ZAC de l’Union. Une mission interministérielle avec MM. Cotte et Dresch a estimé que c’était le lieu d’un projet pour l’image avec la Plaine Images et pour le textile, apportant en cadeau de naissance 5 M€ pour le Ceti, concept émis par M. Cotte pour dépasser les non-tissés.
Ceci pour aller plus loin que le Cent ?
La zone de l’Union a été validée par les hauts fonctionnaires pour prolonger le Cent mais, quelque temps avant l’inauguration du Cent, nous fumes convoqués, Henri Feltz, président de l’Union des industries textiles, et moimême, à Paris, pour la question de confiance : “Voulez-vous de ce projet qui n’a pas de sens si la profession n’y croit pas ?” Henri Feltz m’a laissé décider puisqu’il me passait la main. J’ai hésité quelques secondes et j’ai dit : “On prend le projet.” La création du pôle de compétitivité UP-tex a pris du temps mais le Ceti y figurait comme projet structurant.
On entre alors dans le concret ?
La SEM Ville renouvelée a pris en charge le projet et lancé le concours d’architecture. En aveugle, nous avons choisi le meilleur, le plus beau, le moins cher. Heureux hasard : un Roubaisien, Luc Saison. On s’est posé beaucoup de questions, sur la venue de l’IFTH notamment, et Michel-François Delannoy, élu maire de Tourcoing, nous a posé la question de confiance : “Alors, on le fait ou on ne le fait pas ?” J’ai passé une première commande de matériel et on a travaillé avec Gérard Loingeville, toujours lui, et avec une équipe technique, au choix des outils de filage tricomposants et au non-tissé en voie fondue car le Ceti va élaborer les textiles des matériaux et des process. Inventer des nouveaux matériaux pour de nouveaux usages.
Avez-vous été soutenu et compris ?
Evidemment. Il y a eu un engage-ment fantastique de la Communauté urbaine, avec une implication forte depuis le début de Martine Aubry et de Michel- François Delannoy, mais aussi du Département où Patrick Kanner a repris le dossier. Le Département a mis 1,5 M€ alors que ce n’est pas sa vocation. Sans oublier le support de la Région où Pierre de Saintignon est en première ligne. Le Ceti est un partenariat publicprivé intelligemment construit. On est tous mouillés. On l’a fait ensemble, on va le faire marcher ensemble. Rien n’aurait été possible sans l’implication forte des pouvoirs politiques. Je me suis toujours appuyé sur la conviction que le projet était soutenu par les politiques et qu’il marquait aussi une volonté forte de rebond de cette vieille profession qui a fait notre région. Il n’y a qu’une dizaine de centres de ce type dans le monde.
Et pour quel textile ?
On va inventer. Le textile sort du textile pour entrer dans des métiers qui n’utilisaient pas le textile : automobile, aviation, BTP, équipement et surtout la filtration. Derrière cela, il y a l’économie verte. Le marché des matériaux textiles avancé a été multiplié par cinq en 50 ans, et le marché traditionnel par deux. Ce secteur représente 25 milliards de kilos annuels dans le monde.