Accessible pour tous mais endetté
Au 1er janvier 2015, l’ensemble des bâtiments accueillant du public devront être accessibles à tous. Ces travaux ont un coût et de nombreux commerçants se demandent comment ils vont pouvoir supporter cette charge.
Le texte a été voté en 2005 et l’application de la loi est obligatoire pour tous les immeubles neufs depuis. Pour les plus anciens, la date butoir pour effectuer des travaux de mise aux normes est le 1er janvier 2015. A la Crêperie du vieux Beffroi, Denis Granier sait de quoi il s’agit. Il y travaille depuis trente ans. Et il a pris la succession de son patron il y a dix ans. Il a préféré anticiper l’échéance, même s’il a toujours accueilli les personnes handicapées, notamment à mobilité réduite : l’agencement des lieux n’avait jamais posé de problème jusqu’alors. Il avait quelques travaux de rénovation à faire. Il en a profité pour tout remettre à plat.
Son restaurant était disposé de telle manière qu’il aurait fallu beaucoup de petits ajustements pour se plier à la loi et la salle aurait perdu en capacité, passant de 49 couverts à 15 après les travaux. Heureusement, une courette, qui servait jusqu’alors pour les conteneurs, a permis de pousser les murs et d’agrandir l’espace. Sans cela, les travaux n’auraient pas été possibles. Surtout, après la transformation, Denis Granier n’aurait pas eu de quoi rembourser un emprunt et, avec la perte du nombre de couverts, il aurait été obligé de licencier. Car un emprunt, le jeune patron a dû en faire un. Le montant des travaux qu’il avait prévus s’élevait à plus de 200 000 euros. Heureusement, il a pu, en dépit de la crise, présenter un bon bilan au banquier avec une activité qui se maintient et qui est surtout répartie sur l’année sans grosse saisonnalité : les clients de la Crêperie du vieux Beffroi sont fidèles de génération en génération et attachés au lieu.
Les financements accordés, Denis Granier et son épouse ont ensuite travaillé pendant deux ans avec un architecte qui les a guidés. Celui-ci a trouvé des solutions et même revu les plans au tout dernier moment pour faire face à un imprévu. Ils ont fermé l’établissement durant six semaines pendant lesquelles des artisans de tous corps de métier ont travaillé. Quitte à garder baissé le rideau pour faire des travaux, Denis Granier a choisi de faire la totale : cuisine, local de plonge séparé, isolation, décor. Des murs ont été abattus, le bar a changé de place pour élargir l’entrée et permettre les 1,40 mètre de passage réglementaire pour l’accès et dans les allées, les toilettes sont vastes et équipées d’un sas et d’une alarme lumineuse pour les sourds et malentendants qui s’y trouveraient en cas d’incendie. Pour la mise en oeuvre, Denis Granier a choisi de ne faire travailler que des petites entreprises et des artisans régionaux. C’était une question de conviction. Tout le monde a joué le jeu pour tenir les délais. Tout a été mis à nu en moins de temps qu’il ne faut pour le dire, 8 m3 de béton ont permis de remettre la dalle au même niveau et de supprimer la marche qui ne permettait pas le passage d’un fauteuil roulant.
Mi-octobre, la crêperie de la rue du Chapeau- de-Violettes a pu accueillir ses clients dans un décor entièrement neuf, sobre mais chaleureux, surtout avec le sourire des propriétaires.