35 M€ à partager entre les communes et intercommunalités du Nord

On sait le Département du Nord en difficulté financière, mais les communes et intercommunalités le sont tout autant. Ce qui n'empêche pas le premier de vouloir venir en aide aux secondes au travers de nouveaux dispositifs de soutien à leurs projets en matière de développement et d'aménagement des territoires et de voirie. Avant leur adoption le 13 juin dernier, ces dispositifs ont été présentés aux élus lors de sept rencontres territoriales.

Quelque 80 participants à la rencontre territoriale tenue à Lambersart.
Quelque 80 participants à la rencontre territoriale tenue à Lambersart.

 

D.R.

Marc-Philippe Daubresse, député-maire de Lambersart et vice-président à l'aménagement du territoire, à la stratégie d'urbanisme et à l'urbanisme réglementaire à la MEL, Guy Bricout, vice-président du Département en charge de l'aménagement du territoire, Christophe Picard, DGS du Département, Mathieu Cooren, chef de projet nouvelle politique départementale d’aménagement.

 

 

Si les maires du Nord n’avaient pas compris qu’était arrivé le temps de la disette − qu’on peut aussi appeler temps de la remise en état des finances départementales −, les sept rencontres territoriales de présentation de la politique départementale ont, au vu de celle organisée à Lambersart le 3 juin 2016, été explicites : finis les droits de tirage en centaines de millions d’euros, l’heure est au resserrement des crédits. En clair, pour 2016, le Département du Nord met en œuvre une enveloppe financière unique de 35 M€.

C’est ce que Guy Bricout, vice-président du Département en charge de l’aménagement du territoire, a entrepris d’expliciter aux 648 maires et présidents d’intercommunalités du Nord, lors des rencontres organisées du 13 mai au 7 juin, faisant ainsi halte à Cambrai, Avesnes-sur-Helpe, Saint-Saulve, Douai, Méteren, Lambersart et Téteghem. Des rencontres qui auront été, au final, suivies : 98 participants à Cambrai, 93 à Avesnes, 80 à Lambersart…

Consacré “chef de file des solidarités territoriales” par les récentes lois MAPTAM et NOTRe, le Département a voté, lors de sa séance plénière du 13 avril 2016, les trois dispositifs – Ingénierie territoriale, Villages & Bourgs, Projets territoriaux structurants – qui font sa nouvelle politique d’aménagement du territoire. Guy Bricout n’a pas caché le contexte difficile auquel il a dû s’adapter : “Avant, c’était les contrats de territoire, 930 M€… Il y avait un droit de tirage qui était le FDAN-FDST, 478 M€… C’était une politique de guichet, les communes pouvaient demander une somme sans justifier de la pertinence des dossiers. […] Nous, on préfère être partenaire et pousser les dossiers qui sont les plus intéressants pour les territoires.”

Le Conseil départemental a donc revu la copie sur l’aménagement du territoire et défini trois enjeux clés pour sa nouvelle politique : favoriser le développement des territoires, renforcer la solidarité et l’équité territoriales, soutenir l’attractivité territoriale. Revue de détail sur les trois nouveaux dispositifs de soutien départemental.

L’accompagnement de l’ingénierie départementale. L’idée du Conseil Départemental est ici de mettre à la disposition des communes et intercommunalités qui le souhaitent des agents du Département afin de les accompagner dans leurs projets (besoins en ingénierie de financement, notamment européen, juridique, technique…). Afin d’évaluer les besoins dans les territoires, le Département a interrogé, début 2016, les 648 communes et les 20 EPCI du Nord. Les résultats sont clairs, avec un très bon taux de réponses (43% au niveau du Nord, 35% pour l’arrondissement de Lille) et des attentes fortes.

Le paysage des besoins ayant été recensé, les services travaillent à la mise au point d’un catalogue de prestations et la constitution d’un établissement public administratif – la loi NOTRe rendant impossible la formule de la régie départementale – auquel les collectivités intéressées devront adhérer pour un montant forfaitaire en fonction de leur nombre d’habitants. La délibération de mise en œuvre est prévue en fin d’année pour une opérationnalité au 1er janvier 2017.

L’aide départementale aux villages et bourgs. Destiné aux communes de moins de 5 000 habitants, ce dispositif cible leurs projets du quotidien et de proximité d’un montant minimum de 8 000 €, tels que l’amélioration du patrimoine public, la sécurité, l’accessibilité… 540 communes sont concernées par ce dispositif, dont l’autorisation de programme 2016 s’élève à 7 M€. Pour faire connaître leur dossier, les communes devront répondre à un appel à projets (AAP) qui sera lancé le 20 juin. Les projets retenus bénéficieront d’un accompagnement financier, variable selon la richesse des communes (potentiel financier, effort fiscal et revenu moyen par habitant), avec un pourcentage de subventionnement maximum de 30, 40 ou 50%. Le montant de subvention maximum est fixé à 300 000 €.

Le soutien aux projets territoriaux structurants. Doté d’une autorisation de programme 2016 de 23 M€, ce dispositif se veut porteur de développement local, d’innovation et de valeur ajoutée pour les territoires. Les porteurs de projet à rayonnement intercommunal, intercommunalités et communes, devront répondre aux thématiques prioritaires de leur territoire d’implantation définies sur la base d’un diagnostic partagé, s’inscrire dans une stratégie territoriale globale (SCoT, projet de territoire, etc.) et être de qualité (novateur, utilité sociale, clause d’insertion, dépenses de fonctionnement financées…). La procédure retenue est celle d’un appel à manifestation d’intérêt (AMI) qui sera lancé le 20 juin. Les projets présentés devront représenter un investissement minimum d’1 M€, de 0,5 M€ pour les projets de rénovation. Ils pourront être subventionnés à concurrence de 3 M€, avec un taux de cofinancement jusqu’à 40%, avec une bonification possible de 10% pour les projets innovants. Les études préopérationnelles pourront être accompagnées à hauteur de 50%, avec un montant maximum de 50 000 €.

En complément de ces trois dispositifs, le Département a décidé de consacrer 4,8 M€ en direction des politiques ciblées thématiques, telles que l’assainissement rural, la politique agricole, les haies bocagères, les collèges privés…

Côté positif de ce dispositif − au moins pour les maires ! −, il reprend des éléments de diagnostic et d’enjeux déjà travaillés lors de la précédente mandature. Autre bonne nouvelle de ces rencontres territoriales, les 300 projets délibérés sous l’ancienne majorité, c’est-à-dire jusqu’au 16 février 2015, seront payés. Pour les autres projets en attente, ils devront s’inscrire dans les nouveaux dispositifs. “Des crédits de paiement sont là pour permettre de solder ces factures“, factures qui s’élèvent à 111 M€.

Ne reste plus aux maires et aux présidents d’intercommunalité qu’à peaufiner leurs projets pour mieux répondre aux appels à projets et à manifestation d’intérêt. Ultime précision apportée par Guy Bricout sur l’avenir du dispositif : “Globalement, sur les deux à trois années qui viennent, on est sur cette enveloppe a minima.” Ce n’est pas le Pérou, mais n’est-ce pas mieux que rien ?

 

 

ENCADRE

 

À Lambersart, le 3 juin 

Une rencontre tout en explications et en échanges

 

D.R.

Quelque 80 participants à la rencontre territoriale tenue à Lambersart.

Comme lors des six autres rencontres territoriales, celle consacrée à la métropole lilloise – 133 communes, 17 cantons et 4 intercommunalités, MEL, Pévèle-Carembault, Haute-Deûle et Weppes en cours de fusion – a débuté par une présentation du diagnostic établi sur son territoire : 1 234 000 habitants en 2012, 1 300 000 en 2035 ; 43% de moins de 30 ans (41% dans le Nord, 37% en France), soit 524 000 jeunes ; 3e pôle français d’enseignement supérieur avec 100 000 étudiants (+15 000 en six ans) ; une Métropole locomotive ; un territoire qui se réinvente et crée de nouvelles filières ; un réseau routier en tension, engorgé, saturé ; l’emploi industriel en recul ; un taux de chômage à 12,2%, mais à 14,7% sur la zone d’emploi de Roubaix-Tourcoing ; un revenu médian à 19 872 €, mais un revenu fiscal à 9 641 € à Roubaix… Au final, des disparités fortes entre les territoires. Mais aussi 49% des sols dédiés à l’agriculture pour 1 180 exploitations, la deuxième métropole française en termes de pollution…

On est complètement en phase par rapport au SCoT“, a résumé Marc-Philippe Daubresse. Insistant particulièrement sur «les problèmes majeurs de confluence entre ville et campagne“, avec son pendant, “le respect de la ruralité” ; la nécessité “d’avoir une ambition plus forte en matière de logements“, de l’ordre de 7 à 9 000 logements neufs à construire par an ; la question de la mobilité, “sujet prégnant pour le développement économique“. Pour mieux souhaiter, in fine,travailler ensemble, essayer d’être efficient et jouer l’effet levier“, avec aussi deux écueils à éviter pour le Département : le saupoudrage et l’abondement des seules grosses intercommunalités.

De la même façon, il faudra prendre en compte le financement global des projets pour les mettre en perspective avec le fonds de soutien à l’investissement public local, avec la Région… Certes, certains représentants n’ont pu s’empêcher de s’inquiéter du devenir de promesses de subventions qui ont pu être faites pour tel ou tel équipement, mais cette sixième rencontre aura tenu ses promesses en permettant de voir “comment, avec des moyens très compacts, le Département va pouvoir déployer sa nouvelle politique“.