Altesse Studio : les brosses à cheveux artisanales à la conquête du monde
Elles étaient 100 entreprises de brosserie dans la région en 1900 et ne sont plus que quatre aujourd'hui. Parmi elle, Altesse studio, créée en 1875 à Mouy, est restée en place et a gardé son savoir-faire unique, mais aussi les machines ancestrales pour fabriquer des brosses à cheveux de haute qualité à la main, de façon traditionnelle. Plus qu'une brosse, Altesse Studio conçoit cet objet du quotidien comme un « outil de soin »... et compte exporter sa propre marque made in France d'exception.
Installée
au cœur de la vallée du Thérain, berceau de la brosserie
française, depuis 1875, Altesse Studio a su préserver l'art de la
fabrication de la brosse à cheveux. Labellisée Entreprise du
Patrimoine Vivant en 2017, puis en 2023, la société a bravé les
époques.
Si elle a connu des baisses d'activités
durant son histoire, elle revit aujourd'hui grâce aux innovations
combinées à son savoir-faire, aux nouvelles stratégies et aux
investissements... dans une société qui abandonne peu à peu la
surconsommation, et qui se tourne désormais vers la fabrication
française, la qualité et le bien-être. « Nous fabriquons
des brosses à cheveux de haute qualité, explique Julia
Tissot-Gaillard, présidente d'une des rares brosseries françaises
depuis 2016. C'est avant tout un outil de soin grâce aux poils de
sanglier et à la technique de fabrication. Et aujourd'hui, nous
avons notre propre marque. »
Une histoire de familles
Altesse
Studio, c'est aussi l'histoire d'une entreprise familiale tout aussi
remarquable que son savoir-faire. Créée d'abord par la
famille Fournival, qui baptise la brosserie Les établissements Fournival,
l'entreprise fabrique à cette époque des brosses à dents dans l’os
de fémur de bœuf et de cheval ou même en ivoire. En 1920, elle se
spécialise dans la fabrication de brosses à cheveux jusqu'à
devenir une référence dans le monde de la mode et de la coiffure 60
ans plus tard, connue sous la marque Altesse, lancée en 1963. Une
épopée qui se fige en 2005, quand la famille Fournival vend
l'entreprise, en liquidation judiciaire. Elle est reprise cette même
année par le beau-père de Julia
Tissot-Gaillard, Jacques Gaillard, petit-fils de brossier, brossier
lui-même, et ex-dirigeant de La Brosse et Dupont, reconnue comme un
grand nom de la brosserie française. Les établissements Fournival deviennent
Fournival Altesse en 2005.
Mais
en 2015 la brosserie vend à perte et connaît une autre crise. Julia
Tissot-Gaillard, qui a travaillé pour des grands groupes, reprend la
présidence de cette PME en 2016 dans le but de montrer au monde ce
savoir-savoir unique. En 2021, Fournival Altesse prend un autre
virage : elle est la première acquisition du groupe Chargeurs,
groupe français leader mondial des marchés de niche, souhaitant se
lancer dans des produits de soin de la personne et lifestyle en
reprenant des entreprises aux savoir-faire exceptionnels. En 2022, la
brosserie devient Altesse Studio (35 salariés) et son avenir est
tracé : devenir
leader mondial de la brosse à cheveux, tout en gardant un
savoir-faire ancestral.
Fabrication à la main
La
renommée d'Altesse Studio est à la hauteur de son savoir-faire.
Dans les ateliers, 25 collaborateurs œuvrent pour concevoir 400 à
500 000 brosses à cheveux par an. À l'intérieur, des machines de
60 et même 80 ans sont
utilisées, de même que les techniques d'antan, pour une fabrication à la main, de A à Z. « Nous
utilisons des soies de sanglier [ndlr :
des poils issus des pays asiatiques qui mangent cet animal à grande
échelle],
ce
qui est la meilleur qualité pour les cheveux grâce aussi à la
forte teneur en kératine,
et
pour certains modèles, nous intégrons du nylon biosourcé,
explique Julia Tissot-Gaillard. Nos
manches sont faits en bois, un isolant qui limite l'électricité
statique, et les coussinets sont faits à base de sève végétale. »
Olivier,
frêne, hêtre, chêne... les manches des brosses à cheveux sont
façonnés par les mains expertes de menuisiers au sein de la propre menuiserie de la brosserie.
Façonnage, empoilage, collage, polissage... sept heure de travail
peuvent être réalisées pour fabriquer une brosse. «
Nous avons gardé la technique du 19e siècle du perçage et du
contre-perçage afin de créer des tunnels pour plier les poils et
non les coller »,
précise la dirigeante. Et Altesse Studio se plie aussi à la demande :
trois types de brosses sont conçues (pour le soin, pour le démêlage
et le brushing) et plusieurs centaines de modèles en découlent.
Une
technique ancestrale qui fait de la brosse à cheveux plus qu'un
objet basique du quotidien. «
C'est un véritable outil de soin qui viendra embellir la chevelure
au même titre qu’un shampoing ou un soin,
poursuit Julia Tissot-Gaillard. Le
poil de sanglier et notre technique permet de bien répartir le sébum, d'obtenir des
cheveux plus brillants et d'éviter la perte de cheveux, pour les
cheveux fins comme les cheveux épais. »
Futur leader mondial ?
Depuis 2021, les moyens d’élargir sa notoriété en France et à l’international sont donnés à la brosserie. Si Altesse Studio travaille déjà pour de grandes marques du secteur de la mode et de la coiffure et exporte dans une vingtaine de pays sous label privé, elle veut conquérir le monde avec sa propre marque. « Notre chiffre d'affaires repose essentiellement sur le marché français, confie la dirigeante. Nous voulons développer l'export dans les années à venir ».
Avec une croissance à deux chiffres depuis la crise sanitaire de la Covid-19, Altesse Studio entend aussi se diversifier. Pendant quelques années, l'entreprise a conçu des brosses pour les barbiers, notamment sous la marque American Crew, et pourrait se faire un nom dans d'autres marchés. « Nous élaborons une gamme animale et une gamme technique », annonce Julia Tissot-Gaillard. En hausse d'activité, la brosserie a investi dans une nouvelle machine d'empoilage et une deuxième est en cours d'acquisition. Si Altesse Studio ambitionne de devenir leader mondial de la brosse à cheveux, la brosserie est, et restera, le fleuron de l'artisanat local.