Anam’note, le médical en digital
Etudiant à l’IAE Metz, School of Management, le Mosellan Charles-Antoine Robert a présenté son projet lors du concours Pépite national et a été récompensé avec une prix de 10 000 euros. Avec son équipe composée de Romain Didier et Paul Renoult, ils ont eu l’idée de créer un environnement numérique médical optimisé grâce aux technologies issues de l’Intelligence artificielle et des sciences cognitives. Charles-Antoine Robert détaille cette innovation pour la Gazette Moselle.
La Gazette Moselle : Quelle a été la genèse d’Anam’note ?
Charles-Antoine Robert : Ce projet trouve son origine dans mes observations sur le terrain, lors de mes stages à l’hôpital. J’ai en effet suivi un cursus particulier avec 5 années en médecine à la faculté de médecine de Nancy, et 2 années en master de sciences cognitives, interaction intelligence artificielle à l’IDMC à Nancy. Lors de sa visite, un médecin dans un hôpital se rend au lit de son patient pour en faire le suivi et prendre les informations nécessaires, consignées sur place. Il lui faut par la suite entrer les mêmes informations dans le logiciel de gestion des dossiers patients de l’hôpital. Dans les faits, le médecin effectue généralement sa visite en voyant tous les patients avant de revenir saisir les informations dans le logiciel. Il a donc recours à des feuilles de papier sur lesquelles il recopie les informations à relever, qu’il garde dans les poches de sa blouse jusqu’à la fin de sa visite. La situation présente trois problèmes :
– une multiplicité des prises d’informations. Le médecin se trouve obligé de noter deux fois les informations : une première fois dans ses notes personnelles au lit du patient, et une seconde dans le logiciel de gestion. Cette prise d’information est effectuée une première fois par l’externe, puis par l’interne, puis finalement répétée par le chef de service qui valide la procédure. Une étude du cabinet spécialisé Nuance montre ainsi que 40% du temps du médecin est consacré à la gestion et l’échange d’informations.
– un temps de latence entre la prise d’information et leur enregistrement dans le dossier patient. Bien que la prise de note permette de limiter les oublis, il n’est pas rare de manquer un renseignement particulier, ou une réflexion sur la suite du parcours de soin, au moment de l’enregistrement des données.
– un risque pour la sécurité des données médicales. En effet, une fois les informations recopiées dans le logiciel, il n’est pas rare de voir les feuilles de notes égarées, voire emportées par mégarde par les médecins. Des données confidentielles peuvent donc finir dans les mains de personnes non autorisées et même sortir de l’hôpital.
Quel est le concept d’Anam’note ?
En développant une solution ergonomique spécifique au métier et proche des arbres décisionnels médicaux, Anam’note permet à des professionnels de santé de s’équiper d’un ordinateur, mais plus particulièrement d’une petite tablette ou d’un grand téléphone tenant dans une poche de leur blouse pour établir leurs notes et enregistrer directement les informations patient, les échanger instantanément avec les autres médecins y ayant accès, et générer un rapport numérique directement exportable dans le logiciel de soin. Cette prise de note de façon formalisé doit permettre de représenter le parcours des patients sous forme de graphe en terme numérique. Cette représentation permet à terme un traitement plus rapide et efficient des données par des algorithme d’intelligence artificielle comme l’apprentissage fédéré. L’expertise (comprenez entrée par des experts) des données et le caractère formelle étant un pré-requis indispensable à un apprentissage optimal. Les données valorisés issues de l’apprentissage seront laissées à disposition des établissements de santé utilisant la solution. Pour permettre un gain de temps pour l’ensemble du service, la solution embarque aussi un système de gestion des tâche collaboratif permettant de s’assigner des tâches et de les partager avec un collègue ou avec un service en entier, facilitant la transmission des tâches.
La solution apporte ainsi :
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Une prise en main du dossier bien plus rapide pour tout nouvel intervenant par une représentation visuelle du parcours patient, sur un support unique partagé entre tous les intervenants.
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Une réduction des oublis et une amélioration du suivi patient, en permettant une prise de note au format numérique dès la prise d’information.
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Une plus grande sécurité des données médicales, en s’assurant que les données collectées ne puissent être échangées et lues qu’exclusivement entre professionnels de santé ayant un droit d’accès aux données du patient.
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Un gain de temps pour le service et une optimisation de ses ressources médicales.
La solution permet également d’améliorer la comptabilité des hôpitaux. Actuellement, la cotation de l’activité se fait par regroupement des différents patients suivant leurs pathologie et les actes réalisés en groupe de malade. Il est alors facile pour un service financier et non médicalisé d’ignorer certaines spécificités des actes médicaux qui auraient dû entraîner une augmentation de leur coût par classement dans un autre groupe de malade. De plus, il est soumis au risque d’un oubli, tant dans son propre décompte que dans l’enregistrement de l’information par le médecin. Le manque à gagner pour un hôpital de 1700 lits peut ainsi atteindre jusqu’à 6 à 12 millions d’euros. Avec la solution, les actes médicaux sont directement intégrés dans notre représentation du parcours de soin. Le décompte des actes et le classement du patient dans le bon groupe de malade peut donc être automatisé, limitant le risque d’oubli, et réduisant considérablement le temps consacré à cette tâche. De plus, avec la représentation visuelle du parcours de soin du patient, il est bien plus facile de prendre en compte les spécificités de l’acte et donc d’établir la bonne cotation.
Quelles sont les potentialités futures pour Anam’note ?
Dans les prochains mois, nous réaliserons une étude de marché poussée avec le cabinet de conseil Antares. Nous réaliserons à l’issue de cette étude des tests utilisateurs dans quelques hôpitaux bien connues certains privés et d’autres publiques toujours avec l’appuie du cabinet de conseil Antares. Nous venons de recruter un alternant et sommes en recherche de deux profils, un architecte logiciel et un développeur « full stack » dans le but de conforter notre force de développement et d’accélérer la réalisation de l’application. A l’issue de la finalisation de l’application côté hôpital, nous voulons utiliser notre solution pour modifier la façon dont est réalisé l’examen des compétences médicales (aujourd’hui par QCM) pour coller plus à la pratique médicale in Situ et permettre une meilleure structuration entre pratique et enseignement, l’idée étant à terme de générer des cas fictifs pour l’enseignement grâce aux données récoltés directement sur le terrain.
Anam’note, c’est d’abord une réussite collective ?
J’ajouterais une petit remerciement, à l’ensemble de l’équipe du PeeL et de l’incubateur lorrain qui nous aidé à structurer notre projet. Le projet de global incubation de faire passer directement les projets des étudiants-entrepreneurs intéressant du PeeL par une incubation directe avec l’incubateur lorrain fait prendre réellement une autre dimension au projet et permet de l’accélérer de façon incroyable. Nous ne remercierons jamais assez Natacha Hauser-Costa, son équipe, ainsi que Christophe Schmitt et son équipe pour l’aide apporter dans la structuration du projet et dans leur aide encore aujourd’hui dans le suivi de l’évolution de l’entreprise.