A Las Vegas, les travailleurs pauvres ne misent plus sur le jeu électoral

Au paradis des casinos, les touristes vont et viennent. Les habitants de Las Vegas restent, sans ramener de jackpot chez eux: l'inflation a fait de l'économie leur principale préoccupation pour l'élection présidentielle, mais les...

Sally Uribe, serveuse dans un casino à Las Vegas, le 11 octobre 2024 © Ronda Churchill
Sally Uribe, serveuse dans un casino à Las Vegas, le 11 octobre 2024 © Ronda Churchill

Au paradis des casinos, les touristes vont et viennent. Les habitants de Las Vegas restent, sans ramener de jackpot chez eux: l'inflation a fait de l'économie leur principale préoccupation pour l'élection présidentielle, mais les jeux n'y sont pas faits pour autant.

"Quand Trump était président, je travaillais 40 heures par semaine", raconte Sally Uribe, serveuse qui gagnait autrefois plusieurs centaines de dollars chaque soir en travaillant dans un casino.

Désormais, cette quadragénaire qui élève seule ses trois enfants cumule trois boulots: "je paye plus d'intérêts, l'essence est plus chère, les courses aussi. Tous les prix ont explosé", explique-t-elle à la sortie de son shift du matin, blâmant l'administration démocrate.

Donald Trump a promis de faire baisser les prix et d'augmenter les salaires. Mais la proposition du candidat républicain qu'elle préfère est celle de détaxer les pourboires, dévoilée à Las Vegas en juin.

La mesure figure aussi dans le programme de sa rivale démocrate Kamala Harris et les deux candidats sont au coude-à-coude dans l'Etat clé du Nevada, avec ses six grands électeurs, remporté par les démocrates depuis 2008.

Serveurs, croupiers ou réceptionnistes... l'hôtellerie et les loisirs représentent un quart des emplois de la région de Las Vegas, où sont concentrés la plupart des trois millions d'habitants de l'Etat.

Au Nevada, quatre personnes sur dix affirment que l'économie est le sujet le plus important, selon un récent sondage.

"Nous vivons vraiment de nos pourboires", affirme Spencer Lindsay, employé dans un hôtel, pour qui la proposition de les détaxer est essentielle pour espérer remporter l'Etat.

Membre du puissant syndicat Culinary Union qui compte 60.000 membres, il fait du porte-à-porte pour la campagne de Kamala Harris.

Le prix des "médicaments, de la nourriture et de l'essence, c'est là-dessus qu'on m'interroge le plus", dit-il, après une interaction avec un jeune soutien de Donald Trump sur le coût de la vie.

Electeurs désabusés

La pandémie de Covid-19 a paralysé la ville, ultradépendante du tourisme et de l'événementiel (sport, conférences, etc.), et même si la fête a repris depuis, la gueule de bois se prolonge: le taux de chômage au Nevada est le plus élevé du pays, à 5,6% contre 4,1% en moyenne aux Etats-Unis. 

"J'ai candidaté partout, mais rien", se désespère Gallego Pérez, sans emploi depuis quatre ans, sur un parking où il est recruté à la volée pour des petits boulots qui lui rapportent environ 1.000 dollars par mois, à peine la moitié de ce qu'il faut en moyenne pour payer un loyer au Nevada.

Il est tout aussi désabusé quant à l'issue de l'élection: "qu'est-ce que cela va changer pour nous?", s'interroge-t-il.

Et il n'est pas seul.

Après avoir dépassé le célèbre panneau "Welcome to Fabulous Las Vegas" qui accueille les touristes près de l'aéroport, les automobilistes peuvent en observer une réplique miniature brandie sur le bord d'une route par Sam Mitchell.

Mais le texte a été remplacé: "Sans-abri et affamé, tout peut aider".

Électricien, il a perdu son travail il y a quatre ans: "Il suffit d'arriver en retard un jour, puis un deuxième, quand on prend le bus ça arrive facilement". "Effet boule de neige", il a tout perdu.

"J'étais plutôt conservateur", raconte celui qui considérait Donald Trump comme un "homme d'affaires doué".

"J'étais persuadé que le gouvernement devait nous laisser tranquilles (...) et ça m'est revenu en pleine gueule car maintenant j'aurais vraiment besoin d'eux."

Pour Bianca Garziola aussi, le résultat de l'élection importe peu. En revanche, elle se réjouit du chiffre d'affaires de sa boutique de vêtements, boosté par les ventes de t-shirts à l'effigie des candidats.

"Dans ce business, c'est Trump qui gagne, tous les objets à son effigie se vendent."

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